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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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coalisés qui lui donnaient la chasse, perdant patience, en arrivaient à commettre faute sur faute, ce qui facilitait les tentatives du général français pour rompre l'encerclement.
    Malheureusement, à chaque confrontation au hasard des hautes futaies, Lagès-Montry perdait des mousquetaires, tués ou blessés et en ce cas, aussitôt capturés.
    Des lignes françaises, on continuait à tirer des fusées vertes, signe de ralliement des troupes du royaume des lys pour la durée de la nuit.
    Mais si, de cette façon, Lagès-Montry voyait bien en quelle direction il fallait s'orienter, les nombreux pelotons de coalisés le voyaient aussi et lui barraient de nouveau la route.

    La situation lui sembla brusquement sans issue mais, de même qu'il n'envisageait pas un instant de se rendre, il ne voulait pas s'abandonner au découragement. Il devait persister, tenter à tout prix une percée et gagner les lignes françaises. Il suffisait de quoi ? Une faille, une simple faille dans le dispositif et aussitôt s'y engouffrer.
    Au fur et à mesure que le temps passait, le général des mousquetaires, curieux du phénomène et au fond spectateur de lui-même, voyait de nouveau sa conscience s'affronter en deux termes ennemis. Ainsi, il ne pouvait s'empêcher de songer que s'il se trouvait en cette situation, blessé, encerclé, il le devait, certes indirectement, à Bamberg qu'il détestait. Mais d'un autre côté, exposer sa vie pour sauver un ennemi, n'est-ce pas chevaleresque? Incertain, il se demanda si le duc de Bamberg était parvenu à s'en tirer mais il en doutait. La guerre des Flandres était une guerre dure et son ennemi devait déjà commencer à pourrir en cette terre, lui, ses redoutables dragons et sa folle légende.
    Au même instant, il tomba presque nez à nez avec un parti de cavalerie autrichienne. D'un tir très précis au pistolet, il tua l'officier qui se trouvait en tête du détachement, le regarda vider les étriers et tomber lourdement à terre puis, à l'adresse de ses mousquetaires, il hurla :
    — Dispersion ! Chacun pour soi vers les lignes françaises et vive le roi !
    *

    Le soldat Louis Lafaille, vingt ans, regardait la nuit, baïonnette au canon. S'il montait la garde avec vigilance, en ce secteur tranquille, il n'empêchait pourtant pas son esprit de vagabonder. Bien que glacée, la nuit s'y prêtait, car tout lui semblait merveilleux : là-bas, les milliers de torches des coalisés montant vers le plateau où se trouvait la ferme fortifiée des dragons hélas promis à la mort, les fusées vertes qui éclairaient le ciel de suie et, plus beau que tout, tant cela dégageait une impression de puissance, les flammes sortant de la bouche des canons français alors que les batteries faisaient feu toutes ensemble.
    Soldat d'infanterie d'un régiment de Meaux, Lafaille songea à cette ville dont il était originaire. Et à ses jeunes filles, celles, en tout cas, qu'il courtisait : Catherine, Marie-Anne, Charlotte. Mais tout aussitôt, il entrevit le visage de Jacques, son meilleur - vraiment ? - ami, rôtisseur de son état et demeuré à Meaux.
    Comme elles.
    — Ah, le sale cochon ! murmura-t-il.
    Non sans amertume, le soldat Lafaille se persuada qu'avec les femmes, les partants ont toujours tort et ceux qui demeurent, toujours raison. Eh oui, se disait-il, on s'en va chercher la gloire et peut-être la fortune, on s'expose à se faire tuer ou à revenir manchot et pendant ce temps-là, des... rôtisseurs débitent leurs niaiseries à des belles assez stupides pour les écouter, oublieuses qu'elles sont des héros partis défendre le roi et le royaume des lys!
    Brusquement, il sursauta. Non, ce n'était pas possible, pas en ce poste secondaire sans intérêt...
    Mais la voix répéta :
    — Magicien!
    C'était le mot de passe. Sans réfléchir, Lafaille répondit par le mot de ralliement :
    — Mélusine!
    La voix venait de derrière un sapin. Méfiante, elle commanda :
    — Va chercher ton officier.
    Ce fut inutile. Le capitaine, qui écrivait à sa fiancée sur un tambour renversé, sursauta en entendant l'échange « Magicien-Mélusine » et fut là en quelques foulées.
    Ce qu'il vit alors, tout comme le soldat Lafaille, ni l'un ni l'autre ne devaient l'oublier leur vie durant.
    Saignant du front, une balafre lui barrant un côté du visage, l'homme n'était rien moins que général des dragons, l'uniforme en lambeaux, la poitrine couverte des plus hautes décorations avec, au côté, ce

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