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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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instant, pour Bamberg, il n'était plus de mystère. Un coalisé n'avait aucune raison de se lancer en une affaire si périlleuse quand les siens tenaient la berge, si bien que le cavalier ne pouvait venir que des lignes de l'armée royale.
    — Vite, lancez des cordes !
    On obéit immédiatement et le malheureux cavalier, les mains visiblement engourdies, attacha les cordes au pommeau de sa selle.
    Bamberg fut ému de ce cavalier si courageux tentant ce qu'aucun n'avait osé en quarante-cinq jours de siège et il espéra que l'homme, qui semblait frêle et fragile, parviendrait à tenir car qu'il perde pied à présent et se noie lui paraissait des plus injuste.
    Une dizaine de vigoureux soldats des Opérations Spéciales tirèrent sur les cordes et le cheval, brusquement soulagé, comprenant qu'on lui venait en aide, modifia aussitôt sa trajectoire pour nager en direction de ses sauveurs.
    Bientôt, la bête épuisée prit pied sur le sol boueux, y pataugea un instant, retrouva l'équilibre et, toujours tiré, gravit enfin le raidillon.
    C'est alors que Bamberg et tous les autres, officiers et soldats, éprouvèrent une surprise égale à celle qui eût été la leur en voyant le Grand Turc en personne : l'héroïque cavalier, ce soldat d'un courage exceptionnel... portait une robe!
    *
    Trempée jusqu'à la poitrine, Marion grelottait et claquait des dents. Autour du cou, deux pistolets reliés par une cordelette afin que la poudre ne fût point mouillée.
    Bamberg la tint aux épaules, si ému qu'il eut peine à trouver ses mots :

    — Marion, quelle folie que cela ! Vous êtes trempée, par ce froid de loup !
    Il la couvrit de sa cape rouge et d'autres dragons en firent autant.
    Elle articulait avec difficulté :
    — Méfiez-vous... Postes coalisés... s'étendent loin sur la berge... pas prendre pied trop tôt... attendre début attaque des coalisés... Pontecorvo... Mortefontaine... convaincu le roi...
    Elle frissonna de la tête aux pieds et fit un effort pour ne plus claquer des dents mais elle ne pouvait empêcher le débit haché de ses mots ni les phrases coupées, réduites à l'essentiel :
    - Attendre début attaque coalisés... Le... Le roi convaincu lancer aussitôt ba... barrage artillerie... Amène grande urgence pièces de partout... jeter trouble...
    — Marion il faut vous changer tout de suite !
    Elle parvint à sourire :
    — Inutile, j'y retourne... restez, c'est... prisonnière... part avec vous...
    À cet instant, des lignes coalisées et sur trois côtés, on entendit fifres, tambours et trompettes, signal du début de l'attaque ennemie. Mais ces codes, Bamberg les connaissait parfaitement : les instruments de musique servent, lors des batailles ordonnées, à remplacer les ordres de vive voix, ceux-ci se trouvant étouffés par les bruits de bataille et en réalité, chaque instrument selon qu'on en jouait correspondait à une phase de l'attaque.
    Les coalisés éprouveraient des difficultés avant d'atteindre les ruines de la ferme fortifiée car il leur faudrait franchir les lignes bouleversées, les épaves de la batterie d'artillerie hollandaise, les voitures pillées, les tranchées, les sapes et tous les pièges posés avec savoir-faire par les spécialistes des Opérations Spéciales.
    Bamberg fit signe qu'on lance une fusée verte d'un modèle très puissant, bien supérieur à celui des feux d'artifice.
    Peu après, une formidable explosion ravagea les ruines de la ferme et deux dragons, hors d'haleine, arrivèrent en courant : au signal, ils venaient de faire sauter les réserves de poudre, le dernier canon et tout le matériel qu'on ne pouvait emmener.

    Puis, le tir de l'artillerie royale française commença, ravageant des rangs entiers de l'infanterie des coalisés montant à l'assaut. Ce tir précis devait tout aux relèvements soigneux effectués par Bamberg et envoyés grâce au dernier pigeon voyageur.
    — Mettez les chevaux à l'eau!
    Il se tourna vers Marion, enveloppée dans plusieurs capes rouges de dragons :
    — Nos derniers chevaux serviront à tirer les blessés et certains gardes-françaises qui ne savent pas nager.
    — Alors prenez le mien... Je sais fort bien nager.
    Bamberg eut un haut-le-corps :
    — C'est hors de question.
    Le ton était tel que la jeune femme n'insista pas.
    Chaque cheval, harnaché autour de l'encolure de rênes et de longes de ceux morts durant le siège, parvenait à tirer jusqu'à trois hommes attachés par ce même lien sous les

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