Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Chant des sorcières tome 3

Le Chant des sorcières tome 3

Titel: Le Chant des sorcières tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
de colère, elle balaya sans même les toucher les pots de verre qui encombraient la table. Ils se brisèrent au pied de l'athanor, éteint depuis longtemps. D'un pas vif, elle se dirigea vers le fond de la grotte, jeta la main dans une anfractuosité baignée d'ombre et ramena le flacon pyramide entre ses ongles recourbés. Au moins Jeanne ne l'avait-elle pas récupéré. Marthe n'imagina pas un seul instant que sa prisonnière ait pu se libérer seule. Elle remit la fiole dans sa cache et, sans même se donner la peine de se lancer sur les traces de l'évadée, regagna à vive allure le château de la Bâtie.
    Jacques y dormait auprès de Sidonie lorsqu'elle fit irruption dans leur chambre. Il s'éveilla en se sentant soulevé avec force de sa couche. L'instant d'après, comme les verrines dans la grotte, il se fracassait contre un petit coffre bas et Sidonie hurlait.
    — Silence ! lui intima Marthe dans sa fureur hautaine.
    — Décidément c'est une manie ! maugréa Jacques, le rouge de la colère aux joues, en essayant de se dépêtrer du meuble démembré sous l'impact.
    Marthe claqua des doigts une première fois, et une torche s'enflamma contre un mur. À la seconde, ce furent des cendres qui se transformèrent en brasier dans la cheminée.
    Elle fixa un œil mauvais sur les morceaux de bois autour de Jacques. Ils s'embrasèrent et il n'eut que le temps de se jeter sur le côté pour n'être pas brûlé.
    — Veux-tu donc enflammer le château tout entier ? gueula Sidonie, effrayée.
    — S'il le faut, et la contrée avec. Je t'avais prévenu, Jacques de Sassenage !
    — Prévenu de quoi ? de vos manières infectes ? de vos maléfices ? de vos sortilèges ? Point n'était besoin de me les rappeler, je m'en souviens fort bien, merci ! débita-t-il, ulcéré, tout en éteignant le début d'incendie avec l'eau d'une cruche attrapée hâtivement sur une tablette.
    Ensuite de quoi, et bien qu'il fût moulu de contusions, il se planta devant elle, les poings sur les hanches.
    — Allez-vous me dire à présent ce qui justifie que vous transformiez ma chambre en bûcher ? Pour autant que je m'en souvienne, vos ordres ont été exécutés !
    Marthe pinça des narines et le fixa droit dans les yeux pour sonder son âme.
    — Comme si vous ne le saviez pas !
    Mais aussitôt dit, elle recula sous le coup de la surprise. Jacques de Sassenage ignorait où Jeanne se trouvait.
    — Vous ne le savez pas.
    Jacques croisa les bras, fronça les sourcils, bomba le torse.
    — Alors je sais, je ne sais pas… Et quoi donc qui vous embarrasse au point de me bousculer ?
    Marthe les toisa tous deux avec dédain.
    — Un mouvement d'humeur qu'il me fallait passer, dit-elle en regagnant la porte.
    Jacques la rattrapa par le bras, l'œil aussi terrible et soupçonneux qu'elle l'était.
    — Un instant. Il n'est rien arrivé à Jeanne, n'est-ce pas ?
    — Rien. Comme je vous l'ai dit, elle est en sécurité. Ce qui n'est votre cas que parce que je l'ai décidé. Retournez vous coucher.
    Elle se dégagea d'un mouvement d'épaule.
    — Et ne vous avisez plus de me toucher, menaça-t-elle en détachant chaque syllabe comme un poignard qu'on aurait lancé.
    À peine eut-elle franchi la porte que torche et cendres redevinrent aussi froides qu'avant son irruption.
    Jacques se remit au lit. Instinctivement, Sidonie se blottit contre lui.
    — Folle, elle devient folle, se lamenta-t-elle.
    — Chuuut… c'est terminé, chuchota-t-il en lui caressant les cheveux, l'esprit en paix.
    Demain, il assurerait Algonde que ses conseils avaient porté.
    « À l'inverse de moi, Marthe ne peut lire spontanément dans l'esprit des gens, lui avait-elle expliqué en aparté. C'est un acte magique à part entière qui exige pour elle la pleine soumission de sa victime et un contact physique. Jusque-là cela lui était facile, la peur qu'elle génère créant d'elle-même une situation de vulnérabilité. Mais peu de chose suffit pour couper court à son introspection. Le sommeil tout d'abord, trop chargé de rêves pour qu'elle puisse faire la part du vrai et du faux. La colère aussi, qui crée un champ de force et l'empêche de passer, et enfin l'inquiétude pour un être cher. Peu importe qu'Aymar de Grolée délivre Jeanne, tant que vous, monsieur le baron, ignorerez où elle se trouve, tant que vous vous inquiéterez d'elle, tant que vous rendrez Marthe responsable de son état, lors vous ferez barrière à la

Weitere Kostenlose Bücher