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Le Crime De Paragon Walk

Le Crime De Paragon Walk

Titel: Le Crime De Paragon Walk Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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Vous
m’avez fourni matière à réflexion.
    Il s’abstint de conclure par une banalité comme quoi l’affaire
serait bientôt résolue. C’eût été insultant pour elle.
    Elle sourit imperceptiblement.
    — Merci, Mr. Pitt. Bonne journée.
    — Bonne journée à vous, madame.
    Et il se laissa reconduire dehors.
    Une fois dans Paragon Walk, il traversa la chaussée en direction
de la pelouse d’en face. Il n’avait pas le droit de marcher sur l’herbe – c’était
spécifié sur un écriteau –, mais il aimait à la sentir sous les semelles de ses
bottes. Les pavés étaient inanimés, dénués de grâce : indispensables s’ils
devaient être foulés par des milliers de passants, mais ils cachaient la terre.
    Que s’était-il passé dans cette promenade élégante, ordonnée,
ce fameux soir ? Quel chaos soudain avait bouleversé cette quiétude pour
retomber en un tas de débris totalement informes ?
    Les sentiments lui échappaient. Tout ce qu’il touchait se
fragmentait et se désintégrait.
    Il fallait en revenir aux choses pratiques, à la mécanique
du meurtre. Les gentlemen des beaux quartiers se promenaient rarement avec un
couteau. Pourquoi, comme par hasard, le violeur en avait-il un sur lui ? Était-ce
possible qu’il n’eût pas agi sous l’empire d’une passion aveugle, mais bel et
bien avec préméditation ? Se pouvait-il qu’il eût projeté cet assassinat, et
que le viol fût accessoire, une impulsion ou bien une feinte ?
    Mais pourquoi assassiner Fanny Nash ? Il ne connaissait
personne de plus inoffensif. Elle n’avait pas de fortune à hériter, pas d’amant ;
aucun homme, d’après ses renseignements, ne s’était intéressé à elle, à l’exception
d’Algernon Burnon… et encore, la raison, dans cette histoire, semblait l’emporter
sur les sentiments.
    Fanny aurait-elle, en toute innocence, découvert quelque secret
qui lui avait coûté la vie ? Peut-être même sans se rendre compte de ce
que c’était ?
    Et le couteau, qu’était-il devenu ? L’assassin était-il
toujours en sa possession ? Etait-il caché quelque part, loin d’ici, au
fond du fleuve ?
    Autre question pratique : elle avait été poignardée à
mort ; il revoyait encore l’épaisse coulée de sang sur son corps. Pourquoi
n’y avait-il pas de sang sur la route, aucune trace entre le salon et le lieu
de l’agression ? Il n’avait pas plu depuis. L’assassin avait pu se
débarrasser de ses vêtements ; l’explication était simple, même si, en
dépit de sa diligence, Forbes n’avait pas réussi à trouver un seul valet qui
aurait remarqué un manque dans la garde-robe de son maître ou des débris calcinés
dans une chaudière ou un foyer de cheminée.
    Mais pourquoi pas de sang sur la route ?
    Cela aurait-il pu arriver ici, sur l’herbe, ou au milieu d’un
parterre de fleurs où les marques auraient été ensevelies ? Dans les
buissons où elles seraient passées inaperçues ? Mais ni lui ni Forbes n’avaient
relevé de traces de lutte : pas de fleurs piétinées, pas de branches
cassées pouvant s’expliquer autrement que par le passage d’un chien, de quelqu’un
qui aurait trébuché dans le noir, par la maladresse d’un aide-jardinier ou le
batifolage entre une bonne et un valet.
    S’il y avait eu quelque chose, ils ne l’avaient pas trouvé
ni identifié ; depuis, l’assassin ou d’autres l’avaient fait disparaître.
    Il se tourna à nouveau vers les mobiles et les protagonistes.
Pourquoi ? Pourquoi Fanny ?
    Il fut tiré de ses réflexions par un raclement de gorge
discret, à quelques pas de lui, de l’autre côté des rosiers. Il leva les yeux. Un
majordome âgé et morose se tenait dans l’allée, le regardant d’un air gêné.
    — C’est moi que vous cherchez ? s’enquit Pitt, feignant
de ne pas remarquer qu’il marchait sur le gazon.
    — Oui, monsieur. Si vous voulez bien avoir l’obligeance,
monsieur, Mrs. Nash aimerait vous voir.
    — Mrs. Nash ?
    Il pensa aussitôt à Jessamyn.
    — Oui, monsieur.
    Le majordome s’éclaircit la voix.
    — Je veux dire, Mrs. Afton Nash, monsieur.
    Phœbe !
    — Mais certainement, répondit Pitt sur-le-champ. Est-elle
chez elle ?
    — Oui, monsieur. Si vous voulez bien me suivre.
    Pitt lui emboîta le pas. Ils traversèrent la chaussée en
direction de la maison d’Afton Nash. La porte s’ouvrit avant qu’ils n’eussent
gravi les marches du perron, et on les fit entrer. Phœbe était

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