Le clan de l'ours des cavernes
caverne, à son foyer, elle prit l'écuelle dlza qu'elle avait disposée sur sa couche, une écuelle patinée par des usages répétés depuis des générations. Elle sortit la petite bourse teintée de rouge de son sac de guérisseuse et en vida le contenu. A la lumière de la torche qui éclairait la grotte, elle examina les racines. Iza lui avait indiqué
maintes fois comment évaluer la quantité appropriée, mais Ayla avait encore des doutes sur le dosage convenable pour les dix mog-ur. La force du breuvage ne dépendait pas seulement du nombre, mais aussi de la taille des racines et de leur ‚ge.
Elle n'avait jamais vu Iza procéder, en raison du caractère sacré du breuvage interdisant de le préparer en dehors du rite. Les filles de guérisseuses apprenaient à le doser en observant leurs mères lors des cérémonies et plus encore gr‚ce à leur mémoire ancestrale. Mais Ayla n'était pas née dans le Clan. Elle choisit plusieurs racines, puis en ajouta encore une pour faire bonne mesure. Elle se rendit ensuite à
l'entrée de la caverne o˘ Creb lui avait dit d'attendre. La cérémonie commençait.
Il y eut d'abord le son des tambours de bois, puis le martèlement des lances sur le sol, et enfin le staccato des battements sur le cylindre de bois creux. Les servants passèrent parmi les hommes avec les coupes d'infusion de datura, et bient‘t tous se laissèrent porter par le rythme lancinant. Les femmes restèrent à l'écart, leur tour viendrait plus tard.
Tandis que la danse des hommes se transformait en véritable transe, Ayla attendait anxieusement.
Une tape sur l'épaule la fit sursauter : elle n'avait pas entendu les mogur venir du fond de la caverne. Les sorciers sortirent silencieusement pour se placer en cercle autour de la peau d'ours. Mog-ur se tenait face à la bête qui se dressait de toute sa hauteur devant lui, dans un mouvement à
jamais figé, simple simulacre de force et de sauvagerie, mais qui semblait néanmoins menaçante
Ayla vit le grand sorcier faire un signe aux servants qui jouaient sur les instruments de bois, leur intimant de s'arrêter. Comme le silence se faisait soudain, les hommes levèrent les yeux, surpris de découvrir les mog-ur là o˘ il n'y avait personne un instant auparavant.
Cette fois, Avla comprit l'astucieux manège des sorciers, qui tenaient captivée l'assemblée.
Mog-ur attendit jusqu'au moment o˘ il vit tous les regards rivés sur la gigantesque dépouille du Grand Ours des Cavernes, éclairée par le feu cérémoniel et entourée par les sorciers. Il fit à Ayla le signe discret qu'elle attendait. Elle se débarrassa en un clin doeil de la fourrure qui l'enveloppait, remplit l'écuelle d'eau fraîche et, les racines à la main, elle se dirigea vers le grand sorcier borgne.
quand Ayla pénétra dans le cercle de lumière, l'ébahissement fut général.
Tant qu'elle était vêtue de sa peau de bête nouée à la taille par une longue lanière de cuir, elle parvenait à faire oublier combien elle était différente. Mais une fois débarrassée de ce vêtement informe, son corps fin et délié apparut dans toute son étrangeté, que rien ne pouvait dissimuler, pas même les lignes et les cercles rouges et noirs dessinés sur sa peau.
Il manquait à son visage les fortes m‚choires, et la platitude que lui donnaient son nez petit et son front haut ressortait étrangement à la lueur du feu. Les flammes jetaient un éclat d'or sur sa longue crinière blonde, qui brillait telle une splendide couronne sur la tête hideuse de cette femme née chez les Autres.
Mais sa taille, surtout, impressionnait. Ils ne s'en étaient pas vraiment rendu compte, quand elle allait et venait, l'attitude réservée, le plus souvent chargée d'un fagot de bois ou d'ustensiles de cuisine. A présent, debout devant les sorciers qu'elle dépassait tous d'une bonne tête, elle stupéfiait tout le monde par sa haute taille.
Mog-ur accomplit une série de gestes rituels, invoquant la protection de l'Esprit qui planait encore au-dessus d'eux. Alors Ayla mit dans sa bouche les racines séchées. Elle avait du mal à les m‚cher car elle ne possédait pas les maxillaires vigoureux et la solide denture des membres du clan. Iza l'avait bien avertie de ne pas avaler la moindre goutte du jus qui se formait dans sa bouche, mais elle ne put s'empêcher de le faire, Il semblait à la jeune femme qu'il lui fallait m‚cher sans fin pour ramollir les racines, et au moment o˘ elle
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