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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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petits yeux. Car, à l'inverse de Lina, Catarina ne croyait pas au miracle. Elle n'en avait jamais vu sur la lande les nuits de pleine lune. Jamais. Qui venait mourait. C'était ainsi depuis que cette terre avait connu les Géants. Depuis qu'elle vivait près des morts, pour mieux les écouter gémir, et pour les braver. Si ces deux-là en avaient réchappé, ce n'était pas sans raison.
    Mounia reposa son gobelet et malgré sa migraine se força à sourire.
    — J'en reprendrais bien un peu, s'il en reste.
    Les yeux de Catarina se rétrécirent encore.
    — Êtes-vous sûre ?
    — Certaine. Cela me fait du bien.
    Catarina vida son pot. Soit le diable se moquait d'elle, soit il fallait admettre que Dieu lui-même avait protégé ces gens.
    — Cette nuit, vous resterez enfermés, décida-t-elle.
    — C'est inutile, ils ne reviendront pas…
    Ils se regardèrent avec étonnement. Les mêmes mots. La même certitude. Au même moment. Le regard de Catarina passa de l'un à l'autre. Alertée par des pleurs que la brise portait, Lina venait de se lever pour se pencher précipitamment à la fenêtre débarrassée de ses épais volets d'intérieur.
    — Le nuraghe, murmura Mounia.
    — Le nuraghe, approuva Enguerrand.
    — Quoi le nuraghe ? s'impatienta Catarina qu'un long frisson glacé agaçait le long des dorsales.
    Saisie brusquement d'une émotion intense, Mounia prit les doigts d'Enguerrand.
    — Te souviens-tu y être allé ?
    — Si cela était, pourquoi cette bosse à mon crâne ? Pourquoi étions-nous inconscients à l'endroit même où nous nous sommes rejoints ?
    — Était-ce bien le même ? insista Mounia, indifférente à Catarina qui la fixait intensément, à Lina qui revenait, soulagée d'entendre de nouveau les rires l'emporter.
    — Tu as toi-même ramassé mon épée…
    — C'est vrai, consentit Mounia à regret. Un instant pourtant j'aurais juré…
    — Nous aurons rêvé, conclut Enguerrand.
    Ils ne vomissaient pas. Mais ils avaient été possédés. De cela désormais Catarina était sûre. Restait à savoir pourquoi. Et surtout si les démons les avaient quittés. Les grands moyens, décida-t-elle. Leur tournant le dos, elle trottina comme une souris jusqu'à son lit, souleva le matelas, farfouilla à hauteur de l'oreiller.
    — Les épices ? questionna Enguerrand pour revenir définitivement à la réalité.
    — Deux des tonnelets sont intacts, le troisième fendu mais récupérable. Mes deux aînés sont occupés à les remonter. Quant au dernier, éventré sur la roche vraisemblablement lorsque la bête s'est couchée, la tornade a dispersé son contenu, énuméra Lina désolée avant de marquer un oh ! de surprise.
    Mounia et Enguerrand se tournèrent de trois quarts et, à leur tour, découvrirent Catarina qui les bravait, armée du crucifix qu'elle avait récupéré.
    Mounia fut la première à réagir. Entre le rire et le respect.
    — Au regard de ce que vous m'avez raconté hier, je comprends votre inquiétude, Catarina. Que voulez-vous que nous fassions ?
    — Embrassez la croix, ordonna la Sarde, l'œil mauvais.
    — Vous ne pensez tout de même pas… se renfrogna Enguerrand avant de satisfaire à la muette supplique de son épouse qui s'était, elle, déjà levée.
    — Et maintenant ? demanda-t-il après avoir obtempéré.
    Un peu rassérénée de voir qu'ils n'étaient ni l'un ni l'autre partis en fumée, Catarina leur pinça la joue droite, leur cogna le tibia d'un coup de pied, la bouche emplie d'une incantation incompréhensible, avant de se planter devant eux, les poings sur ses hanches osseuses. Indifférente à leurs grimaces de douleur et au fou rire nerveux de Lina, elle redressa le menton.
    — Maintenant, dit-elle avec morgue, nous descendons au nuraghe !

30
    Primesautière. Ainsi était l'humeur de Djem tandis qu'il poussait son cheval au galop à travers les sentiers forestiers, se gardant des broussailles et branches basses dans une gymnastique qui maintenait tous ses sens en alerte. Un regard furtif par-dessus l'épaule. Nassouh peinait à se maintenir dans son sillage, et pourtant, songea Djem sans ralentir l'allure, le tchélébi passait pour un admirable cavalier. Il se mit à rire dans le vent. L'amour lui donnait des ailes. Il se sentait tel l'aigle planant sur les sommets, à la verticale du monde, dominant les misérables circonvolutions humaines d'un mépris prononcé. Libre. Oui, pour la première fois depuis longtemps il

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