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Le Code d'Esther

Le Code d'Esther

Titel: Le Code d'Esther Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Benyamin , Yohan Perez
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e  Reich. Mes affinités politiques se situent plutôt à droite, je ne le cache pas, mais la violence me fait horreur. Disons que je connais bien Mein Kampf parce que je l’ai étudié. J’ai toujours voulu comprendre comment un homme, avec un livre, avait réussi à entraîner derrière lui tout un peuple, mon peuple…
    — Et vous avez compris ?
    — Pas complètement, je l’avoue ! Les phénomènes de masse me dépassent… Mais j’ai découvert que le livre comportait toutes les réponses aux questions que l’on se posait à l’époque. Des réponses parfois simplistes mais qui avaient le mérite d’exister devant l’incompétence de la classe politique de l’époque. Imaginez qu’aujourd’hui quelqu’un se lève en Allemagne ou en France et qu’il aborde de manière frontale toutes ces questions d’immigration, d’insécurité, de souveraineté nationale, qu’il parle de la patrie et de la fierté d’être allemand ou français, en utilisant le langage du peuple et pas la langue de bois de nos responsables politiques… Vous imaginez le succès qu’il aurait ?
    — Vous semblez bien connaître la France. Vous avez sans doute entendu parler de la famille Le Pen et du Front national.
    — Je vous envie ce parti et ses dirigeants ! Ils sont l’honneur de l’Europe ! » nous répond-il de façon un peu solennelle, les yeux brillants, en se redressant sur la banquette.
    Enfin, il se dévoile. Je le pressentais depuis le début. Je n’ai qu’une hâte à présent : terminer mon café et rentrer à l’hôtel. Je n’ai pas fait le voyage en Bavière pour discuter politique et populisme dans une salle aseptisée et violemment colorée d’une cafétéria de banlieue. Axel n’est pas de cet avis : une « pure intuition », me confiera-t-il plus tard, le pousse à poursuivre la conversation.
    « Donc, enchaîne Axel, vous êtes un spécialiste de l’histoire de Mein Kampf …
    — En effet, répond Günther, visiblement ravi de nous faire partager ses connaissances. J’ai toujours été fasciné par les livres qui ont changé le destin de l’humanité ! Prenez Marx et Le Capital , le “Petit Livre rouge” de Mao… Ils ne sont pas légion, les ouvrages qui peuvent prétendre à ce niveau d’importance !
    — Tous ces ouvrages ont un point commun : ils sont responsables de la mort de dizaines de millions d’individus ! »
    Malgré mon désir de mettre un terme à cette analyse politico-littéraire, je ne peux m’empêcher de réagir.
    « Je suis d’accord avec vous, consent notre interlocuteur. Mais je suis obligé de constater que les événements majeurs du xx e  siècle ont tous été inspirés par un livre. Il faudrait toujours se méfier de la littérature !
    — Les nazis l’ont fait, intervient Axel. Ils brûlaient tous les ouvrages qui tombaient entre leurs mains.
    — C’est une autre histoire, répond notre homme en esquissant une grimace. Ce que je veux dire, c’est que le destin de l’Allemagne a basculé parce qu’un homme, un jour, à quelques centaines de mètres de l’endroit où nous nous trouvons, a couché par écrit des idées simples, accessibles à tous. Et encore, quand je dis que Hitler a écrit Mein Kampf , je ne dis pas la vérité…
    — Que voulez-vous dire ?
    — Le Führer était un immense orateur mais un piètre écrivain. Tout le monde le sait ! La première version de Mein Kampf est truffée de maladresses, d’imprécisions, d’idées non abouties, de fautes de syntaxe. Lorsqu’il quitte la forteresse de Landsberg, en décembre 1924, le manuscrit dans ses bagages, il ne sait pas qu’un long travail de réécriture va commencer. Ils sont une bonne demi-douzaine à retrousser leurs manches et à s’atteler à une tâche dont ils ne soupçonnent pas la future répercussion. Il y a d’abord l’ami fidèle, le compagnon de toutes les luttes : Rudolf Hess. Nous trouvons aussi Ernst Hanfstaengl, un universitaire à moitié américain, diplômé de Harvard. Il y a aussi Emile Maurice, qui deviendra le chauffeur de Hitler. Sans compter deux personnages moins connus : un critique musical, Joseph Stolzing-Cerny, et un prêtre, Bernhard Stempfle, qui vont assurer l’essentiel du travail de mise en forme. Pendant plusieurs semaines, ces hommes vont travailler d’arrache-pied : ils ne changent rien sur le fond, ne touchent pas aux idées, mais ils donnent au texte une force que celui-ci n’aurait jamais

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