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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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pain,
étoffes, armes et tout ce que l’on pouvait imaginer. Les cloches des églises
retentissaient dans un vacarme épouvantable pour la prière ou lorsqu’un mort
était emporté dans l’un des cimetières. Des hordes de chiens rôdaient dans les
rues, des milans étaient perchés partout, et les toits de chaume étaient
noircis par la fumée envahissante. Je vis une charrette qui débordait tant de
roseaux qu’elle disparaissait sous son chargement et que les tiges raclaient le
sol et les murs de part et d’autre de la rue. Deux esclaves aiguillonnaient et
fouettaient les bœufs épuisés qui la tiraient. On leur cria que leur chargement
était trop lourd, mais ils continuèrent à fouetter leurs bêtes, tant et si bien
que la charrette arracha tout le pan d’un toit pourri. Il y avait des mendiants
partout : enfants aveugles, femmes cul-de-jatte, un homme affligé d’un
ulcère purulent à la joue. Des gens parlaient des langues inconnues, d’autres
portaient des costumes étranges et devaient venir d’au-delà des mers. Dans la
vieille ville, que nous visitâmes le lendemain, je vis deux hommes à la peau
couleur de marron. Ragnar m’expliqua par la suite qu’ils venaient du Blaland,
sans pouvoir me situer cette contrée. Ils portaient d’épaisses robes et des
épées recourbées, et parlaient à un marchand d’esclaves dont les locaux étaient
bondés de captifs angles qui allaient être envoyés dans ce mystérieux Blaland.
    — Vous trois, vous appartenez à quelqu’un ? nous
demanda le marchand, ne plaisantant qu’à moitié.
    — Au jarl Ragnar, rétorqua Brida, et il sera heureux de
te rendre visite.
    — Présente mes respects à sa seigneurie, dit le
marchand qui cracha et nous suivit du regard.
    Nous restâmes à Lundene pendant des semaines. La Grande
Armée n’était toujours pas au complet. Certains clamaient que nous attendions
trop longtemps, que les Saxons allaient en profiter pour se préparer, mais
Halfdan tardait toujours.
    — Nous n’attendons pas le printemps, m’apprit Ragnar,
mais le cœur de l’hiver.
    — Pourquoi ?
    — Parce qu’aucune armée ne marche en hiver, dit-il avec
un regard flamboyant. Les Saxons seront donc chez eux, auprès du feu, à prier
leur misérable dieu. Et au printemps, Uhtred, toute l’Anglie sera nôtre.
    Nous travaillâmes donc durant le début de l’hiver. Je charriai
du bois de chauffe et lorsque je n’allais pas chercher des bûches dans les
forêts au nord de la ville, j’apprenais l’art de l’épée. Ragnar avait demandé à
Tokki, son nouveau capitaine, de me l’enseigner, et c’était un bon maître. Il
me regarda répéter les bottes les plus simples, puis il me conseilla de les
oublier.
    — Dans un mur de boucliers, dit-il, c’est la sauvagerie
qui l’emporte. Prends ceci.
    Il me tendit une spathe à lame fort épaisse. Je méprisais
cette arme, plus courte que Souffle-de-Serpent et beaucoup moins belle, mais
Toki me persuada que dans le mur de boucliers, une lame courte était
indispensable.
    — Tu n’as pas la place pour frapper de taille, dans un
mur de boucliers, mais tu peux porter d’estoc, et une lame courte exige moins
de place dans un combat rapproché. Tu peux t’accroupir et frapper vers le haut,
à l’entrecuisse. (Il me prit à son côté, arma Brida d’un bouclier en lui
faisant jouer l’ennemi et lui porta un coup par le dessus. Instinctivement,
elle leva le bouclier.) Vois ! s’écria-t-il en me désignant le bouclier
levé. Ton camarade oblige l’ennemi à lever sa garde et tu peux atteindre
l’entrecuisse.
    Il m’enseigna une dizaine d’autres bottes et je les répétai
en y prenant plaisir. Plus je m’entraînais, plus je croissais en habileté et
force.
    Nous nous entraînions généralement dans l’arène romaine.
C’est ainsi que Tokki appelait ce lieu, une « arène ». Ni lui ni moi
ne savions ce qu’il signifiait, mais c’était un endroit étonnant, même pour
cette ville si fertile en merveilles. Imaginez un espace circulaire, aussi
vaste qu’un champ, entouré d’immenses gradins de pierre au mortier rongé par
les herbes folles. Les Merciens, comme je l’appris par la suite, y tenaient
leurs débats publics. Selon Tokki, les Romains y donnaient des combats à mort.
Peut-être était-ce encore l’une de ses légendes incroyables…
    Yule arriva. Le festin d’hiver fut donné et l’armée vomit
dans les rues. Nous ne nous étions toujours pas mis en route,

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