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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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chute du jour. Il savourait l'idée de quitter cet endroit où ses hommes et lui-même avaient tant souffert. D'ici quelques heures, c'en serait achevé et il se trouverait mort ou dans le camp royal.
    Il avait revu chaque détail, se savait attendu par Villeroi et avait même choisi les mots de passe.
    Il fut très surpris en voyant arriver un pigeon à tire d'ailes en les dernières lueurs du jour. D'autant plus étonné, au reste, qu'il reconnaissait parfaitement un de ses oiseaux donné pour mort ou disparu un mois plus tôt.
    Il se leva tandis que le caporal Piloselle, radieux, lui amenait le pigeon :
    — Il est revenu, monsieur le général. Et bagué !
    — Je vois cela, Piloselle. Pouvez-vous me donner le message ?
    Tandis que le caporal ôtait la bague, son chef le regardait avec bienveillance. Le pauvre garçon ne s'appelait point ainsi mais il était très blond et très poilu or, ainsi qu'on se souvient sans doute, la piloselle est une plante à fleurs jaunes couvertes de poils : il ne fallait point chercher ailleurs l'origine d'un surnom que l'intéressé acceptait avec bonne humeur.
    Le caporal tendit au général le petit rouleau de papier et Bamberg lui lança :
    — Excellent travail, Piloselle, excellent. Voyez-vous, vos pigeonnes ne vous peuvent point quitter durablement. Bon présage !
    — Mais mes femmes ne me quittent point non plus, monsieur le général. Pensez, un dragon !
    — Bien entendu, Piloselle.
    Le caporal s'éloigna sous le regard perplexe de Bamberg. Il courait le bruit, à l'escadron, que Piloselle était si gentil avec les dames, si bouleversé à l'idée de leur faire verser une larme, qu'il ne refusait jamais de les épouser, se trouvant plusieurs fois marié en les régions de France et même en terre étrangère.
    Bamberg déroula le petit papier et lut ceci :
    Vous serez attaqué à minuit par 7 500 hommes.
    Pas de prisonniers. Levez le camp!
    L'honneur est une patrie, et l'on peut en être
    quel que soit son pays. Un ami espagnol.
    Bamberg identifia immédiatement son informateur. D'après un prisonnier, celui qui le priait de se rendre chaque soir, un lieutenant-colonel, avait nom Novalmorales. Éprouvant un vif sentiment de reconnaissance devant tant de noblesse il se jura, si les caprices de la vie lui en laissaient l'occasion, de le lui exprimer de vive voix sitôt la guerre achevée.
    Puis il réfléchit. Ainsi, peut-être aussi lassés en face qu'il l'était lui-même, ils allaient attaquer alors même qu'il quittait le camp. Fallait-il précipiter le départ ou utiliser les circonstances ?
    Il décida d'appeler Hugo, Clément et quelques officiers pour connaître leur sentiment.
    ***
    Le général-comte de Lagès-Montry, seul en sa tente, la tête dans les mains, réfléchissait.
    Villeroi venait de lui demander de s'en aller avec 300 de ses mousquetaires au-devant... du duc de Bamberg!
    Un homme qu'il haïssait. Et comment l'oublier, celui-là, alors que ses blessures à peine cicatrisées le faisaient encore souffrir?
    Il murmura d'une voix défaite :
    — Mon dieu, tous les termes de ce problème sont pareillement insatisfaisants!
    Quoi, se venger, faire en sorte de ne point trouver le général et ses dragons qui allaient tenter désespérément de briser le cercle de fer et de feu qui les entourait? L'honneur l'interdisait : Bamberg était français, et officier de l'armée royale où il servait lui-même.
    Et quoi, encore, secourir celui qui l'avait humilié, subir peut-être son regard ironique ? Il y avait là de la grandeur, mais quel chemin de croix !
    Il songea alors qu'il lui restait encore deux heures pour trouver une solution...
    *

    Le roi, arrivé au camp une demi-heure plus tôt, était littéralement ivre de rage.
    En face de lui, un général des gardes-françaises, livide, le regardait avec respect et crainte. Dans un coin de la tente, assis sur un tambour, le futur maréchal de Villeroi se tenait recroquevillé comme un petit vieillard.
    Louis le Quatorzième, qui cherchait en vain à se calmer, jeta:
    — Quarante-cinq jours!... Quarante-cinq jours que le plus vaillant de mes généraux est encerclé en une vieille ferme et soutient un siège des plus sévères. Quarante-cinq jours que ces malheureux héros sont encerclés, comme je viens de l'apprendre alors qu'on m'en avait menti. Bamberg a exécuté une manoeuvre exceptionnelle dont le mérite fut usurpé par un autre...
    Il jeta un regard lourd à Villeroi, prostré, puis, s'adressant au

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