Le dernier templier
retourna vers Reilly, qui bataillait ferme avec la pierre tombale. D’un signe du doigt, il lui montra le bas. Elle vit qu’il y avait assez d’espace pour que sa main se faufile à l’intérieur.
Elle tendit le bras avec un tressaillement en repensant soudain à un vieux film dans lequel la main d’un plongeur était attrapée par la gueule d’une anguille. Essayant de toutes ses forces de se sortir cette image de la tête, elle introduisit la main à l’intérieur de la tombe. Fermant ses oreilles et son esprit aux craquements retentissants et à la fragilité des murs qui les entouraient, elle tâtonna. Puis ses doigts sentirent quelque chose. Cela avait l’air volumineux. Ses yeux implorèrent Reilly, le pressant de soulever un peu plus la stèle pour avoir davantage de latitude. Il glissa sa main sur la barre pour avoir une meilleure prise et laissa échapper de son embout un gros bouillonnement de bulles en poussant de toutes ses forces pour élargir l’ouverture. Tirant sur l’objet, Tess essaya de le faire sortir sans l’endommager.
Reilly appliqua une ultime pression et la pierre se souleva assez pour permettre à l’objet de sortir. Cela ressemblait à un sac de cuir avec une longue lanière. A l’intérieur, il y avait quelque chose qui paraissait lourd, dur et massif. À peine Tess l’avait-elle extrait du trou que la barre de fer cassa net. La pierre tombale rebascula. Frôlant le sac, elle cogna la cavité avec un écho sourd dans un gros nuage de vase. Du dessus, un autre craquement fut suivi par un bruit de frottement de pierres. Le sommet de la colonne glissait sur sa base en entraînant le pan de toit situé juste au-dessus. Tess et Reilly échangèrent des regards pressants et se hâtèrent de repartir vers le porche. Mais quelque chose retint la jeune femme en arrière. Le sac était coincé. Sa sangle était restée sous la pierre tombale.
Tandis qu’elle tirait sur la lanière, Reilly fouillait des yeux le sol de l’église afin de trouver autre chose pour faire levier.
Mais il ne vit rien. Les débris pleuvaient de plus en plus sur eux. Ils atterrissaient dans un nuage de vase qui s’épaississait de seconde en seconde. Tess tira encore sur la sangle. Les yeux effrayés de Reilly croisèrent ceux de sa compagne et elle secoua la tête. C’était inutile. L’église allait s’effondrer autour d’eux. Ils devaient sortir au plus vite, ce qui signifiait qu’il allait leur falloir abandonner le sac. Les doigts de l’archéologue étreignaient encore le cuir usé. Elle ne voulait pas renoncer.
Reilly revint en hâte. Il plongea et passa ses doigts le long du bord de la dalle. Puis il plaça ses jambes de chaque côté et tira dessus dans une ultime tentative. Le rocher bougea imperceptiblement, mais ce fut suffisant pour libérer la lanière. Reilly laissa retomber la pierre, montra le porche du doigt et ils filèrent dans sa direction à grands coups de palmes. Des morceaux de toit s’abattaient autour d’eux. Pour les éviter, ils zigzaguèrent entre les piliers et les pierres qui dégringolaient. Enfin, ils franchirent le porche et se retrouvèrent dans l’eau plus claire.
Pendant quelques instants, ils restèrent à flotter sans bouger et à regarder l’église s’écrouler sur elle-même. D’énormes portions de maçonnerie s’écrasaient dans une rafale tourbillonnante d’eau trouble. Consciente que leurs réserves d’air étaient limitées et qu’une longue ascension les attendait, Tess se concentra afin de ralentir sa respiration. Baissant les yeux sur le sac, elle se demanda ce qu’il contenait et si c’était encore intact après toutes ces années. Elle espéra que l’exposition à l’eau ne l’avait pas détruit. En jetant un regard d’adieu au puits, elle laissa son esprit s’envoler vers Aimard et cette nuit fatale.
Reilly fixait la jeune femme. Leurs regards se croisèrent. Même à travers son masque, l’euphorie de l’archéologue était manifeste. Elle consulta sa montre. Leurs bouteilles allaient bientôt être vides. Elle pointa son doigt vers le haut. Alors ils entamèrent leur lente remontée en prenant garde de ne pas aller plus vite que les bulles s’échappant de leurs détendeurs.
L’eau devenait plus claire à mesure que les nuages de poussière virevoltants s’éloignaient derrière eux. La remontée semblait ne jamais vouloir finir quand, enfin, la lumière commença à percer à travers l’eau. Comme elle levait les
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