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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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décomposé leur coulait sur l'uniforme en une insupportable odeur.
    Pour Bamberg, c'était cela, la guerre...
    Le voyant soudain si triste, elle allait lui prendre la main, ce qui eût été décisif pour l'avenir de leur relation. Malheureusement, c'est l'instant que choisit la veuve Galland pour apparaître :
    — Êtes-vous satisfaits ?
    Marion de Neuville remarqua avec quelle vitesse le duc chassait ses noirs souvenirs pour se montrer souriant, disponible, et elle trouva en cela, qui est d'être attentif aux autres, une élégance aristocratique, une politesse royale.
    Il répondit :
    — Pardieu, je serais bien ingrat si je n'étais point satisfait et très reconnaissant.
    — J'ai trouvé ce souper magnifique ! dit pour sa part la baronne.
    En fait, la question s'était adressée au couple même si la veuve Galland n'avait pas quitté le duc des yeux en s'enquerrant de leur plaisir. Mais il y avait là, si l'on y mettait une pincée de malice, quelque chose de répréhensible en la manière de Bamberg, et Marion ne put résister au plaisir d'embarrasser l'homme qu'elle aimait car elle dit ingénument :
    — Devais-je répondre aussi?
    Comme elle l'avait escompté il rougit, se leva, claqua des talons et salua en s'inclinant légèrement, avec raideur :
    — Je suis terriblement désolé, j'ai été fort impoli.
    Assise les coudes sur la table et les mains jointes devant la bouche pour dissimuler son sourire, la jeune femme avoua :
    — La faute est sans gravité et l'on s'adressait à vous... Je fus bien vilaine de vous faire croire le contraire mais j'ai remarqué qu'avec les femmes, pour vous présenter ou lorsque vous êtes dans l'embarras, vous réagissez toujours pareillement : claquement de talons, tête baissée, raideur de tout le corps. J'avais envie de vous le voir faire.
    La veuve Galland, qui adorait elle aussi cette manière étrange du duc, échangea un regard de complicité avec la baronne tandis que Bamberg, perdu, presque à la dérive, tentait d'expliquer :
    — Eh bien... N'est-ce pas... Je crois... Au début du siècle, c'était un usage chez les officiers de cavalerie... Mon grand-père, déjà, à ce qu'on m'a dit... J'ai été élevé par une vieille femme qui l'avait vu agir ainsi, comme mon père... Je crois que je ne connais pas d'autre manière.
    Marion lui sourit :
    — Je ne devrais pas vous le dire mais cette manière, j'en suis folle !
    Il se rassit sous le regard ému des deux femmes et se montra très habile dans la façon de surmonter cet instant où il apparut si vulnérable. En effet, s'adressant à la veuve Galland :
    — Le beurre venait de Rennes, n'est-ce pas ?
    Surprise, et plutôt agréablement, elle approuva.
    Il poursuivit :
    — L'ail et les petits oignons venaient de Roscoff?
    — Ah ça, en effet! Mais...
    — Asperges de l'archipel des Glénan, bien entendu ?
    — Bien entendu !
    — Et cerises confites de Taupont?
    — Certainement!... Ah ça, monsieur le général, vous savez tout de la cuisine lorsqu'on la veut raffinée !
    Il rit:
    — Allons, je ne vais point usurper une gloire qui n'est pas mienne. En guerre, dans le froid, quand nous étions bien heureux de manger un bout de pain de seigle frotté au lard, feu votre époux, qui songeait déjà à cette auberge, nous citait tout cela que je viens de vous dire étant moi-même, en l'art de la cuisine, un ignorant.
    On parla quelques instants du défunt capitaine puis le couple demeura à nouveau seul. En la cheminée, il ne demeurait que des braises et approchait l'instant tant redouté, de part et d'autre, où ils devraient se lever afin que Bamberg raccompagne la baronne à Auteuil.
    Lorsqu'ils quittèrent l'endroit, il ne restait que de rares clients...
    *

    Augustin de Nestoc songea qu'avec le brouillard, l'occasion de tuer le général s'avérait propice. Mais quelque chose le retint.
    Surpris, il s'avoua que cet homme, il le craignait et le Feu Follet, en son habituelle prudence, décida de l'étudier encore avant que de l'occire.

33.
    Juste après le bois de la Grotte aux Fées, en L'Auberge du Pont rouge, Von Ploetzen se trouvait en sa vaste chambre entouré d'Hofflingen et de trois gentilshommes de Prusse. Ils s'exprimaient en allemand.
    Pris de saignements et d'humeurs jaunâtres, ses yeux le faisaient souffrir et le voyage s'annonçait plus pénible qu'il ne l'avait escompté.
    Assis devant une petite table, tournant le dos aux autres, il changea lui-même le voile de gaze qui recouvrait son

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