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Le Coeur de la Croix

Le Coeur de la Croix

Titel: Le Coeur de la Croix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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trouva au sommet du Golgotha, y coucha un lépreux. La guérison de ce
dernier fut la preuve qu’elle recherchait.
    — Tu connais bien l’histoire de la Vraie Croix, dit
Morgennes.
    — Je connais bien toutes sortes d’histoires, répondit
Cassiopée.
    — Et toi, qu’en penses-tu ? demanda Taqi,
dubitatif, à Morgennes.
    — C’est elle, oui. Je la reconnais… Quant au lépreux,
je n’y crois pas.
    — Pourquoi ?
    — Parce que sinon Baudouin IV n’aurait pas eu
besoin de mes services, ni moi de partir en quête d’un moyen de soigner sa
lèpre, et la mienne…
     
    Au cours de la nuit, tandis qu’ils veillaient sur Simon en
attendant Saladin, Morgennes leur raconta le peu de sa vie dont il se
souvenait.
    Morgennes avait été pendant longtemps l’agent en charge des
opérations secrètes du père de Baudouin IV, Amaury I er de
Jérusalem. C’est à l’occasion des nombreuses expéditions de ce dernier en
Égypte que Morgennes avait appris à connaître, et à aimer, ce beau pays dont il
parlait la langue couramment. Plus tard, la maladie de Baudouin s’étant
déclarée, et s’aggravant au fur et à mesure qu’il grandissait, il était devenu
urgent de trouver un remède – d’autant que les efforts de Guillaume de
Tyr, précepteur et médecin du petit roi lépreux, s’avéraient vains.
    En raison de sa bravoure et de sa connaissance de l’Orient,
Morgennes fut choisi pour partir en quête d’une relique mahométane réputée
guérir de la lèpre : les larmes d’Allah, dont nul ne savait à quoi elles
ressemblaient.
    Pour être bien certain que Morgennes accomplirait sa mission
jusqu’au bout sans faillir, et s’assurer du pouvoir de la relique, on lui donna
à boire un bol de sang mêlé de pus du petit roi lépreux. Quelques semaines plus
tard, il contractait l’horrible maladie. Et quelques mois plus tard, au terme
d’une aventure restée confidentielle, mais que de rares initiés cherchaient à
reconstituer en s’en racontant des fragments, Morgennes parvenait enfin à
retrouver la relique. Il la cacha dans le pommeau de Crucifère, l’épée
qu’Amaury et lui avaient découverte dans un antique tombeau de la ville de
Lydda.
    Tandis que Cassiopée allait chercher quelques branchages,
que Taqi embrasait à l’aide d’une pierre à feu, Morgennes regardait tour à tour
ses nouveaux amis : Cassiopée, Taqi… et même Simon.
    — On m’a beaucoup aidé, dit-il après avoir approché ses
mains de la flambée. Autant qu’on m’a trahi, et ce n’est pas peu dire. Massada,
ce marchand juif que Cassiopée connaît (la jeune femme opina du chef), me donna
de précieux renseignements, mais chercha finalement à me voler. N’y étant pas
parvenu, il préféra me dénoncer au Temple, qui – jaloux des pouvoirs que
l’Hôpital obtiendrait si jamais j’arrivais à soigner Baudouin IV – me
tendit une embuscade, dans laquelle je tombai. Gravement blessé, je délirai de
nombreux jours, perdant la mémoire, oubliant jusqu’à mon propre nom… Jusqu’au
nom même de Dieu…, poursuivit Morgennes en repensant aux dernières paroles de
Raymond de Tripoli. J’avoue qu’aujourd’hui encore je n’ai pas totalement
recouvré l’ensemble de mes souvenirs. Je vis dans une sorte de brouillard. Je
ne sais pas d’où je viens, même si je sais que je suis français. Enfin, tout
cela eut pour conséquence de me faire arriver en retard au chevet de
Baudouin IV, qui était mort pendant ma convalescence. Je ne me suis jamais
remis de cet échec, et ne m’en remettrai jamais. À l’époque déjà, l’Hôpital
m’avait sévèrement jugé, me condamnant à la perte de l’habit pour un an… Cette
mission devait rester secrète, et c’est – je crois – pour me
remercier de n’en avoir jamais parlé que quelques personnes haut placées
intercédèrent en ma faveur pour me faire gagner le rang d’Apôtre de la Vraie
Croix ; honneur que je n’avais jamais demandé, mais qui me donnait, du
moins le croyais-je, une occasion de me racheter. Le plus curieux, je trouve,
c’est ce qui est arrivé à Massada. En voulant me voler les larmes d’Allah, il
empêcha la guérison de Baudouin IV, et précipita, au regard des événements
actuels, le royaume vers sa perte. On ne peut pas dire qu’il en ait été
récompensé, car j’ai pu constater à Damas qu’il avait lui aussi contracté la
lèpre. Quand et comment cela est-il arrivé ? Pourquoi n’en est-il pas
mort ?

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