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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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d’Alfred, qu’il avait eu
d’une autre servante.) J’ai prié pour échapper à la tentation, continua Alfred,
pour être affligé d’une douleur qui m’en détourne. Dieu dans sa miséricorde m’a
rendu malade, mais j’ai tout de même cédé. Je suis le plus misérable des
pécheurs.
    — Nous sommes tous pécheurs. Accueillez la tentation,
mon seigneur, le pressa-t-il. Accueillez-la, résistez-lui, et remerciez Dieu
d’y parvenir. Et Dieu vous récompensera, mon seigneur.
    — En chassant les Danois ? demanda Alfred.
    — Il le fera, mon seigneur, n’en doutez point.
    — Mais nous ne devons pas attendre, pesta Alfred, une
soudaine dureté dans la voix qui fit reculer Beocca. Nous devons les
attaquer !
    — Burghred connaît son affaire, l’apaisa Beocca, tout
comme votre frère. Les païens seront affamés, mon seigneur, si telle est la
volonté de Dieu.
    Je tenais donc ma réponse : les Angles n’avaient pas
l’intention de donner l’assaut mais espéraient contraindre Snotengaham à se
rendre par la famine. N’osant pas retourner aussitôt apporter la nouvelle,
alors que Beocca et Alfred étaient si proches, je restai à écouter le prêtre
prier avec le prince. Lorsque Alfred fut calmé, ils retournèrent tous les deux
sous la tente.
    Et je repartis. Il me fallut longtemps, mais personne ne me
vit. Je fus un véritable sceadugengan, cette nuit-là, traversant les
ombres comme un spectre, gravissant la colline menant à la ville et courant les
cent derniers pas. Je criai le nom de Ragnar, la porte s’ouvrit en grinçant et
je rentrai à Snotengaham.
    Ragnar m’emmena voir Ubba au point du jour et, à ma grande
surprise, je trouvai là Weland le serpent, qui me jeta un regard peu amène mais
moins dur que celui d’Ubba.
    — Alors, qu’as-tu fait ? grommela ce dernier.
    — Je n’ai point vu d’échelles… commençai-je.
    — Qu’as-tu fait ? aboya Ubba.
    Je narrai donc ma traversée des champs quand j’avais cru
être suivi et que je m’étais caché comme un lièvre, le passage des barricades
et ma rencontre avec la sentinelle.
    Ubba m’interrompit à cet instant et regarda Weland.
    — Alors ?
    Celui-ci acquiesça.
    — Je l’ai vu passer la barricade, mon seigneur, et
parler à un homme.
    Ainsi donc, Weland m’avait suivi. J’interrogeai des yeux
Ragnar.
    — Le seigneur Ubba voulait envoyer un deuxième homme,
expliqua-t-il. Weland s’est proposé.
    Weland m’adressa le sourire du diable accueillant un évêque
qui arrivait en enfer.
    — Je n’ai pu passer la barrière, mon seigneur, dit-il à
Ubba.
    — Mais tu as vu le garçon la franchir ?
    — Et je l’ai entendu parler à la sentinelle, mon
seigneur, bien que je n’aie point ouï ce qu’il disait.
    — As-tu vu des échelles ? demanda Ubba à Weland.
    — Non, mon seigneur, mais je n’ai fait que longer la
barrière.
    Le regard que posa Ubba sur Weland le mit mal à l’aise, puis
il tourna ses yeux noirs sur moi et je me recroquevillai à mon tour.
    — Ainsi, tu as passé la barrière, dit-il. Qu’as-tu
vu ?
    Je lui narrai la grande tente et la conversation que j’avais
surprise, Alfred qui pleurait d’avoir péché, puis qu’il voulait attaquer la
ville et que le prêtre avait répondu que Dieu affamerait les Danes si telle
était sa volonté. Ubba me crut, car il jugea qu’un enfant ne pouvait inventer
l’histoire de la servante et du prince.
    Pour moi, Alfred était un faible et un dévot, un pénitent
pleurnichard, un moins que rien lamentable, et même Ubba sourit lorsque je
décrivis le prince sanglotant et le prêtre empressé.
    — Alors, demanda-t-il. Nulle échelle, donc ?
    — Je n’en ai point vu, mon seigneur.
    Il me fixa avec sa terrible face barbue puis, à mon grand
étonnement, ôta l’un de ses bracelets et me le jeta.
    — Tu as raison, dit-il à Ragnar, c’est un Dane.
    — C’est un bon garçon, renchérit Ragnar.
    — Parfois, le chien errant que l’on trouve dans un
champ se révèle utile, continua Ubba, qui fit signe à un vieillard assis sur un
escabeau dans un coin de la salle.
    Ce vieillard s’appelait Storri et, tout comme Ravn, c’était
un scalde mais aussi un sorcier qu’Ubba consultait avant chaque décision. Sans
dire un mot, Storri prit une poignée de tiges blanches de la longueur d’une
main, les leva au-dessus du sol et implora Odin avant de les lâcher. Elles
tombèrent en claquant et Storri se pencha pour examiner la forme

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