Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
suffisamment ingambes, se pressèrent sur l'estrade royale et prirent
place dans leurs imposantes chaires. Ap Ythel, ruisselant de sueur et jurant,
tentait de faire régner l'ordre et de repousser la foule pour que la reine
douairière, à bout de souffle, puisse s'asseoir près d'Isabelle. Gilbert de
Clare, comte de Gloucester, choisi comme maître de cérémonie, blasonné des
glorieuses couleurs de sa maison, entra à cheval dans la carrière. Pennons et
bannières furent déployés. La lice se vida. Gaveston, en armure complète, la
tête et le visage dissimulés par un heaume orné d'un renard bondissant au
cimier, pénétra au fond de l'espace en légère pente. Alexandre de Lisbonne,
vêtu de noir, casque démodé sur la tête, escorté de deux de ses compagnons,
arriva au petit galop. On appela les combattants au centre de la lice et de
Clare échangea quelques mots à voix basse avec eux. Le héraut annonça que la
joute se déroulerait avec des lances mouchetées et qu'après trois courses on en
viendrait à l'épée.
    Je ne me
souviens plus de tous les détails. Une belle journée printanière touchait
doucement à sa fin. Le soleil et l'ombre baignaient le champ de la joute ;
la tribune royale était comble, les spectateurs impatients, des nuages de
poussière montaient du sol, des marchands tentaient de tirer profit de l'occasion
en proposant des pichets et des seaux de vin ainsi que « la plus pure des
eaux de source ». Puis ce fut le silence, un silence chargé de menace.
Quand les adversaires eurent gagné les deux extrémités de la lice, les
trompettes sonnèrent. On haussa et on affala bannières et pennons. Gaveston, à
califourchon sur son destrier, resta immobile, comme sculpté dans la pierre.
Alexandre de Lisbonne dressa son écu et inclina sa lance de bas en haut,
semblant en éprouver le poids et l'aplomb. De Clare fit avancer sa monture
jusque devant le souverain de l'autre côté de la palissade. Ce dernier leva la
main. De Clare l'imita. Édouard abaissa la main. Les trompettes retentirent. De
Clare lâcha le pennon de soie rouge qui tomba sur le sol en voltigeant telle
une feuille. Les deux hommes, comme habités par une rage invisible, pressèrent
leurs montures. Ils étaient l'un et l'autre des cavaliers expérimentés. Les
chevaux passèrent du trot au galop, de plus en plus vite, labourant la terre de
leurs sabots. Les adversaires se heurtèrent dans un fracas de lances. Gaveston
chancela sur sa selle. La foule se mit debout d'un seul mouvement, mais le
favori recouvra l'équilibre. Ils se retrouvèrent face à face. On leur fournit
de nouvelles lances. Les écuyers s'activèrent pour vérifier sangles et harnais.
De Clare s'avança. Édouard leva derechef la main. Assise près de ma maîtresse
sur un tabouret, je regardai par-dessus le bord de la palissade décorée. Le
signal de soie rouge fut de nouveau lâché. La charge commença :
martèlement de sabots, craquement du cuir, bruit de tonnerre quand les deux
combattants brisèrent leur lance contre le bouclier de l'adversaire. Je scrutai
la foule en me demandant si Demontaigu était présent. Puis je jetai un coup
d'œil par-dessus la clôture. Gaveston avait ôté son heaume et s'aspergeait le
visage d'eau. Alexandre de Lisbonne faisait de même. Écuyers et pages se
glissèrent sous le garrot des montures pour s'assurer de l'état des courroies
des selles et des étriers. Le Portugais réclama un nouvel écu. De Clare se
tourna une fois encore vers le roi. Alexandre de Lisbonne s'avança, bouclier un
peu levé, lance couchée. Gaveston remit son heaume, saisit sa lance des mains
d'un écuyer, mais étonna ses compagnons en refusant le bouclier.
    — Le fol !
Le fol ! souffla Édouard.
    Le favori avait
décidé de montrer son courage en courant la troisième reprise sans écu. Son
rival semblait perplexe. Son cheval s'agitait, mais il le maîtrisa sans mal. Je
me remémorai les propos de Bertrand sur Alexandre : qu'il avait servi lors
des campagnes contre les Maures en Espagne et le long du Tage, dans son
Portugal natal. Gaveston paraissait indigné, ramassé sur lui-même, la tête en
avant comme si quelque chose d'outrageant était arrivé. De Clare, lui,
observait le souverain qui leva puis baissa la main. Le pennon de soie rouge se
posa doucement sur le sol. Alexandre chargea. Gaveston attendit quelques
fractions de seconde, puis piqua des deux lui aussi. Je regardais de tous mes
yeux. Que les saints m'en soient

Weitere Kostenlose Bücher