Le clan de l'ours des cavernes
différents, mais il devait nécessairement y avoir des points communs. Mog-ur ressentait le besoin impérieux de connaître la vérité, d'abord pour le salut du Clan, mais aussi poussé par une profonde curiosité. Ayla l'avait toujours intrigué, et il voulait savoir en quoi résidait la différence. Il décida de tenter une expérience.
Assurant plus fermement son emprise sur les esprits, le puissant sorcier, qui contrôlait à la fois les neuf cerveaux semblables au sien et celui d'Ayla, identique et différent, les transporta dans les lointains du temps, à l'aube de l'humanité.
Avla sentit lui venir à nouveau le go˚t de la forêt primitive, puis une impression de chaleur saline. Elle éprouvait la sensation de revivre la naissance de toute chose. Mog-ur constata que le tréfonds de son être, les couches les plus profondes, correspondaient aux siens. Nos commencements furent identiques, pensa-t-il. Ayla percevait dans leur unicité ses propres cellules, et revivait la manière dont elles s'étaient divisées et différenciées dans les eaux tièdes et nourrissantes, et cette évolution avait un sens. Une nouvelle mutation, et les timides pulsations de la vie se transformèrent en un organisme plus complexe.
Une autre mutation, et Ayla ressentit la souffrance de la première bouffée d'air respirée dans ce nouvel élément. Un autre bond, et ce fut la terre riche, l'apparition des premières pousses et la fuite devant les bêtes sauvages. Un bond, et ce fut la chaleur et la sécheresse qui la firent retourner vers la mer. Au bond suivant, la sensation d'avoir laissé un chaînon dans l'élément liquide, et de voir sa silhouette changer. Elle grandit et perdit sa fourrure originelle.
Désormais, elle se tenait debout, marchant sur deux jambes, les bras libres de leurs mouvements, les yeux découvrant un horizon plus vaste. Elle orenait une direction différente de Mog-ur ; mais pas si éloignée cependant qu'il ne p˚t continuer à avancer parallèlement à sa voie. Il interrompit la relation télépathique avec les autres sorciers qui se trouvaient à présent assez proches pour continuer sans lui. De toute façon, leur voyage à
travers le temps se terminait bientôt.
Ils restèrent donc tous les deux, le vieil homme du Clan et la jeune femme qui venait de chez les Autres. Ce n'était plus lui qui guidait, mais chacun avançait sur sa propre voie tout en observant celle de l'autre. Elle vit la terre se recouvrir de glace, mais dans une région beaucoup plus éloignée, dans l'espace comme dans le temps, une région située au bord d'une mer infiniment plus vaste que celle qui bordait leur péninsule.
Elle vit une caverne, qui avait abrité quelque ancêtre du grand sorcier, un homme aux traits semblables. La vision était floue, vue à travers le vide qui séparait leurs races respectives. La grotte formait une large anfractuosité au pied d'une falaise abrupte qui faisait face à une rivière et, au-delà, à une vaste plaine. Un grand rocher coiffait le sommet de la paroi, un rocher de la forme d'un haut pilier dont l'inclinaison donnait l'illusion qu'il allait basculer dans le vide. La roche qui le composait était d'une nature différente de celle de la falaise.
Le déluge et les secousses terrestres l'avaient charrié là, juste audessus de la grotte dans la falaise. La vision disparut, mais son souvenir se grava dans la mémoire de la jeune femme.
Un chagrin bouleversant l'envahit soudain. Elle était seule. Mog-ur ne pouvait la suivre plus avant. Elle trouva son chemin jusqu'à son propre présent et même un peu au-delà. La caverne lui apparut, puis elle eut la vision k-aléidoscopique d'une succession de paysages qui n'étaient pas soumis aux caprices de la nature mais organisés selon des schémas réguliers. Des structures cubiques sortaient de terre et de longs rubans de pierre se déroulaient, sur lesquels se déplaçaient à grande vitesse d'étranges animaux. De gigantesques oiseaux volaient sans agiter leurs ailes. Puis d'autres scènes suivirent, si étranges que leur sens lui resta totalement étranger. Tout cela ne dura que l'espace d'un instant.
Dans sa course éperdue pour gagner le présent, elle avait été emportée audelà de son but, au-delà de son temps. Puis la vision se dissipa et elle se trouva, cachée derrière le pilier, en train de regarder les dix hommes assis en cercle.
Mog-ur la regardait, et elle reconnut dans l'oeil fixé sur elle le même chagrin
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