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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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disparu.
    J’appris plus tard, beaucoup plus tard, que c’était en effet
mon oncle. Je sus aussi que ses hommes étaient revenus durant la nuit pour lui
offrir une sépulture chrétienne. Et peut-être est-ce vrai aussi. Ou bien
Æthelwulf siège au festin d’Odin.
    Mais nous étions toujours affamés. Aussi était-il temps
d’aller prendre ses vivres à l’ennemi.
     
    Pourquoi me battais-je pour les Danes ? Toutes les
existences sont empreintes de questions et celle-ci me hante toujours, bien
qu’en vérité il n’y eût nul mystère. Pour mon jeune esprit, l’unique autre possibilité
était d’être enfermé dans un monastère et d’apprendre à lire. Offrez un tel
choix à un garçon et il préférera se battre pour le diable plutôt que gratter
parchemin ou tablette d’argile. Et puis il y avait Ragnar, que j’adorais.
Celui-ci envoya ses trois vaisseaux de l’autre côté de la Temse chercher la
paille et l’avoine dans les villages merciens. Ils trouvèrent juste ce qui
suffisait, si bien que lorsque notre armée s’ébranla vers l’ouest, nos chevaux
étaient dans un état raisonnable.
    Nous marchions sur Æbbanduna, une autre ville frontière sur
la Temse entre Wessex et Mercie, et, selon notre prisonnier, c’était l’endroit
où les Saxons avaient entreposé leurs vivres. En prenant Æbbanduna, nous
affamions l’armée d’Æthelwulf, le Wessex tombait, l’Anglie disparaissait et
Odin triomphait.
    Il y avait d’abord un détail à régler : défaire l’armée
saxonne. Nous n’attendîmes que quatre jours après notre victoire à Readingum
pour nous mettre en route. Rorik, de nouveau malade, demeura avec la petite
garnison qui restait pour veiller sur nos précieux navires, ainsi que les
nombreux otages, comme les jumeaux merciens Ceolbehrt et Ceolnoth.
    Le reste de l’armée avançait à pied ou à cheval. J’étais
parmi les plus âgés des garçons qui accompagnaient l’armée ; notre tâche
consistait à porter les boucliers de rechange, car il s’en abîmait beaucoup
dans les combats.
    Brida nous accompagna elle aussi en croupe derrière Ravn, et
pendant un moment je marchai à côté d’eux, en écoutant Ravn déclamer les
premiers vers d’une ode intitulée « La Chute des Saxons de l’Ouest ».
Pour l’heure, il n’en était qu’à l’énumération de nos héros et à la description
des préparatifs de la bataille, lorsque le sinistre jarl Guthrum, arriva à
notre hauteur.
    — Tu sembles en belle santé, dit-il à Ravn, d’un ton
qui laissait entendre que cela ne durerait pas.
    — Je ne peux voir si elle est belle, je suis aveugle,
ironisa Ravn.
    Guthrum, drapé dans son manteau noir, contempla la rivière.
    — Qui sera roi de Wessex ? demanda-t-il.
    — Halfdan ? proposa malicieusement Ravn.
    — C’est un grand royaume, répondit Guthrum d’un ton
morne. Un homme plus âgé serait mieux venu. (Il me jeta un regard mauvais.) Qui
est-ce ?
    — Tu oublies que je suis aveugle, dit Ravn. Je ne sais
de qui tu parles. Ou bien me demandes-tu quel homme plus âgé devrait être fait
roi ? Moi, peut-être ?
    — Non, non ! Le garçon qui mène ton cheval. Qui
est-ce ?
    — C’est le jarl Uhtred, répondit cérémonieusement Ravn,
et il comprend que les poètes sont suffisamment importants pour que leurs
chevaux soient menés par un jarl.
    — Uhtred ? Un Saxon ?
    — Je suis un Dane, répondis-je.
    — Et un Dane, précisa Ravn, qui a trempé sa lame à
Readingum. Dans le sang saxon, Guthrum.
    C’était une pique, car les hommes en noir de Guthrum ne
s’étaient pas joints à notre sortie.
    — Et qui est la fille en croupe sur ton cheval ?
    — Brida. Qui un jour sera scalde et sorcière.
    Guthrum ne trouva rien à répondre, puis revint à sa première
préoccupation.
    — Ragnar désire-t-il être roi ?
    — Ragnar veut tuer, répondit Ravn. Mon fils a peu
d’ambition : écouter des plaisanteries, résoudre des énigmes, s’enivrer,
donner des bracelets, coucher avec des femmes, ripailler et retrouver Odin.
    — Le Wessex a besoin d’un homme fort, dit Guthrum d’un
ton évasif. Un homme qui sait gouverner. Nous sommes victorieux, Ravn, mais
nous ne finissons point notre tâche.
    — Et comment le ferons-nous ? demanda Ravn.
    — Avec d’autres hommes, d’autres navires, d’autres
morts.
    — Des morts ?
    — Qu’on les tue tous ! s’exclama soudain Guthrum.
Jusqu’au dernier ! Qu’il ne reste nul Saxon en

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