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Le crime de l'hôtel Saint-Florentin

Titel: Le crime de l'hôtel Saint-Florentin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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compréhension d'une affaire dont les tenants et aboutissants sont loin de vous être connus et pour laquelle la célérité la plus grande est nécessaire.
    — Votre insolence est grande ! Elle me passe. Que me contez-vous là ? Si je suis mal informé et hors du temps, à qui la faute ?
    — La faute est à ceux qui s'en prennent à la couronne et à ses serviteurs. De quel temps ai-je disposé, selon vous, entre une enquête qui tourne à présent autour de trois cadavres, dont deux jeunes femmes, l'une presque une enfant, dans laquelle s'entremêlent les affaires d'État, les sociétés secrètes, les turpitudes des grands et les intérêts d'une puissance ennemie ? Il est bien imprudent de donner de loin des instructions à un subordonné qui, voyant tout par lui-même, sent les difficultés. Puisqu'on lui a confié une mission, il faut s'en rapporter à lui et ne pas le gêner par des combinaisons que les circonstances, qui changent à chaque instant, rendent inexécutables.
    — Monsieur !
    Mais Nicolas était lancé.
    — Une enquête où moi-même je fus l'objet d'un attentat auquel j'échappai de justesse, poursuivit-il. Comment voulez-vous que je qualifie une telle succession d'événements, et comment, ne sachant rien du déroulement des faits, pouvez-vous m'accuser de violer des lois que je sers depuis quatorze ans sous l'autorité du feu roi et de votre prédécesseur, M. de Sartine ?
    — Je vous prie de baisser le ton et d'oublier les absents et les morts, répliqua sèchement Le Noir. Vous battez la campagne ! Comment imaginer que, sous un roi débonnaire et mon autorité, on s'autorise, sans que la justice s'en mêle, à user de ces moyens dont chacun sait qu'ils suscitent l'aveu sans rien prouver quant au fond ?
    — Posez-moi la question, au lieu de requérir sans entendre. Si j'ai mis en branle ce solennel et effrayant appareil, c'est précisément pour ne point avoir à l'utiliser. Je souhaitais que sa manifestation dissuadât le faux témoin de mentir. Ma méthode tendait à arracher, dans le tréfonds des consciences effrayées, le passé et l'avenir, la parole qui s'échappe, l'aveu à peine dissimulé et la parole longtemps retenue. Ceci dit, monsieur, permettez-moi de vous dire que vos propos ne m'étonnent guère, venant d'un homme qui, depuis le début, ne m'a manifesté que rejet et éloignement, dédaignant un dévouement acquis.
    Il sentait que, disant cela, il exagérait, mais qu'il fallait débrider cette plaie, sinon, jamais aucune confiance ne s'établirait entre eux, et lui-même perdrait sa propre estime.
    — Vous vous oubliez, monsieur, dit Le Noir, sa large face virant au pourpre.
    — Je dis ce qui est. Si vous souhaitez me retirer cette enquête, ordonnez. Si vous voulez que je quitte la police, exigez. Si vous tenez à dissimuler la vérité et laisser cette affaire sans solution, continuez à entraver la marche de vos enquêteurs. Tout est égal à la loyauté blessée. Je verrai Sa Majesté, qui espérait que j'aboutirais, et quand elle m'interrogera sur le cours de l'enquête, je lui avouerai tout de go qu'il ne peut plus, d'ordre du lieutenant général de police, compter sur son commissaire aux affaires extraordinaires. Exit, M. Le Floch. Le marquis de Ranreuil va courre le cerf à Fontainebleau. Je vous salue. Serviteur !
    Nicolas se ruait vers la porte quand M. Le Noir se précipita entre lui et la galerie.
    — Monsieur, que ne m'avez-vous parlé comme cela auparavant ?
    Nicolas, tendu et fermé, ne répondit pas.
    — Je m'en veux de vous avoir offert l'image d'un chef qui vous dépréciait, reprit Le Noir. Les affaires auxquelles vous avez été mêlé depuis tant d'années révélaient un tel caractère qu'un sentiment irraisonné de méfiance avait grandi en moi. Je crains de m'être trompé et de vous avoir si gravement blessé que je m'en veux. À votre tour, mesurez mon incertitude devant le peu d'informations qui me revenait, et ma colère d'apprendre l'usage de la question. J'ai été trompé par de fausses informations. Je le déplore. Vous êtes un honnête homme, car qui d'autre aurait osé me parler comme vous le fîtes ? Avec une telle hauteur… L'avez-vous d'ailleurs jamais tenté avec mon prédécesseur ?
    — Au fait, oui, dit Nicolas dont la colère était aussitôt tombée, j'ai présenté une fois ma démission à M. de Sartine. C'était au début de ma carrière, et il avait cru bon de me prendre pour jouet imbécile

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