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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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cette musique, commenta Haidé.
    — Beaucoup, répondis-je.
    À cet instant, je me rendis compte que je n’avais pas la moindre idée de la date. J’avais totalement perdu la notion du temps.
    — Nous sommes le 18 juin, me répondit Haidé, jour du Seigneur.
    Dimanche 18 juin… Nous avions mis trois mois pour parvenir à notre but, et cela faisait quinze jours que nous avions disparu.
    — Tu ne veux pas de fibule ! s’étonna Haidé. Mais ce n’est pas possible, Ottavia !
    — Elles sont… trop… Je ne mets jamais ce genre de choses.
    — Alors, comment comptes-tu faire tenir ton himation ?
    — Vous n’avez rien de plus simple ? Des épingles…
    Je n’avais pas la moindre idée du mot qui correspondait à « épingle de nourrice ».
    Elles se regardèrent, troublées.
    — L’ himation se porte seulement avec des fibules, m’annonça enfin Haidé. On peut la revêtir de façon différente selon qu’on en met une ou deux, mais on ne peut pas l’attacher à l’épaule avec des aiguilles. Elles ne supporteraient pas tes mouvements ni le poids de la toile et finiraient par tomber.
    — Mais ces fibules sont trop brillantes !
    — C’est ça le problème ? demanda Zauditu avec un visage étonné.
    — Bon, Ottavia, ne t’inquiète pas, nous en parlerons plus tard, dit Haidé. Prends les fibules et les sandales, et allons à la salle à manger. J’ai fait prévenir Ras pour qu’ils t’attendent. Je crois que le didaskalos Boswell est impatient de te voir.
    — Et moi donc !
    Je bondis du lit, pris deux fibules parmi les plus jolies, l’une avec une tête de lion – les yeux étaient d’incroyables rubis – et l’autre représentant un jet d’eau. Je retirai ma chemise par la tête.
    — Mes cheveux ! m’écriai-je soudain en italien.
    — Comment ?
    — Mes cheveux ! répétai-je en laissant tomber de nouveau le vêtement sur mon corps et en cherchant un miroir pour me regarder.
    J’en trouvai un, dans un cadre d’argent, suspendu au mur près de la porte. Je courus vers lui et mon sang se figea dans les veines lorsque je vis ma tête rasée. Incrédule, je posai mes mains sur mon crâne et le palpai. Je notai alors quelque chose sous les doigts, en même temps qu’une douleur aiguë. Là, sur la partie supérieure, au centre même, une lettre sigma scarifiée.
    En état de catatonie, incapable de réagir aux paroles de consolation de Haidé et Zauditu, je me déshabillai et contemplai mon corps nu. Six autres lettres grecques y étaient réparties : un T sur le bras droit, un epsilon sur le gauche, un alpha entre les deux seins, sur l’abdomen un rhô, sur le muscle droit un omicron, et le gauche un sigma. Si on leur ajoutait les croix obtenues après les épreuves et le chrisme sur le nombril, je ressemblais à une pauvre folle qui se serait lacéré le corps.
    Soudain Haidé aussi apparut nue à côté de moi et Zauditu l’imita. Elles portaient les mêmes marques que moi, mais cicatrisées depuis plus longtemps. Ce geste généreux méritait une réaction de ma part.
    — Cela me passera, dis-je au bord des larmes.
    — Ton corps n’a pas souffert, m’expliqua Haidé, très sereine. On vérifie toujours que le sommeil est profond avant d’ouvrir la peau. Regarde-nous. Nous sommes si horribles que ça ?
    — Je trouve que ce sont de très beaux signes, dit Zauditu, souriante. J’adore ceux du corps de Tafari, et il aime beaucoup les miens. Tu vois celle-là, dit-elle en indiquant la lettre alpha. Regarde avec quelle délicatesse ils l’ont tracée. Ses bords sont parfaits.
    — Et pense que ces lettres forment le mot stavros, qu’il sera toujours avec toi où que tu ailles, ajouta Haidé. C’est un mot important. Souviens-toi combien cela t’a coûté de les obtenir, et sois-en fière.
    Elles m’aidèrent à m’habiller, mais je ne pouvais cesser de penser à mon corps couvert de scarifications et à ma tête rasée. Qu’allait dire Farag ?
    — Cela te rassurera peut-être de savoir que le didaskalos et le protospatharios sont pareils que toi, commenta Zauditu. Et cela ne paraît pas leur déplaire.
    — Mais ce sont des hommes ! m’exclamai-je tandis que Haidé nouait une ceinture autour de ma taille.
    Elles échangèrent un regard de connivence et essayèrent de cacher une expression de patiente résignation.
    — Cela te demandera peut-être un certain temps, Ottavia, mais tu apprendras qu’établir ce genre de différences est

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