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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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minutes, il demeura immobile avant de décider
de sa prochaine destination. Forbes était quelque part dans les parages à discuter
avec les domestiques, gonflé d’importance à l’idée de participer à une enquête
criminelle, et ravi de pouvoir enfin satisfaire une curiosité longtemps
réprimée vis-à-vis d’un mode de vie qui jusque-là dépassait totalement le cadre
de son expérience. Ce soir-là, il serait une mine de renseignements, pour la
plupart inutiles, mais dans tout ce fatras d’habitudes quotidiennes, il y
aurait peut-être une observation qui déboucherait sur une autre… et ainsi de
suite. À cette pensée, il eut un grand sourire. Un aide-jardinier qui passait
par là le dévisagea, stupéfait et quelque peu impressionné par cet homme qui, manifestement,
n’était pas un gentleman et cependant se permettait de rester planté au milieu
de la rue à sourire aux anges.
    Finalement, il opta pour la résidence centrale appartenant à
un certain Paul Alaric, où on lui dit très poliment que Monsieur [3] ne serait pas chez lui avant la tombée
de la nuit, mais que si l’inspecteur voulait bien revenir à ce moment-là, Monsieur le recevrait certainement.
    N’ayant pas encore réfléchi à ce qu’il allait dire à George,
il remit cette entrevue-là à plus tard et essaya la maison suivante, celle d’un
dénommé Hallam Cayley.
    Mr. Cayley n’avait pas encore fini son petit déjeuner ;
néanmoins, il l’invita à entrer et lui offrit une tasse de café très corsé, que
Pitt refusa. Il préférait le thé de toute façon, et ce breuvage paraissait
aussi visqueux que les eaux huileuses du port de Londres.
    Cayley sourit de mauvaise grâce et se versa une autre tasse.
C’était un homme séduisant d’une trentaine d’années ; malheureusement, son
beau visage aux traits aquilins était gâché par une peau grêlée, et une bouche
molle qui laissait deviner un tempérament colérique. Ce matin-là, il avait les
yeux bouffis et légèrement injectés de sang. Pitt comprit que la veille il
avait dû forcer sur la bouteille.
    — Que puis-je pour vous, inspecteur ? commença
Cayley, parlant le premier. Je ne sais rien du tout. J’ai passé la plus grande
partie de la soirée chez les Dilbridge. N’importe qui vous le dira.
    Le cœur de Pitt se serra. Tout le monde disposait-il donc d’un
alibi ? Non, c’était absurde. D’ailleurs, c’était sans importance ; il
s’agissait sûrement d’un domestique qui avait bu un coup de trop, s’était oublié
et, quand la jeune fille s’était mise à crier, l’avait poignardée, affolé, pour
la faire taire, peut-être même sans intention de tuer. Forbes trouverait
probablement la réponse. Quant à lui, il interrogeait les maîtres simplement
parce qu’il fallait le faire, ne fût-ce que pour la forme, pour qu’on sache que
la police ne chômait pas… et plutôt lui que Forbes, avec ses maladresses
verbales et sa curiosité par trop flagrante.
    Il se força à revenir à ses questions.
    — Vous rappelez-vous par hasard avec qui vous étiez aux
environs de dix heures ?
    — À vrai dire, je me suis disputé avec Barham Stephens.
    Cayley se resservit du café et secoua la cafetière avec
irritation lorsque sa tasse ne se remplit qu’à moitié. Il la reposa avec fracas,
faisant trembler le couvercle.
    — Le bougre prétendait qu’il ne perdait jamais aux
cartes. J’ai horreur des mauvais perdants. Et je ne suis pas le seul.
    Il fixa sombrement son assiette jonchée de miettes.
    — Et cette dispute a eu lieu à dix heures ? demanda
Pitt.
    Cayley contemplait toujours son assiette.
    — Non, un peu plus tôt, et ç’a été plus qu’une dispute.
Ç’a été une sacrée bagarre, dit-il, levant vivement la tête. Enfin, vous n’appelleriez
pas ça une bagarre, vous. Il n’y a pas eu d’éclats de voix. Stephens ne se
conduit peut-être pas en gentleman, mais nous sommes tous deux suffisamment
bien élevés pour ne pas nous quereller devant les dames. Je suis sorti faire un
tour, histoire de me calmer.
    — Dans le jardin ?
    Cayley regarda à nouveau son assiette.
    — Oui. Vous voulez savoir si j’ai vu quelque chose… La
réponse est non. Il y avait des gens partout. Les Dilbridge ont des
fréquentations bizarres. Mais vous avez la liste des invités, non ? Vous
finirez par découvrir sans doute que c’était un valet engagé pour la soirée. Certaines
personnes louent des équipages, vous savez, surtout si

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