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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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exemple, allaient représenter l’hôpital
au kiosque de la grande kermesse annuelle aux locaux des fusiliers du
Mont-Royal et aussi pour les grandes soirées de gala ou les bals donnés au
Ritz. Blanche savait que Germaine ne la portait pas dans son cœur. Elle savait
aussi que ce qui agaçait Germaine, c’était l’énergie qu’elle mettait à réussir.
    Depuis son arrivée à l’hôpital, Blanche
s’était raffermie dans sa décision de ne plus revivre ce qu’elle avait déjà
vécu : la pauvreté. Chaque fois qu’elle rencontrait des patients vivant de
charité, elle se demandait, tout en connaissant la réponse, si ses parents
auraient été hospitalisés dans une des salles communes. Elle reniflait alors
l’éther qui sentait trop fort le souvenir de leur dénuement au lieu d’en
apprécier les effluves. Depuis le début de son cours, elle avait la hantise de
ne pas être acceptée comme étudiante. Dans un mois, elle aurait sa réponse.
Elle s’était promis que, si elle était acceptée, elle s’empresserait d’aller au
studio Allard de l’avenue du Mont-Royal faire prendre une photo d’elle-même
avec sa toute nouvelle coiffe, photo qu’elle expédierait aussitôt à Saint-Tite.
D’être en uniforme sans la coiffe la distinguait dans ce milieu et elle n’avait
de hâte que de s’y fondre.
    Elle savait que sa mère n’aurait pas tellement
prisé ses pensées. Sa mère avait toujours détesté « être comme tout le
monde » et les avait tous élevés pour qu’ils soient comme elle. Sa mère ne
pouvait donc comprendre l’ambition maladive qu’elle avait de ne plus vouloir se
distinguer. Elle se taisait, parfois contre tout bon sens, pour ne pas afficher
sa pensée. Marie-Louise était la seule qui la jugeait assez justement, ayant
deviné son ambition débordante.
    Blanche aimait tellement ce milieu qu’elle
avait décidé de réussir en tout, même si cela froissait les Germaine Larivière.
En cela, elle était la fille de sa mère. Elle ne se laissait pas perturber par
ce qu’on pouvait penser d’elle.
    Blanche continua donc à briller pendant les
cours et à devenir de plus en plus populaire auprès des patients, qui aimaient
voir s’approcher cette femme toute douce et souriante, prête à écouter leurs
doléances. Il lui était arrivé, à deux reprises, de considérer qu’une plainte
contre le personnel pouvait être fondée et elle en avait avisé la sœur
hospitalière, utilisant maintes subtilités pour ne blâmer personne.
    En trois mois, les étudiantes avaient réussi à
se connaître suffisamment pour avoir une bonne idée de celles qui resteraient
et de celles qui seraient remerciées. Malgré ses performances, Blanche demeurait
inquiète, sachant que son âge – elle était de trois à quatre ans plus âgée que
ses compagnes – pouvait jouer en sa défaveur. Elle tenait tellement à rester
qu’elle ne voulut jamais croire les propos rassurants de Marie-Louise. Elle
n’avait qu’une hâte, connaître la direction que prendrait sa vie, pour enfin
pouvoir dormir. Depuis septembre, elle dormait trois heures par nuit, attendant
que Marie-Louise soit assoupie pour se relever et lire ses notes de cours,
quand elle ne restait pas étendue à écouter les bruits de la ville et de l’hôpital.
    – Demain, on vous demandera de porter des
uniformes encore plus propres et mieux repassés que d’habitude.
Exceptionnellement, il n’y aura pas de cours dans l’après-midi. Sœur Mailloux
elle-même, la sœur hospitalière en chef, et le représentant du bureau médical
remettront les coiffes aux toutes nouvelles étudiantes de première année. La
brève cérémonie aura lieu ici, après quoi nous irons toutes à la chapelle
entendre la messe.
    Ce soir-là, Blanche ne fit qu’une courte
visite aux patients et revint rapidement à sa chambre. Marie-Louise
l’attendait.
    – Est-ce que nos uniformes sont
secs ?
    – Oui. Comme tu me l’as demandé. J’ai
trempé les collets dans le cornstarch pour que ça craque.
    – À c’t’heure, peux-tu les humecter pis
bien les rouler pendant que j’vas brancher un fer à repasser ?
    Blanche et Marie-Louise avaient fait une
entente. Marie-Louise s’occuperait de laver les uniformes et Blanche les
repasserait. Marie-Louise n’avait pas mis de temps à voir que Blanche repassait
sans faire un faux pli et Blanche lui avait raconté que le repassage avait
presque payé ses études de couventine.
    Elle achevait le col en

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