Le clan de l'ours des cavernes
Clan : la capacité à
communiquer par la méditation avec leur mémoire commune, leur mémoire ancestrale. Les mog-ur, quant à eux, possédaient à un degré
particulièrement développé cette faculté naturelle gr‚ce à un entraînement délibéré, mais chez Mog-ur, ce don était exceptionnel.
Il savait comme personne conduire les esprits à travers les pages du temps que leur faisait revivre la mémoire. C'est pourquoi la communauté de son propre clan était plus riche et plus complète que celle de tout autre clan.
Avec les mog-ur, il parvenait d'emblée à instaurer une communication télépathique. Le breuvage d'lza, qui aiguisait les sens et ouvrait les esprits, lui permettait également d'entrer en symbiose avec Ayla.
La naissance traumatique qui avait endommagé le cerveau de Mogur et l'avait privé d'une partie de ses moyens physiques n'avait pas altéré la formidable intelligence psychique qui faisait sa force. Mais l'homme boiteux était le dernier de sa race. A travers lui, le Peuple du Clan avait atteint l'apogée de son évolution. Comme la gigantesque créature qu'ils vénéraient, parmi d'autres qui partageaient leur environnement, ils étaient sur une terre encore en formation, alors que la leur était désormais achevée.
Cette race d'hommes qui avait assez de conscience sociale pour veiller sur les faibles et les malades, assez de spiritualité pour enterrer les morts et vénérer un grand totem, cette race d'hommes aux cerveaux volumineux mais démunis de lobes frontaux, qui ne réalisa guère de progrès pendant près de cent mille ans, était condamnée à disparaître, au même titre que le mammouth et le grand ours des cavernes.
Ayla eut soudain l'impression qu'un sang étranger coulait dans ses veines, se mêlant au sien. L'esprit puissant du grand sorcier explorait les tréfonds de son cerveau, cherchant à s'en rendre maître. Ayla comprit soudain que c'était lui qui l'avait sauvée de l'abîme o˘ elle s'enfonçait peu avant, et qu'en outre il empêchait les autres mog-ur, eux-mêmes en relation télépathique avec lui, de prendre conscience de sa présence. Elle ne sentait rien du contact qu'ils avaient avec Mog-ur. Eux avaient senti que le grand sorcier avait établi un contact parallèle, mais ils en ignoraient la nature et étaient à cent lieues de se douter qu'il s'agissait d'Ayla.
Et en même temps qu'elle se rendait compte que Mog-ur l'avait sauvée et la protégeait, elle comprit la profonde dévotion avec laquelle les sorciers s'étaient livrés à l'acte qui l'avait tant révoltée. Elle n'avait pas réalisé qu'il s'agissait d'une communion. Le but du Rassemblement était de renforcer les liens entre clans, de se reconnaître comme Peuple du Clan de l'Ours des Cavernes. Les dix clans rassemblés ici étaient loin de représenter le peuple entier. Les clans absents étaient trop éloignés pour faire le voyage, mais ils partageaient tous le même héritage, la même mémoire, et toute cérémonie célébrée dans n'importe lequel des Rassemblements avait la même signification pour tous. Les mog-ur étaient convaincus, en absorbant le courage du jeune homme qui s'en était allé avec l'Esprit d'Ursus, d'accomplir un geste bénéfique pour tous les clans. Et, en leur qualité de sorciers, doués de capacités mentales particulières, ils communiquaient ensuite à tous le courage ainsi acquis.
Telle était la raison de la peur et de la colère de Mog-ur. La tradition ancestrale voulait que seuls les hommes participent aux cérémonies du Clan.
Le fait qu'une femme assiste à une cérémonie ordinaire au sein d'un seul clan entraînait pour ce dernier la malédiction. Or, en la circonstance, il ne s'agissait pas d'une cérémonie ordinaire, mais d'un rite d'une importance extrême pour tout le Rassemblement. Ayla était une femme et sa présence allait provoquer un grand malheur pour tous. Et Ayla n'était même pas une femme du Peuple du Clan.
Cela, Mog-ur le savait désormais sans la moindre équivoque.
Il le sut dès qu'il prit conscience de sa présence alors que le mal était déjà fait. Il lui fallut accepter l'inévitable, mais devant la gravité de son crime, il ne savait à quel parti se résoudre. Même le ch‚timent suprême serait insuffisant. Avant de prendre une décision, il désira en savoir davantage à son sujet et, à travers elle, au sujet des Autres.
Il avait été étonné en l'entendant appeler à l'aide. Les Autres étaient certes
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