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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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une bêtise. Et maintenant partons, on t’attend.
    Je choisis de me taire et de les suivre, mais j’étais surprise de constater à quel point elles étaient modernes. Le couloir, ample, couvert de tapisseries, donnait sur une cour centrale où une fontaine magnifique lançait de grands jets d’eau. Je voulus me pencher pour voir le ciel mais ne pus apercevoir que d’étranges ombres noires, à une distance si grande qu’il était impossible d’en estimer la hauteur. Alors je m’aperçus qu’il n’y avait pas de lumière du soleil, pas de soleil nulle part, et que l’éclairage n’était en aucune façon naturel.
    Nous traversâmes d’autres couloirs semblables au premier, avec de plus en plus de patios ornés de jets d’eau aux effets incroyables. Le bruit était apaisant, comme celui d’une rivière qui court sur le chemin, mais je me sentais nerveuse. Si je regardais bien tout ce qui m’entourait, mille signes inquiétants m’indiquaient qu’il y avait quelque chose de très étrange dans ce lieu.
    — Où se trouve exactement le Paradeisos  ? demandai-je à mes guides, qui marchaient, silencieuses, devant moi, d’un pas lent et en se penchant de temps en temps dans les patios. Un rire sonore fut l’unique réponse que j’obtins.
    — Quelle question ! laissa échapper Zauditu d’un ton joyeux.
    — À ton avis, il se trouve où ? se sentit obligée d’ajouter Haidé, avec le même ton qu’on emploie pour parler à une petite fille.
    — En Éthiopie ?
    — Ah ! tu crois ? me répondit-elle comme si la réponse était évidente.
    Nous nous arrêtâmes devant des portes, d’une taille impressionnante et d’une facture encore plus magnifique, qui s’ouvrirent aussitôt devant nous. De l’autre côté, une salle immense, abondamment décorée comme tout ce que j’avais vu jusqu’à présent, exhibait en son centre une table circulaire qui me rappela la légendaire Table ronde du roi Arthur.
    Farag Boswell, le didaskalos le plus chauve que j’eusse jamais vu, se leva d’un bond en me voyant arriver – le reste de l’assemblée se mit aussi debout, mais plus tranquillement –, tendit les bras et courut vers moi en manquant de trébucher sur les pans de sa tunique. Je le vis arriver avec un nœud dans la gorge. J’oubliai aussitôt tout ce qui m’entourait. On lui avait rasé la tête, mais il avait gardé sa barbe blonde. Je me serrai contre lui, le souffle coupé, en notant son corps chaud collé au mien et en aspirant son odeur, pas celle de son himation qui sentait le santal, mais celle de la peau de son cou que je reconnaissais. Nous étions dans le lieu le plus étrange du monde, mais dans les bras de Farag je retrouvais un foyer.
    — Tu vas bien ? Tu vas bien ? répétait-il, angoissé, sans desserrer son étreinte.
    Je riais et pleurais à la fois, submergée par l’émotion. Sans lui lâcher les mains, je m’écartai un peu pour mieux le regarder. Il avait une drôle d’allure ! Chauve, barbu, vêtu d’une tunique blanche qui lui tombait aux pieds, même son père aurait eu du mal à le reconnaître.
    — Professeur, s’il vous plaît ! dit une voix qui résonna dans le silence. Amenez-nous le professeur Salina.
    Traversant la salle sous un cercle de regards cordiaux, Farag et moi nous approchâmes d’un petit vieux courbé qui ne se différenciait en rien des autres, si ce n’était par son âge avancé. Ni ses vêtements ni sa place à table ne permettaient de deviner qu’il s’agissait de Caton, le deux cent cinquante septième du nom. Quand je compris qui il était, un sentiment de respect et de peur s’empara de moi. En même temps, l’étonnement et la curiosité me poussèrent à l’examiner en détail tandis que la distance entre nous se réduisait. Caton était un vieillard de taille moyenne, qui reposait sur un délicat bâton le poids de son extraordinaire vieillesse. Un léger tremblement, dû à la fragilité de ses membres, secouait son corps sans lui faire perdre pour autant une once de sa dignité. Tout au long de ma vie, j’avais vu des parchemins moins ridés que sa peau, qui semblait sur le point de se casser, parcourue par des milliers de stries. Pourtant, la singulière expression d’acuité de son visage, son regard brillant qui paraissait infiniment intelligent m’impressionnèrent au point que je fus tentée de faire une révérence et une génuflexion, comme j’en avais pris l’habitude au Vatican.
    — Hygieia,

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