Le clan de l'ours des cavernes
guérir, répliqua Creb avec le plus grand calme.
Brun avait beau chercher, il n'arrivait pas à trouver une bonne raison pour obliger Creb à se débarrasser de l'animal. Il se trouvait dans les limites de son foyer et aucun code n'interdisait formellement la présence d'animaux dans la caverne. Le fait ne s'était tout simplement jamais produit.
En fait, le lapin n'était qu'un prétexte. Le désarroi de Brun venait de la présence d'Ayla dans le clan. Depuis qu'lza avait décidé de garder l'enfant, toute une série d'incidents inhabituels se produisaient à cause d'elle. Et encore n'était-elle qu'une enfant ! que se passerait-il quand elle serait grande ? Brun ne pouvait s'appuyer sur aucun précédent de ce genre pour réussir l'intégration de cette étrangère parmi eux et il se voyait soudain incapable de faire part à Creb de ses doutes et de sa détresse. Devant la gêne de son frère, Creb chercha à lui fournir une raison sérieuse de garder l'animal.
- Brun, le clan qui nous a reçus lors du dernier Rassemblement avait recueilli un ourson dans sa caverne, lui rappela le sorcier.
- Cela n'a rien à voir. Il était destiné à la Cérémonie de l'Ours. Et puis les ours vivaient dans les cavernes bien avant les hommes, mais pas les lapins !
- Peut-être, mais il n'empêche que cet ourson a bien été introduit dans leur caverne.
Brun ne trouva rien à répondre à cela. Les arguments de Creb se tenaient, mais quelle idée avait eu la fillette d'apporter ce lapin ! Sans elle, jamais un tel problème ne se serait posé. Brun avait le sentiment que les fondements sur lesquels il avait toujours vécu se dérobaient sous ses pieds, comme s'il s'était aventuré dans des sables mouvants. Il préféra abandonner le sujet pour l'instant.
Il faisait beau mais froid à la veille de la cérémonie au cours de laquelle Creb allait donner un nom à la fille d'lza. Le vieillard, que ses rhumatismes torturaient de plus belle, sentait qu'un orage se préparait.
Désireux de profiter encore une fois du temps clair avant l'arrivée des neiges hivernales, il s'en fut se promener par le petit sentier qui longeait le cours d'eau. Ayla l'accompagnait, heureuse d'étrenner les chausses qu'lza lui avait taillées dans une peau d'aurochs tannée, le poil vers l'intérieur, une bonne couche de graisse imperméabilisant le cuir à
l'extérieur. Elle s'était enveloppée dans sa fourrure de léopard des neiges et, pour se protéger les oreilles, s'était couvert la tête d'une peau de lapin, le poil en dedans, nouée sous son menton avec les pattes de l'animal. Elle gambada un instant devant puis revint vers le vieil homme qui allait d'un pas lent. jls marchèrent un moment côte à côte en silence, chacun d'eux perdu dans ses pensées.
Creb se demandait comment il allait nommer la petite fille dlza. Il aimait sa soeur et voulait choisir un nom qui lui plairait. Ce ne serait pas un nom associé à son compagnon défunt, décida-t-il. Au seul souvenir de cet homme il en éprouvait comme de la nausée. Sa méchanceté à l'égard de sa soeur l'avait ulcéré, mais son inimitié remontait à plus loin. Creb se rappelait la façon dont cet homme le malmenait quand il était petit, le traitant de " femme " parce qu'il était incapable de chasser comme les autres. Seule la crainte que ce méprisable personnage avait par la suite éprouvée face aux pouvoirs du sorcier avait tu ses railleries. Creb était content qu'lza e˚t une fille, et non un garçon. Cela e˚t fait trop d'honneur à ce misérable.
Depuis la disparition de cet être détestable, il commençait à apprécier pleinement les joies du foyer. En devenant soudain le patriarche d'une petite famille, dont il se sentait responsable et qu'il était chargé de nourrir, il avait fait l'expérience d',une nouvelle forme de respect de la part des autres hommes, aux chasses desquels il s'intéressait de plus près depuis qu'une partie lui en revenait de droit.
Je suis s˚r qu'lza est heureuse également, songeait-il, en pensant à
l'affection qu'elle lui témoignait, au soin qu'elle prenait à lui faire la cuisine et à prévenir ses moindres désirs. Elle se conduisait exactement comme si elle était sa compagne, sauf charnellement, bien entendu. quant à
Ayla, elle était pour lui une source intarissable de joie. Les particularités qu'il découvrait en elle le passionnaient, et son éducation représentait un défi qu'il éprouvait le désir de relever, comme tout
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