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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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midi.
    Marie-Ange comprit que sa sœur avait une
destination bien précise en tête. Si elle n’en parlait pas, c’est qu’elle était
incertaine de l’issue de son déplacement.
    – Penses-tu te retrouver ?
    – Si je me perds, j’vas crier. Quelqu’un
va m’aider.
    – J’espère, parce que oublie pas
qu’après-demain, Paul, mononcle Ovide, Rose pis son amie Sarah viennent souper.
Si tu te perds, essaie de crier assez vite. Pis à part ça, tu as juste à
téléphoner ici. Georges va te dire ton chemin.
    Blanche mit du temps à coiffer ses cheveux
trop fins et bouclés. Elle osa se farder un peu, essuyant son rouge à lèvres
pour n’en laisser qu’une empreinte. Elle repassa sa robe et enfila des souliers
encore étroits de leur nouveauté.
    Elle sortit, décidant, une fois à l’extérieur,
de marcher quelques coins de rue pour sentir la ville et ses odeurs d’entrepôts
et en entendre les vibrations. Elle attendit le tramway, préparant à l’avance
le coût du passage, et regarda les gens qui faisaient la queue devant elle.
Quelques minutes plus tard, il y en avait plusieurs d’agglutinés derrière elle
et elle déduit, de leur allure et de leurs propos, qu’ils étaient débardeurs.
Elle pinça les lèvres, espérant qu’aucun ne lui adresserait la parole.
    Le tramway fit entendre sa cloche et Blanche
monta à bord. Elle accepta timidement la correspondance que lui présentait le
chauffeur, la roula et la mit dans sa poche, sachant qu’elle ne lui serait
d’aucune utilité. Elle se chercha une place des yeux et se dirigea vers celle
qui était à côté d’une fenêtre. Elle s’y assit en souriant du plaisir qu’elle
aurait à regarder la vie autour d’elle.
    Elle descendit au coin de la rue Saint-Denis.
Maintenant qu’elle touchait de près à son rêve caressé depuis des années, elle
avait le cœur battant comme une grosse caisse.
    Elle entra dans l’édifice, s’informant au
premier venu de l’endroit qu’elle cherchait. On la dirigea poliment. Elle
arriva devant le secrétariat et inspira profondément. Une dame, bien cachée
derrière des verres épais, l’accueillit avec le sourire crispé caractéristique
des gens appelés à travailler trop souvent avec le public.
    – On peut vous aider, mademoiselle ?
    – Oui, madame.
    Blanche regarda l’annulaire gauche de la dame
et sourit intérieurement.
    – J’aimerais savoir où et comment
m’inscrire à la faculté de médecine. J’ai apporté mes diplômes.
    Elle sortit une enveloppe bien ficelée de son
sac à main et la déposa sur le comptoir. Elle leva les yeux et regarda la femme
pour voir l’étonnement se dessiner sur son visage. Elle leva la tête, question
de hausser ses cinq pieds deux pouces au niveau de la taille élancée et
filiforme de la dame. Elle essaya de cacher son embarras.
    La dame la regarda par-dessus ses lunettes, lui
indiqua une chaise et la pria d’attendre. Elle tourna les talons et pénétra
dans un bureau après avoir frappé trois petits coups discrets à la porte et
souri à Blanche une dernière fois, l’air embarrassé. Elle revint presque
aussitôt et demanda à Blanche de la suivre. Blanche, à son tour, entra dans le
bureau. Un homme joufflu et rubicond, l’air jeune malgré les années qu’il
accusait autour des yeux, l’invita à s’asseoir. Elle le fit, se tenant le dos droit, essayant de comprendre les raisons de
l’émoi qu’elle semblait avoir soulevé.
    – M lle  Pinchaud me dit
que vous voul ez vous inscrire à la faculté de
médecine ?
    – Oui, monsieur.
    – Avez-vous terminé un baccalauréat ès
sciences ?
    – Non, monsieur, mais j’ai ici tous mes
diplômes.
    – Le baccalauréat ès sciences est
malheureusement la condition préalable.
    L’homme avait perdu son air jovial quelque
part sur son pupitre. Il soupira, se passa un doigt dans le cou, écrasé entre
son faux col et la graisse de sa peau.
    – Quel âge avez-vous, mademoiselle
Pronovost ?
    – Vingt et un ans.
    Il se colla la langue sur une canine, faisant
un bruit désagréable.
    – La médecine nécessite plusieurs années
d’études qui coûtent cher à l’étudiant de même qu’à notre institution. Nous
avons eu quelques jeunes filles qui se sont inscrites mais une seule est encore
avec nous. Elle devrait terminer l’année prochaine. Marthe Pellan a dû
sacrifier bien des choses pour poursuivre sa médecine.
    – Je suis prête, monsieur, à étudier pour
obtenir un

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