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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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la
scène au fur et à mesure que les souvenirs, aiguillonnés par le danger, me
reviendront en mémoire comme des flocons de neige dans une tempête. Ce fut un
magnifique et fastueux moment ! Gaveston, ivre de sa prouesse,
resplendissait dans ses habits de soie verte et blanche. Édouard riait et, dans
sa joie, tapait sur la table du plat de la main. Ap Ythel, la mine sombre,
déploya ses archers autour de la pièce, dans les galeries et les salles
voisines. Le capitaine gallois confia à Gaveston que l'on avait maintenant obvié
aux causes de la puanteur. Le favori s'exclama qu'il aimerait que d'autres
odeurs, plus fétides, puissent être expurgées avec autant de facilité. Une
myriade de valets servit le repas. Une longue suite de plats fut apportée des
cuisines royales en passant par un couloir sous la tribune des musiciens, à
l'autre bout de la grande pièce. Le groupe qui s'y trouvait tenta de jouer,
mais dut y renoncer en raison des cris et des éclats de rire du roi et de son
favori.
    Je me souviens
de certains plats : poule aux œufs et aux herbes, bœuf à la sauce
carmeline, veau bouilli aux épices, brochet fourré à l'avoine. Isabelle était
aux aguets et tendue, comme elle l'était toujours quand son époux buvait trop.
Si le roi pouvait se montrer généreux, il était aussi capricieux, pouvant
passer en un clin d'œil de la bonhomie à la cruauté la plus impitoyable. Quand
il annonça à haute voix qu'il espérait qu'elle était grosse, ma maîtresse eut
une moue de déplaisir. Mais rien n'arrêtait la reine douairière qui finit par
persuader Édouard de lui prêter l'oreille. Elle pria Gaveston et Guido de
changer de place afin que le favori puisse lui aussi savoir et approuver ce qui
s'était dit. Gaveston fit remarquer pour plaisanter qu'il était le Seigneur de
la Discorde et que ce n'était point le moment de donner des conseils. Enfin,
sur les instances de Marguerite et d'Isabelle, il se leva en chancelant, tout
en lampant son vin, et fit signe à Guido de venir occuper la haute chaire qu'il
quittait.
    Entre Agnès et
l'effort que je faisais pour écouter Marguerite, je ne savais où donner de la
tête. Je me remémore la scène comme si j'y étais. Guido avait pris sa coupe de
vin, bien qu'il eût peu bu pendant le repas. Je le revois clairement vidant
avec lenteur l'eau du verre de Venise que Gaveston avait laissé derrière lui.
    Le banquet
continuait. Édouard et Gaveston se raillaient de l'ire de Winchelsea et ne se
calmèrent que lorsque la reine douairière mentionna l'église du Nouveau Temple.
    Le monarque fit
la grimace mais acquiesça. Il donna une petite tape sur le bras de Gaveston et
observa qu'une telle concession était peut-être le prix à payer pour garder un
grand seigneur dans le camp du roi. Les chandelles se consumaient. De grosses
gouttes de cire s'étaient formées sur la dorure des supports. On laissa entrer
les chiens du roi afin qu'ils dévorent les reliefs. Les musiciens firent une
nouvelle tentative. Des valets s'activaient en tous sens pour débarrasser la
table. Il me tardait de pouvoir me retirer. Isabelle semblait lasse et avait
les yeux lourds de sommeil. La pièce était pleine d'ombres dansantes. Je
remarquai que Guido avait quitté sa place. J'étais sur le point de remplir
d'eau le verre de ma maîtresse quand Ap Ythel fit irruption dans la salle.
    — Sire...
commença-t-il en s'inclinant bien bas.
    Il se redressa,
essaya de reprendre haleine et tapa dans ses mains. Harpistes et luthistes
cessèrent de jouer. Édouard et Gaveston levèrent les yeux.
    — Sire...
    Quelque chose
dans sa mine et son ton me serra la gorge. Il me fit signe :
    — Dame
Mathilde, vous feriez bien de venir.
    — Que se
passe-t-il ? s'enquit le roi d'une voix de stentor.
    — Maître
Guido s'est pâmé dans les latrines !
    — Oh non,
non ! s'exclama la reine douairière en portant la main à sa bouche.
    — Ivre !
pouffa Gaveston.
    — Je ne
pense pas, messire. Il est malade. Il dit qu'il a peut-être été empoisonné.
    — Comment ?
demanda Agnès en écartant son gobelet de vin. Nous avons partagé les mêmes
pichets...
    Sa voix mourut
tandis qu'elle regardait la place où Guido avait été assis.
    — L'eau...
    Je repoussai ma
chaire.
    — Sire,
messeigneurs, maître Guido a besoin de moi. Je vous prie de ne boire ni manger
davantage.
    Isabelle
acquiesça de la tête. Le souverain bondit en criant que le manoir devait être
protégé. Je suivis Ap

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