Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Conseil des Troubles

Le Conseil des Troubles

Titel: Le Conseil des Troubles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
Vom Netzwerk:
souvent le cas.
    Il allait répondre lorsque la veuve de feu le capitaine Galland vint leur annoncer que la table était dressée.
    *

    On les avait donc installés près de la cheminée où se consumaient de grosses et odoriférantes bûches de poirier. Deux valets avaient installé une chicane de hautes plantes en pot qui les protégeait des regards.
    Enfin, on avait sorti une bien belle vaisselle de porcelaine, des verres de cristal et des couverts d'argent tandis qu'un homme qui boitait bas leur servait du vin de Champagne.
    Bamberg, sans se gêner, dévisagea le domestique avec un air soucieux puis son visage s'éclaira et il se leva, main tendue :
    — Mathet!... Ah, c'est bien toi, vieux mousquet!... Comme je suis heureux de te revoir!
    Manquant lâcher sa bouteille de champagne l'homme, visiblement comblé d'avoir été reconnu et d'être l'objet d'une manifestation si amicale, balbutia :
    — Ah, monsieur le général!... Vous m'avez donc reconnu !
    — Mais comment t'oublier?
    — Ah, c'est trop d'honneur que vous me faites, monsieur le général, je n'étais qu'un modeste dragon qui ne se fit point trop remarquer par des actions d'éclat...
    — Et cette fois où tu arrachas un drapeau à trois Hollandais lors de cette échauffourée au carrefour du cercueil?
    — Mais certainement !... Et vous vous en souvenez !
    — Lorsqu'on a l'honneur et le bonheur de commander des hommes tels que toi, il ne s'agit plus de la mémoire de l'esprit mais de celle du coeur qui est bien plus fidèle.
    Marion regardait tout cela sans pouvoir masquer un sourire tant elle aimait la sincérité et surtout le naturel avec lesquels le général, par ailleurs duc, abolissait la distance le séparant de ses anciens soldats.
    Lorsque Mathet se fut retiré, elle remarqua :
    — Ma mère me parlait beaucoup de mon père mais il semble qu'aux mousquetaires, on n'avait point des relations si fortes que celles que vous entretenez avec les vôtres. Serait-ce propre aux dragons ?
    Il réfléchit un instant :
    — C'est plutôt la marque de ceux des Opérations Spéciales, mon escadron.
    — Je suis bien ignorante mais qu'est-ce qu'un escadron ?
    Il sourit :
    — D'après le règlement selon M de Turenne écrit en 1654, un escadron comprend deux compagnies de quarante-six « maîtres » chacune, les maîtres étant des cavaliers du rang issus de la noblesse. Mais dans ma troupe, ils sont plutôt l'exception.
    — Vous seriez donc presque cent par escadron... Mais d'où vient qu'on vous appelle des dragons ?
    — On dit que cela remonte au milieu du siècle passé, à la bataille de Cérisoles, au Piémont, en 1544, où des arquebusiers avaient été pris en croupe par des cavaliers. Poursuivant l'ennemi, ils mettaient parfois pied à terre pour le prendre sous leur feu. Le maréchal de Brissac, enchanté de cet effet d'hommes combattant autant à pied qu'à cheval, créa plusieurs compagnies qui s'appelèrent d'eux-mêmes des dragons. Car dans les légendes, le dragon se déplace en extrême rapidité tout en lançant des flammes.
    — C'est très joli. C'est là votre façon de faire la guerre?
    Bamberg haussa à demi les épaules :
    — Le devoir des dragons est d'éclairer la marche de l'armée en la précédant et en essuyant les premiers feux et de couvrir les retraites, si bien qu'ils combattent toujours. Dans l'armée, pour ces raisons, on appelle les dragons « les enfants perdus ».
    — Et vous, êtes-vous perdu ?
    Il soutint son regard :
    — Cela m'arrive...

32.
    Rue Mont-Marthe, le brouillard glacé n'avait point cédé un pouce de terrain, tout au contraire.
    Un quart d'heure plus tôt, un homme portant une balafre sur la joue gauche s'était présenté devant l'entrée de l'auberge Aux Dragons du Maine.
    Il n'avait pas jeté un regard à l'homme adossé près de l'entrée et qui fumait paisiblement une pipe de terre. En retour, le fumeur avait semble-t-il ignoré le balafré qui poussait la porte.
    Puis ce fut le tour d'un homme de petite taille aux cheveux très noirs et, bien que rasé du jour, sa barbe sombre poussait déjà. Regardant ses pieds, comme s'il craignait de trébucher sur quelque obstacle dissimulé, il n'aperçut point l'homme à la pipe pourtant tout proche.
    Celui-ci, adossé au mur en une attitude nonchalante, scrutait le brouillard ainsi que s'il cherchait à y déchiffrer quelque lourd mystère. Il ne regarda donc point le petit noiraud qui s'engouffrait Aux Dragons du Maine.
    Avec des gestes lents,

Weitere Kostenlose Bücher