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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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poursuivre mais de sorte qu'il apparaisse bien qu'on le poussât à cela alors qu'en la vérité des choses, c'est lui et lui seul qui provoquait cette relance :
    — Cependant...
    Le roi, vivement intéressé, retourna aussitôt le mot sur le mode interrogatif :
    — Cependant?
    — J'ai pris la liberté, Votre Majesté, de faire parler un des survivants.
    — Excellente initiative ! répondit le roi qui, du geste, l'incita à poursuivre.
    — Sire, bien que transi, l'homme est bavard. Il m'a affirmé que bien souvent, lorsqu'ils font sauter des dépôts de poudre ou de vivres, le général-duc de Bamberg est le dernier à quitter les lieux. Il pense que cette fois encore, il en sera ainsi. La dernière image qu'il ait de lui est celle d'un uniforme en lambeaux et taché de sang, les traits tirés par une fatigue extrême, le visage et les mains noirs de poudre et de poussière, une balafre de la tempe au menton et, malgré le froid, la sueur traçant un sillon sur le front tant il s'activait d'un groupe à l'autre.
    Le roi aimait cette description : elle ravissait le soldat qui demeurait en lui.
    — Votre nom, capitaine ?
    — Hiérosme de La Pommière, Majesté.
    Ne s'arrêtant point à l'étrangeté de ce prénom peu commun, le roi adressa un signe de tête à un secrétaire qui en prit note aussitôt mais déjà, un très jeune lieutenant porteur de nouvelles arrivait.
    Allant au plus court, le roi ordonna :
    — Parlez!
    — Sire, il arrive d'autres survivants dans le plus grand désordre.
    — Combien?
    — Dix-neuf, dont des blessés. Ingénieusement, les dragons ont fait traîner les blessés par les chevaux encore vivants, et tous bons nageurs. Parmi ces chevaux, on a reconnu Hautain, celui du général.
    Le roi effectua un rapide calcul : 42 hommes. D'un point de vue militaire ce chiffre, qu'il souhaitait encore provisoire, constituait déjà une victoire. Côté français, on avait appris par un déserteur bavarois désireux de monnayer ses renseignements que 7 500 hommes s'étaient lancés à l'assaut de la ferme fortifiée.
    Le roi, exultant, esquissa ce qui ressemblait à un pas de danse puis, joignant les mains en un geste de ravissement :
    — Messieurs, quelle victoire ! 7 500 hommes leur donnent l'assaut de tous côtés et ma centaine de dragons réussit son repli en bon ordre !
    Puis il remarqua que le lieutenant se tenait toujours devant lui, raide, faisant tourner entre ses mains son chapeau à plumes. Fronçant le sourcil, le souverain demanda d'un ton sec :
    — Quoi, vous n'en aviez pas achevé, lieutenant ?
    — Encore deux nouvelles, Majesté.
    — Sont-elles bonnes ? questionna Louis le Quatorzième.
    — L'une ne l'est point trop, Majesté.
    — Alors commencez par celle-là.
    Le lieutenant n'hésita pas un instant :
    — Sire, les coalisés ont dû s'apercevoir de quelque chose car on remarque que leurs postes avancés font tirer dans l'eau.
    — Quoi d'autre ?
    — Ce que voyant, le général-baron de Bonnefous, qui commande l'ensemble des postes de repêchage installés au bord de la rivière, a pris sur lui de faire allumer de nombreux feux car ainsi, aucun survivant ne restera sans secours alors que nous n'avons plus à craindre de donner l'alerte aux coalisés.
    — Excellente initiative, c'est pensé avec intelligence! répondit le roi en faisant signe au secrétaire de noter le nom de ce général.
    Un capitaine de mousquetaires barbu, ayant perdu son chapeau et la main droite percée d'une balle, entra à son tour.

    — Allons, parlez !
    — Sire, le maréchal de camp, monsieur de Lagès-Montry, envoyé par la terre pour secourir les assiégés, se trouve encerclé avec une vingtaine de ses hommes.
    — Et alors, que ne le dégage-t-on par une action de cavalerie ?
    — C'est qu'on ne sait exactement où ils se trouvent, Majesté, lui et sa vingtaine de mousquetaires ne cessant de rompre l'encerclement pour se trouver de nouveau entourés.
    Le roi fut un instant attristé mais au fond, ce qui dominait en lui s'apparentait à un grand bonheur : toutes ces actions, ces nouvelles, ces officiers intelligents, ces hauts faits, cette fidélité, ce courage, cela lui semblait la vie même car le mouvement est le seul contre-feu à l'ennui.
    Et à la mort...

51.
    Bien qu'il fût blessé, une balle espagnole l'ayant atteint à l'épaule, Charles de Lagès-Montry faisait preuve de beaucoup d'intelligence pour échapper à ses poursuivants. Son instinct ne le trompait guère et les

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