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Le combat des ombres

Le combat des ombres

Titel: Le combat des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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les saucissiers vidaient en effet les boutilles 3 avec enthousiasme, en revanche, leurs offices et cuisines, sans oublier leurs éventaires, débordaient de victuailles et ils n'avaient donc pas nécessité de se restaurer ailleurs que chez eux. Au contraire, leurs nouveaux coutumiers, de par les fonctions plus délicates qu'ils remplissaient, s'approvisionnaient à l'extérieur, d'autant qu'ils avaient parfois besoin d'un lieu de tractations qui leur garantisse une propice confidentialité. C'est ce que se proposait de leur offrir maîtresse Taure. L'avenir devait prouver qu'elle avait eu raison.
    – Messeigneurs, messeigneurs… vos chambres vous attendent. Vous y trouverez une cuvette d'eau parfumée afin de vous rafraîchir du voyage. Vous pourrez ensuite vous restaurer à votre souhait. Votre messager nous a indiqué que vous comptiez nuiter deux ou trois jours en notre établissement qui se réjouit de l'honneur de vous accueillir.
    – Peut-être davantage dans mon cas, rectifia le comte d'Authon. Mon grand bailli, en revanche, repartira à l'après-demain, au plus tard. Veille à ce que son cheval soit prêt, aubergiste. Pour l'instant, que ton garçon de peine mène nos montures à l'écurie et qu'il les traite avec doigté et bienveillance. Elles sont fourbues et difficiles.
    – À vos ordres, messire, obtempéra le cabaretier en s'inclinant encore davantage avant de se redresser pour hurler :
    – Holà, paresseux de galopin 4  ! Où te caches-tu encore ?
    Un garçonnet d'une dizaine d'années, maigre comme une sauterelle, les yeux cernés de mauve, apparut. Maître Taure y alla du couplet outré qu'il servait devant tous ses clients :
    – Tu sommeillais à ton habitude ! Si ce n'est pas une pitié, vous dis-je ! Ça mange comme quatre à vous ôter le pain de la bouche et ça fainéante comme un lézard au soleil. Allons, vilain traînard… Faut-il que je te frotte les oreilles pour que tu me fasses la grâce de t'occuper des montures de nos seigneurs ?
    Maître Taure fut un peu déçu par le visage impavide du plus prestigieux de ses deux clients. D'habitude, un sourire entendu accueillait sa sortie mille fois ressassée, parfois accompagné d'une repartie : « Des coups de bâton, voilà ce que ça mérite » ou « Au pain sec et à l'eau, ça lui fera l'échine ». Au lieu de cela, toute l'attention d'Artus s'était reportée sur le garçonnet comme il s'approchait d'Ogier. Le comte était prêt à intervenir si son fougueux étalon se montrait menaçant. Peu de gens pouvaient aborder l'animal sans craindre une réaction hostile. Agnès l'avait pu. Elle l'avait monté sans l'ombre d'une appréhension. Mais Agnès était autre. La pensée de son épouse apporta le miracle familier : il s'apaisa.
    Le garçon de peine avança la main vers la bouche du destrier noir et frôla les narines duveteuses, blanches de l'écume de l'effort. Ogier souffla sans faire montre d'agressivité. Au lieu de cela, il tendit la tête vers la main de l'enfant qui caressa son front. Le petit garçon saisit les rênes et s'avança vers l'écurie, suivi du cheval qui lui emboîta le pas sans protester.
    – Gamin…, l'arrêta Artus d'Authon en repêchant une pièce d'un denier d'argent dans la poche de sa jaque 5 d'épais cendal 6 gris. Voilà pour toi, de la part de mon valeureux compagnon à quatre jambes qui n'est pourtant pas accommodant. (Se tournant vers le tavernier et le fixant, il répéta :) J'ai bien dit pour toi . Ce serait gravement m'offenser que de ne pas l'entendre.
    – Quelle munificence, s'exclama maître Taure, que la tentation de récupérer prestement l'argent sitôt le comte éloigné n'avait pas épargné. Il ne le mérite pourtant pas.
    – J'en ai jugé autrement, rétorqua Artus d'Authon d'un ton sans appel.

    Monge de Brineux avait à peine prononcé une phrase de tout leur repas dans la vaste salle de la taverne, badigeonnée de chaux fraîche afin de recouvrir les langues de suie noirâtre abandonnées par les torches. Au demeurant, il n'avait guère touché aux morceaux de civet de poule accompagnés d'une purée de févettes qu'on leur avait servis. En revanche, il avait avalé d'un trait quatre gobelets de vin, chose rare chez cet homme de sobriété. À mots couverts afin d'éviter les oreilles indiscrètes de la tenancière qui s'affairait autour d'eux, s'enquérant de leur satisfaction à grand renfort de courbettes, Artus d'Authon avait à nouveau

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