Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
Vom Netzwerk:
sismiques, coupures d’électricité, d’eau, des voies de communication… J’appelai chez moi le soir même. Ils étaient tous réveillés et écoutaient les bulletins d’information à la radio et à la télévision. Ils me rassurèrent, tous étaient sains et saufs, et la situation était sous contrôle. J’aurais dû leur annoncer alors que je quittais Rome et le Vatican pour l’Irlande, mais je n’osai pas. Je craignais tellement leur déception et leurs commentaires. Une fois installée à Connaught, je finirais bien par trouver une idée pour les convaincre que ce changement était positif et que j’étais enchantée de mon nouveau destin.
    Le jeudi suivant, à une heure de l’après-midi, je montai dans l’avion qui devait me conduire en exil. Seule Margherita put m’accompagner. Elle m’embrassa tristement et me supplia avec affection de ne pas résister à la volonté de Dieu, d’essayer de m’adapter avec joie à cette nouvelle situation, et de lutter contre mon impétuosité. Ce fut le vol le plus triste de toute ma vie. Je ne regardai pas le film, ne mangeai rien. Ma seule obsession était de préparer ce que j’allais dire à ma sœur Lucia quand je lui téléphonerais, et à ma famille quand je me sentirais enfin capable de leur apprendre la nouvelle.
    Deux heures et demie plus tard, l’avion atterrissait enfin à Dublin. Il était cinq heures de l’après-midi en Irlande. Je suivis la file des passagers qui entraient dans le terminal international pour récupérer les bagages sur les tapis roulants. Je soulevai avec force mon énorme valise, poussai un profond soupir et me dirigeai vers la sortie en cherchant du regard les sœurs qu’on avait sans doute envoyées me chercher.
    J’allais passer dans ce pays entre vingt et trente ans de ma vie, et peut-être, me disais-je sans grande conviction, parviendrais-je à m’adapter et à y être heureuse. Telles étaient mes stupides pensées. Je savais que je me mentais, que je me trompais moi-même : ce pays serait ma tombe, il signifiait la fin de mes ambitions professionnelles, de mes projets et enquêtes. Pourquoi avais-je fait tant d’études ? Pourquoi m’étais-je efforcée, année après année, d’obtenir des titres, des diplômes et des prix, les uns après les autres ? Était-ce pour finir dans ce misérable village de la région de Connaught où l’on avait décidé de m’enterrer ? Je regardai avec appréhension autour de moi, en me demandant combien de temps je serais capable de supporter cette situation déshonorante, puis je me repris et me rappelai, résignée, que je ne devais pas faire attendre plus longtemps les sœurs irlandaises.
    Mais, à ma grande surprise, aucune religieuse ne m’attendait. À leur place, je trouvai deux prêtres habillés à l’ancienne, avec col blanc, soutane et gabardine noire, qui se dépêchèrent de prendre mes valises en me demandant, en anglais bien sûr, si j’étais bien sœur Ottavia. Quand je répondis par l’affirmative, ils se regardèrent soulagés, posèrent les sacs dans un chariot, et tandis que l’un le poussait comme si sa vie en dépendait, l’autre m’expliquait que je devais rentrer tout de suite à Rome, pour prendre le prochain vol une heure plus tard.
    Je ne comprenais rien à ce qui se passait, mais ils n’en savaient guère plus. Ils restèrent avec moi jusqu’à l’embarquement. Ils m’expliquèrent qu’ils étaient les secrétaires de l’évêché et qu’on les avait envoyés à l’aéroport pour m’accueillir et me remettre dans l’avion. L’évêque en personne leur en avait donné l’ordre ; il était en voyage dans son diocèse et leur avait parlé par téléphone.
    Ce fut la fin de mon bref passage par la République d’Irlande. Le même jour, à huit heures, j’atterrissais à Fiumicino. J’avais passé la journée dans les airs. Deux hôtesses me conduisirent vers les salons VIP où, assis dans un large fauteuil, m’attendait le cardinal Carlo Colli. Il se leva en me voyant et me tendit la main avec un léger trouble :
    — Éminence, dis-je en faisant une génuflexion.
    — Sœur Ottavia, balbutia-t-il, intimidé, sœur Ottavia, vous ne savez pas à quel point je regrette ce qui s’est passé.
    Je suppose qu’il se référait à l’affreux traitement que j’avais subi au Vatican et de la part de mon ordre durant cette semaine, mais je n’étais pas prête à lui faciliter la tâche, aussi fis-je semblant de croire que

Weitere Kostenlose Bücher