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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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avait insisté
pour que le curé s’attable avec eux. Il avait accepté et Blanche avait vu sa
mère lever les sourcils sans arrêt comme si la question qu’elle voulait poser
ne passait pas par sa bouche mais par ses yeux. Le curé la regardait et Blanche
crut qu’il faisait exprès de les faire languir.
    Pendant le dessert, sa mère s’agitait encore
plus, se mordant maintenant les lèvres pour forcer sa bouche à être encore
discrète. Marie-Ange, elle, ne cessait de regarder le curé, essayant de lire
quelque chose que sa mère n’avait pas encore pu déchiffrer. Le curé les
remercia pour l’excellent repas et se leva pour prononcer les grâces.
    – Merci, mon Dieu, pour cet excellent
repas, et bénissez Marie-Ange. Elle aura besoin de votre protection pour
entreprendre la nouvelle tâche qui l’attend.
    Sa mère avait poussé un cri de joie ou de
victoire et Marie-Ange s’était rassise.
    – On peut dire, Émilie, que vous ne
perdez pas de temps. Les commissaires ne savaient pas encore qu’Adeline ne
pourrait terminer son année que déjà je leur proposais une remplaçante.
    Sa mère s’était tournée vers elle et Émilien
et leur avait annoncé que Marie-Ange quitterait la Acme pour enseigner avec
elle.
    – Mon plus grand rêve ! Enseigner
dans une école avec une de mes filles. Tu vas voir, Marie-Ange : à nous
deux, on va faire une belle paire.
    – Ça a tout l’air que pour ça il va
falloir que je lâche mes paires de gants.
    Sa mère avait beaucoup ri. Aussitôt le curé
parti, elle et Marie-Ange étaient allées dans la classe d’Adeline pour prendre
connaissance de toutes ses notes. Marie-Ange avait presque passé une nuit
blanche, tant elle était anxieuse.
    Elle et ses sœurs avaient quitté la maison le
lendemain pour le couvent. Elles n’avaient pu voir Marie-Ange prendre sa classe
en charge mais sa mère était venue les visiter le dimanche suivant pour leur
dire qu’à la Acme on avait été très déçu de la perdre. Elle, par contre,
trouvait que Marie-Ange avait beaucoup de talent et les enfants riaient du
matin jusqu’au soir parce que Marie-Ange était toujours très drôle.
    À l’Ascension, Blanche avait encore une fois
repassé tous les travaux des élèves pour l’exposition annuelle, fière de ce
qu’elle avait à présenter : un rideau en étamine de soie brodée pour la
salle à manger du curé et une merveilleuse nappe d’autel sur laquelle elle
avait dessiné et brodé des colombes, des grappes de raisin et, en plein centre,
un immense soleil. Elle avait œuvré à ces travaux pendant toute l’année et sa
mère lui avait dit que jamais elle n’avait vu broderie aussi fine et aussi
délicate. Une autre pensionnaire, dont les parents venaient de Bretagne et qui
parlait un peu comme la sœur Sainte-Eugénie, lui avait montré à faire de la
dentelle « à la française » et Blanche en avait garni la nappe.
    – Tu vas me montrer, ma Blanche, comment
faire de la dentelle comme ça.
    – J’ai pas ce qu’il faut. J’ai pris les
choses de Joséphine. C’est que ça se fait pas avec un crochet.
    – Pas avec un crochet ?
    – Non. Avec des bobines pis des épingles
sur un coussi n
    dur.
    – Si c’est pas plus compliqué que ça, on
va pouvoir s’organiser.
    – Mais il faut des bobines spéciales,
pointues.
    – Ah bon !
    À la fin de l’année, Joséphine lui avait donné
son matériel. Elle le lui avait bien emballé et Blanche avait ouvert le paquet
sans se douter du contenu.
    – Ah… ! Joséphine. Mais tu peux pas
me donner ça !
    – Mais si. Je déteste faire de la
dentelle. Et puis, de toute façon, si l’envie me prend un jour de recommencer,
je n’ai qu’à écrire à mes tantes ou à ma grand-mère, en France, et elles
m’enverront les fuseaux.
    Elle avait embrassé Joséphine. Maintenant,
elle pourrait montrer à sa mère comment faire de la dentelle française.
    L’année scolaire s’était terminée comme la
précédente et celle d’avant. Elle avait reçu beaucoup de récompenses pour ses
bonnes notes puis elle avait fait les malles.
    À leur retour du couvent, sa mère les avait
toutes embrassées et Blanche l’avait tenue longtemps dans ses bras. Sa mère
était chaude comme un soleil et Blanche aimait tellement les rayons de joie
qu’elle dégageait.
    – Les enfants, j’ai pas mal de surprises
à vous annoncer. Pour faire ça, j’ai bien envie de vous proposer de faire un
repas qu’on va pouvoir

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