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Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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n'échappa point au regard pourtant abîmé du Grand Maître des Teutoniques. Celui-ci songea que ce cavalier avait du style et y devina une éducation des militaires.
    Hofflingen, soucieux, approcha son cheval :
    — Votre Seigneurie désire-t-elle que j'envoie des cavaliers à sa poursuite ?
    — Inutile, son avance est grande, sa monte excellente et son cheval trop rapide. Ne vous inquiétez pas, Hofflingen, prévenus un peu plus tôt ou un peu plus tard, cela ne changera rien au sort des villageois.
    — Certainement, Votre Seigneurie.
    L'aristocrate prussien détourna la tête pour échapper au soleil de midi. Ici, il avait dû neiger puis très tôt, des pluies violentes délayèrent sans doute les flocons et un fort vent du nord-est, chassant les nuages, séchait déjà l'herbe des prairies mouillées. Cependant, sous les sabots de son cheval, Von Ploetzen sentait un sol dur comme la pierre, encore gelé, ce qui expliquait les nombreuses flaques que le sol ne pouvait absorber.
    On entendit bientôt le tocsin et la population, presque comme un seul homme, se rua vers le château. Ajustant sa longue-vue, le Grand Maître des Teutoniques constata avec dépit la présence d'une dizaine de tuniques rouges : des dragons.
    Il lança un affreux juron en langue allemande mais, y regardant mieux, il nota avec satisfaction que ces dragons-là n'étaient point trop à craindre. En effet, certains marchaient avec des béquilles, d'autres se trouvaient unijambistes, manchots ou très âgés. Il devina aussitôt que Bamberg, en son village de Montigny, devait donner asile à ses amputés et ses vieux soldats.
    — Cela lui ressemble ! murmura-t-il, sans qu'on puisse y relever la moindre marque d'hostilité et plutôt une réelle admiration.
    Il s'était immobilisé avec sa vingtaine d'hommes au sommet d'une petite colline et considérait avec froideur la fuite des populations.
    Certains emportaient des vivres, celui-là des terrines de suif pour éclairer les pièces obscures, tel autre des chandeliers de cristal ou un grand miroir en pied reliquat, sans doute, d'anciennes campagnes. Deux vieux dragons portaient même un berceau de joncs tressés où, mais on y distinguait mal, ils avaient semble-t-il entassé des uniformes rouges. Bref, des scènes de panique comme il en avait tant vu lorsqu'il était militaire.
    Bientôt, les portes du château se fermèrent tandis que les créneaux se peuplaient d'hommes, dont des tuniques rouges, et de femmes armés de mousquetons de cavalerie, de fusils à silex et de mousquets.

    D'un jugement rapide et sûr, Von Ploetzen estima que la forteresse n'était point attaquable :
    — Hofflingen, cinq hommes sur le chemin d'accès du château, hors de portée du tir des défenseurs mais interdisant à tout retardataire de trouver refuge derrière les remparts.
    — Parfaitement, Votre Seigneurie ! cria l'ancien lieutenant, à la prussienne, répercutant aussitôt les ordres d'une voix retentissante.
    Imperturbable, Von Ploetzen continua à inspecter les alentours. C'est ainsi qu'il vit quatre des siens, partis bien avant l'aube, qui ramenaient de la ville deux prisonniers attachés derrière la queue de leurs chevaux.
    À Hofflingen, il lança d'une voix joyeuse :
    — La fête commence !
    Puis, après un bref regard à son second qui ne semblait pas partager sa joie, il précisa :
    — Ne vous inquiétez pas de la population, Hofflingen. Nous en trouverons dans les champs ou cachés dans les maisons : on en retrouve toujours !
    — Certainement, Votre Seigneurie !
    *

    Bamberg allait en tête, l'air sombre.
    Derrière lui venaient ses amis Hugo et Clément ainsi que cinq dragons, parmi les meilleurs des Opérations Spéciales.
    Le jeune général repensait sans cesse aux événements de la nuit et c'est peu dire qu'il en rougissait de honte. Ah, comme il eût aimé qu'on puisse revenir en arrière dans le temps pour infléchir tout autrement les choses. La honte!... C'était là une impression nouvelle qu'il ne connaissait point jusqu'ici et qu'il jugeait un des sentiments les plus atroces qui soient. Surtout lorsque cette honte vient de vous-même car pour les autres, la quasi-totalité des hommes, ce qu'il avait fait, ou laissé faire cette nuit, eût plutôt engendré une grande fierté.
    Combien il eût préféré recevoir un coup de sabre !
    Il revit, pour la vingtième fois, le fil des événements.
    Ainsi donc, il arrivait en sa chambre lorsque, poussant la porte, il se trouva devant

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