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Le combat des ombres

Le combat des ombres

Titel: Le combat des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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terminerais à pourrir dans les cages de cave si l'on m'entendait. De grâce, mentez, défendez-vous, monsieur. Pour la comtesse, pour votre fils. Le chevalier de Leone m'a un jour assuré que l'on ne se battait dignement que contre des ennemis dignes. Le contraire serait déraison. Ceux-là sont indignes. Je vous conduis à la salle attenante. Ils ne tarderont plus à vous venir quérir.
    1 Charcutiers. Ceux qui préparaient et vendaient tous les morceaux du porc.
    2 Riche corporation de marchands qui vendaient tous les tissus, les vêtements, les objets et même l'orfèvrerie aux classes les plus riches de la société. Ils prirent rang parmi les métiers les mieux considérés et rejoignirent bien vite la bourgeoisie.
    3 Bouteilles de terre, encore appelées « bouties ».
    4 À l'origine, petit garçon que l'on employait à faire des courses.
    5 Sorte de veste longue arrivant aux cuisses.
    6 Soie.
    7 Sorte de crêpe très épaisse. Le goût et la texture ressemblent à ceux du clafoutis.
    8 Contraction de « par le sang de Dieu », dont la forme initiale était jugée blasphématoire.
    9 Sorte de pourpoint lacé sur le côté.

Château d'Authon-du-Perche, Perche, septembre 1306
    Dos tourné à l'une des fenêtres de sa chambre, Agnès fixait messire Joseph. Il lui sembla qu'elle était encore plus pâle que la veille et le mauve de ses cernes avivait le beau regard gris bleu. Malgré la hardiesse de son maintien, il percevait la peur qui la rongeait depuis qu'elle avait découvert le sachet de toile noire cloué sous son lit.
    – Le vieil homme que je suis fut témoin de tant de choses surprenantes, madame. Soumises à l'analyse d'un esprit circonspect, nulle ne peut s'expliquer par l'intervention de pouvoirs maléfiques concédés à des créatures humaines. Il ne s'agit que d'un ramassis de superstitions. Elles se propagent à la vitesse d'un cheval au galop, aidées en cela par les mystères que la science n'a pas encore élucidés. Or, la science, comme le reste, est Dieu, quoi que tentent de faire accroire ceux qui la musellent parce qu'ils redoutent, à juste titre, qu'elle entame leur pouvoir. Un jour nous apprendrons ce qu'est l'orage, ce que sont au juste les éclipses. Un jour nous saurons lutter contre les maladies. Un jour, tant des impossibilités qui nous briment voleront en éclats grâce aux progrès de la science.
    – Pourtant, d'effroyables histoires courent… On ne compte plus les témoignages de ceux qui ont eu à pâtir des pratiques malfaisantes des sorciers, du moins lorsqu'ils n'en sont pas passés. L'Église condamne ces suppôts sataniques au bûcher… Or l'Église ne peut se méprendre si gravement.
    Joseph de Bologne la considéra un instant, retenant les paroles qui lui montaient aux lèvres : les sorciers, que tous redoutaient, rendaient un appréciable service à l'Église qui passait pour la seule capable de les défaire et de protéger ses ouailles. Joseph ne doutait ni de l'intelligence de la comtesse, ni de sa bienveillance à son égard. Pourtant, il était d'une autre foi, et la chasse aux juifs* n'avait que peu à envier à celle qui était faite aux sorciers et aux hérétiques. Grâce à l'hospitalité du comte, il avait cessé de craindre pour sa liberté et sa vie. Pour combien de temps, il l'ignorait. Il suffirait d'une ordonnance royale et la battue deviendrait cuirée 1 . Il se contenta d'un peu compromettant :
    – Certains de ces charlatans sont si persuadés de leurs… facultés, si j'ose le terme, qu'ils montent au bûcher sans même rechigner. Leur légende se propage alors dans les chaumières et chacun la ressasse, en exagérant les noires prouesses imaginaires de ces jeteurs de sorts.
    – N'ajoutez-vous donc nulle foi aux miracles, messire médecin ? demanda Agnès, ébranlée par le raisonnement du vieillard.
    – Certes si, madame. Mais les miracles sont Dieu, même lorsqu'Il leur choisit un véhicule humain. Dieu est toute-puissance et lorsqu'Il châtie, la punition qu'Il nous envoie porte Sa marque divine. Pas celle des hommes.
    – Vous me…
    Une violente douleur abdominale la plia. Elle dut se retenir à la tenture qui occultait la fenêtre à la nuit afin de ne pas choir au sol.
    – Madame…, s'affola messire Joseph en se précipitant vers elle. De grâce, je vous en conjure, permettez-moi de vous installer dans ce fauteuil.
    À petits pas, accrochée à son bras, Agnès le suivit. Luttant contre la nausée, elle ferma les

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