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Le Dernier Caton

Le Dernier Caton

Titel: Le Dernier Caton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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ici : l’ange gardien appuie les pieds sur la marche de porphyre, et est assis sur le seuil de la porte de diamant. Avec l’œuvre au rouge, ultime étape de l’alchimie, celle de la sublimation, on atteint la pierre philosophale dont le corps est un diamant. Tu ne te souviens pas ?
    Je le regardai, perplexe :
    — Si, si…
    Je n’en revenais toujours pas. Je n’aurais jamais soupçonné une chose pareille. Cette interprétation me paraissait plus plausible que l’autre, celle de la confession, assez tirée par les cheveux si l’on y réfléchissait bien.
    — Pour une fois, j’ai réussi à t’étonner, dit-il, très content de lui. Bon, je te laisse continuer. Bonne lecture.
    — D’accord. On se verra au déjeuner.
    — Nous viendrons te chercher.
    Mais je ne l’écoutais déjà plus. Je regardais, hallucinée, le texte du Purgatoire.
    — J’ai dit que Kaspar et moi viendrons te chercher pour aller déjeuner, me rappela d’une voix assez forte Farag avant de partir. D’accord, Ottavia ?
    — Oui, oui, pour déjeuner, d’accord.
    Dante Alighieri venait de renaître à mes yeux sous un nouvel aspect, et je commençai à penser que le capitaine avait peut-être eu raison en m’assurant que La Divine Comédie était une œuvre initiatique. Mais quel lien avec les stavrophilakes ? Je frottai l’arête de mon nez et remis mes lunettes, prête à lire avec un regard plus bienveillant les nombreux chants qui m’attendaient.
    Farag m’avait interrompue alors que Virgile et Dante se retrouvaient au sommet des marches. Virgile dit à son élève qu’il demande humblement à l’ange de lui céder le passage :
     
    Je me jetai, dévot, à ses pieds sacrés.
    Je demandai miséricorde et qu’il m’ouvrît,
    mais d’abord par trois fois je battis ma poitrine.
    Il traça sept P sur mon front
    du bout de son épée, et « Souviens-toi de laver,
    quand tu seras dedans, ces plaies », dit-il.
     
    L’ange sort alors de ses habits, couleur de cendre ou de terre sèche, deux clés, d’argent et d’or, et recommande à Dante d’ouvrir les serrures avec l’une d’abord puis l’autre.
     
    « Chaque fois que l’une des clés se trompe
    et ne tourne pas bien dans la gâche,
    dit-il, l’entrée ne s’ouvre pas.
    L’une est plus précieuse ; mais l’autre veut
    plus d’art et d’industrie avant d’ouvrir
    car c’est elle qui défait le nœud.
    Je les tiens de Pierre ; et il m’a dit d’être en défaut
    plutôt en l’ouvrant qu’en la tenant fermée,
    pourvu que les pécheurs s’abaissent à mes pieds. »
    Puis il poussa l’huis de la porte sainte
    en disant : « Entrez, mais je vous avertis
    que celui qui regarde en arrière doit sortir. »
     
    Bon, me dis-je, si ce n’est pas un véritable guide pour entrer dans le Purgatoire, je ne sais pas ce que c’est. Je dus admettre que Glauser-Röist avait raison. Mais il nous manquait encore l’essentiel : où se trouvaient en réalité l’Antipurgatoire, les trois marches, l’ange et la porte des deux clés ?
    À midi, tandis que nous nous dirigions vers la cafétéria par les couloirs des Archives, je me rappelai que je devais prévenir le capitaine de ma prochaine absence :
    — Dimanche, je célèbre le renouvellement de mes vœux, lui expliquai-je. Je dois faire une retraite de plusieurs jours. Mais je serai de retour lundi sans faute, je vous le promets.
    — Nous manquons de temps, dit-il, de mauvaise humeur. Vous ne pouvez pas prendre le samedi seulement ?
    — C’est quoi, cette histoire de renouvellement ? voulut savoir Farag.
    — Eh bien, dis-je intimidée, les religieuses de la Bienheureuse Vierge Marie renouvellent leurs vœux tous les ans.
    Pour une religieuse, parler de ces choses revenait à dévoiler la part la plus intime et privée de sa vie.
    — D’autres ordres pratiquent les vœux perpétuels ou les renouvellent tous les deux ou trois ans. Nous, nous le faisons tous les quatrièmes dimanches de Pâques.
    — Les vœux de pauvreté, d’obéissance et de chasteté ? insista Farag.
    — Oui, au sens strict, répondis-je, gênée. Mais ce n’est pas seulement ça… Enfin, si, mais…
    — Il n’y a pas de religieux chez les coptes ? demanda Glauser-Röist en se portant à mon secours.
    — Si, bien sûr. Excuse-moi, Ottavia, je suis trop curieux.
    — Non, ce n’est rien, dis-je, conciliante.
    — C’est que je pensais que tu étais religieuse pour toujours, ajouta-t-il de

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