Le cri de l'oie blanche
allez recevoir vos
draps et vos couvertures. Vous irez ensuite à la salle de cours des étudiantes
pour recevoir votre première leçon : comment faire un lit d’hôpital. Vous
pouvez me suivre.
Blanche et Marie-Louise se faufilèrent
discrètement dans la masse des soixante étudiantes. Elles marchèrent presque en
silence à travers le rez-de-chaussée de l’hôpital. Elles durent attendre le quatrième
voyage de l’ascenseur avant de pouvoir monter à leurs chambres. Elles
regardèrent ensemble sur chacune des portes. Blanche espérait qu’elles seraient
ensemble. Son vœu fut exaucé. Elles pénétrèrent dans leur pièce, souriantes
devant la lumière qui entrait par la fenêtre ouverte.
– C’est propre comme un sou neuf.
– Pauvre Blanche, tu auras pas à faire le
grand ménage tout de suite.
Marie-Louise avait feint une grande
désolation.
– J’vas quand même nettoyer.
– Pourquoi ?
– Pour donner mon odeur.
– Franchement, Blanche…
– Je dois être comme une chatte qui
reconnaît ses chatons à l’odeur qu’elle laisse en les léchant. Moi, faut que je
lèche, façon de parler, tout ce que j’approche.
– Si tu veux.
Blanche avait à peine eu le temps de regarder
l’espace de rangement pour ses uniformes et de vérifier la propreté de sa
commode qu’on lui remettait ses draps et ses couvertures. Elle les déposa sur
son matelas plié en deux. Elle se demanda si on avait voulu leur indiquer
comment se nettoyait un lit d’hôpital ou si on voulait qu’elles admirent la
propreté du plancher sous le lit.
Une voix s’éleva dans le corridor, invitant
toutes les étudiantes à se rendre à la salle de cours en apportant un drap.
Blanche et Marie-Louise sortirent immédiatement de leur chambre pour suivre les
autres. Elles ne voulaient pas s’égarer.
Elles entrèrent dans la salle de cours et
Blanche réprima son étonnement. Elle était exactement comme la salle dans
laquelle elles avaient subi leur examen d’admission, mais, au lieu d’avoir sept
étages de gradins, elle n’en avait que trois, répart is
en demi-cercle autour de la pièce. Elle monta au dernier étage, suivie de
Marie-Louise, regrettant aussitôt son geste. Elle aurait dû se rapprocher de
l’action pour bien suivre.
Une des religieuses avait placé un lit au
centre de la pièce. Elle regarda les étudiantes et commença aussitôt sa
démonstration, dépliant le drap sur le lit. Elle le mit bien à plat, puis
expliqua ce qu’elle faisait pour les coins.
– Un lit bien fait doit avoir des coins à
quatre-vingt-dix degrés. En fait, il paraît que c’est comme ça que les
militaires font leur lit. On aurait appris ça d’eux. Si on insiste pour que le
drap soit replié de cette façon, c’est que nous savons qu’il reste mieux en
place, empêchant la formation de plis qui peuvent être douloureux pour les
patients. Vos lits aussi doivent être faits comme ça.
La religieuse déplia ensuite un second drap,
plus petit.
– Ceci est une alaise. C’est pour
protéger le drap. En mettant une alaise, nous pouvons la changer sans faire
tout le lit. Habituellement, nous changeons les lits à tous les jours. Les
alaises, plusieurs fois si nécessaire. Mais dans vos chambres, vous n’avez pas
d’alaises. C’était simplement une petite démonstration pour vous donner un
avant-goût de la leçon de demain.
Blanche revint à sa chambre et remit son
matelas en place. Elle déplia ensuite le drap, comme on le lui avait montré, et
fit son lit en un temps record. Marie-Louise haussa les épaules en riant.
L’inspection fut rapide. Blanche reçut des
félicitations et Marie-Louise dut recommencer. Blanche, cette fois, fit le lit
de son amie, qui l’aidait au mieux de sa connaissance fraîchement acquise.
Quand Blanche eut terminé, elle arracha les draps et défia Marie-Louise de
recommencer. Marie-Louise la regarda, découragée.
– Marie-Louise, je serai pas là avec toi
dans les chambres d’hôpital. Tu es aussi bien de tout savoir parfaitement.
Oublie pas que pour trois mois on est juste probanistes.
Marie-Louise se plia au perfectionnisme de
Blanche et réussit trois coins sur quatre. Blanche grimaça, arracha le drap de
nouveau.
– Faut que ça soit parfait.
– On n’est quand même pas à un coin près.
– Oui, on en est là.
– Je me demande pourquoi tu enseignes
plus. Je te jure que tu as le caractère d’une maîtresse d’école.
Blanche haussa les épaules
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