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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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n’était pas une question de doute ou de manque de confiance. Je savais juste que je ne pourrais jamais parcourir trente-neuf kilomètres. C’était empiriquement et cartésiennement impossible.
    — Oh non ! répondit le dignitaire avec un grand sourire fier. Spyros participa par hasard à la course. Il était alors soldat dans l’armée grecque, et son colonel le poussa à s’inscrire au dernier moment. On dit en effet qu’il courait bien mais n’avait aucun entraînement, aucune préparation. Il le fit simplement par patriotisme, pour qu’un Grec participe à la plus importante des courses olympiques. Nous n’allions tout de même pas laisser un étranger gagner ! Spyros ne reçut pourtant aucune médaille d’or pour son exploit car, lors de ces premières Olympiades, on ne récompensait pas encore les vainqueurs de cette manière. Mais on lui octroya une pension mensuelle à vie de cent drachmes ainsi qu’une charrette et un cheval qu’il avait demandés pour travailler dans les champs.
    — Et vous ne savez pas la meilleure ? ajouta Sa Béatitude. Quarante ans plus tard, il fut choisi pour porter l’étendard de la délégation grecque lors de la cérémonie d’ouverture des jeux Olympiques de Berlin de 1936.
    — Donc, ce n’était pas un athlète ?
    — Non, pas du tout.
    — Dans ce cas, s’il lui a fallu presque trois heures pour faire ce parcours, combien de temps mettrons-nous ? voulus-je savoir.
    — Ce n’est pas si simple, me répondit le capitaine.
    Il ouvrit un carnet de notes et le feuilleta jusqu’à ce qu’il trouve l’information qu’il recherchait.
    — Nous sommes le 29 mai, commença-t-il à expliquer. Selon les données apportées par l’archidiocèse, le soleil se couchera sur Athènes à 20 h 56. Demain, il se lèvera à 6 h 02. De sorte que nous disposons de neuf heures et six minutes pour accomplir l’épreuve.
    — Ah, ça change tout ! s’exclama Farag.
    Nous fumes tous à ce point surpris que nous nous retournâmes pour le regarder, interloqués.
    — Quoi ? Je vous assure, je pensais être incapable de réaliser cette épreuve…
    Comme moi, il avait gardé ses craintes pour lui.
    — Moi, je suis sûre que je n’y arriverai pas.
    — Voyons, Ottavia, nous avons plus de neuf heures !
    — Et alors ? Je ne peux pas courir neuf heures de suite, je ne suis même pas sûre de pouvoir courir neuf minutes.
    Le capitaine feuilleta de nouveau son cahier.
    — Les résultats pour les hommes sont inférieurs à deux heures sept minutes et, pour les femmes, un peu supérieurs à deux heures vingt.
    — Je ne pourrai pas, répétai-je, têtue. Vous savez combien de fois j’ai couru ces derniers temps ? Pas une, vous m’entendez ! Rien de rien, même pas pour prendre le bus.
    — J’ai quelques conseils à vous donner pour ce soir, poursuivit le capitaine comme s’il ne m’avait pas entendue. D’abord éviter tout excès. Ne vous mettez pas à courir comme si vous deviez vraiment gagner un marathon. Courez doucement, sans vous presser, économisez vos efforts. Des pas courts et réguliers, un balancement réduit des bras, une respiration rythmée… Quand il faudra monter une colline, faites-le de manière efficace, avec de petits pas. Pour la descente, contrôlez le pas. Gardez le même rythme pendant toute la course. Ne levez pas trop haut les genoux, ne vous penchez pas en avant, gardez le corps à angle droit avec le sol.
    — Mais qu’est-ce que vous racontez ?
    — Je vous rappelle que nous devons arriver à Kapnikarea. À moins que vous ne préfériez rentrer à Rome demain matin ?
    — Vous savez ce que fit Spyros en arrivant au kilomètre 30 ? dit alors l’archevêque, à qui l’idée d’assister à l’une de nos disputes ne disait rien. Comme Spyros se sentait très fatigué, il demanda un grand verre de vin rouge et le but d’un trait. Puis il effectua une remontée spectaculaire qui le fit littéralement voler pendant les neuf derniers kilomètres.
    Farag éclata de rire :
    — Bon, nous savons ce qu’il nous reste à faire ! Boire du vin.
    — Je ne crois pas qu’aujourd’hui le jury permettrait ce genre de choses, dis-je, encore fâchée.
    — Mais si ! Les coureurs peuvent boire ce qu’ils veulent tant qu’ils ne sont pas contrôlés positifs.
    — Nous prendrons des boissons isotoniques, déclara Glauser-Röist. Vous surtout, professeur Salina, vous devrez boire souvent pour récupérer des sels

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