Le dernier templier

montagne, il décida de prendre le risque. Bondissant de son abri, il se précipita derrière le pick-up qui s’éloignait.
    Deux autres balles trouèrent l’aile de la Toyota au moment où, près de la sortie de l’enceinte, l’agent spécial agrippait son hayon arrière. Le pick-up emboutit l’un des poteaux de la porte avant de s’engager sur la piste rocailleuse. Les jambes traînant sur le sol rude, Reilly était suspendu à l’arrière du véhicule. Ses doigts lui faisaient déjà mal. Soudain, sa jambe gauche heurta une roche protubérante. La douleur remonta dans toute sa colonne vertébrale comme une aiguille chauffée à blanc. Chaque muscle de son corps était en feu. Il sentit qu’il allait lâcher.
    Mais il ne le pouvait pas.
    Tess était dans le véhicule. Il ne pouvait pas la perdre. Pas ici, pas maintenant.
    Malgré la douleur, serrant les dents, il trouva la force de redresser la tête. Il aperçut une poignée sur la face intérieure de la paroi latérale du plateau. Dans un extraordinaire effort de volonté, il fit appel aux dernières parcelles d’énergie qui lui restaient pour appliquer une poussée sur le sol de ses jambes pendantes, tout en plongeant pour attraper la poignée avec sa main gauche. Ses doigts lâchèrent le hayon. Il agrippa la poignée, tira dessus et parvint à se hisser puis retomba sur la plate-forme.
    Le Turc était presque couché le long de la paroi latérale, étreignant son fusil et regardant anxieusement par-dessus le flanc du pick-up. Il se tourna et vit Reilly monter à bord. Paniqué, l’homme fit pivoter son arme vers lui, mais l’Américain attrapa le canon et le détourna vers le haut. Une détonation partit et il sentit le recul de l’arme entre ses doigts. Lançant sa jambe droite, il décocha un violent coup de pied dans les parties génitales de son adversaire avant de se jeter sur lui. Tout en luttant, Reilly remarqua un détail du coin de l’oeil et se dressa à demi pour regarder par-dessus la cabine du véhicule. A moins de cent mètres, un Landcruiser beige était arrêté en travers du sentier poussiéreux et leur barrait le passage. Le Turc le vit aussi. Mais le moteur de la Toyota ne ralentissait pas. Vance n’entendait pas faire marche arrière. À travers la vitre de la cabine, les yeux de Reilly croisèrent ceux de la jeune femme. Elle semblait terrorisée. Tendant les bras en avant, elle se cramponna au tableau de bord.
    De leur côté, sans se concerter, les deux lutteurs observèrent une trêve pour s’accrocher au sommet de la cabine, sans lâcher le fusil. Le véhicule s’écarta de la piste. Cahotant sur le sol rocheux, il se faufila de justesse entre le flanc de la montagne et le Landcruiser arrêté, qu’il heurta violemment à l’avant dans une explosion de verre et de plastique. La Toyota était passée et poursuivait sa course.
    Reilly regarda derrière lui. Le 4 x 4 paraissait trop endommagé pour être encore d’une quelconque utilité au tireur embusqué. Puis le Turc chauve se remit à tirer sur son fusil pour le reprendre à l’Américain. Tandis qu’ils luttaient, le véhicule atteignit le bord du barrage et s’engagea dessus sans ralentir.
    Il fonçait sur la chaussée de béton pour se précipiter vers l’autre extrémité de l’ouvrage. Debout, Reilly frappait son adversaire sans interruption. Il réussit à lui arracher le fusil, mais l’homme en profita pour se jeter sur lui et l’étreindre entre ses bras. Il était d’une force étonnante pour sa carrure et le secouait violemment. Comme ils étaient trop proches pour qu’il puisse utiliser ses genoux, Reilly lui décocha un coup de pied dans la cheville droite. L’étreinte de l’homme se desserra et l’agent fédéral parvint à le repousser. Ils étaient maintenant tous les deux debout contre la cabine.
    Sean eut le temps d’entrevoir Tess qui luttait avec Vance pour le forcer à s’arrêter. Elle mit la main sur le volant et le pick-up fit une embardée. Il heurta le mur de soutènement. Sous l’effet du choc, Reilly lâcha le fusil, qui glissa sur le plateau et alla s’écraser sur la chaussée. L’agent du FBI surprit le regard effrayé du Turc, désormais privé de son arme. Affolé, l’homme de main se jeta sur lui sans réfléchir. Réagissant à l’instinct, l’Américain se laissa rouler sous son adversaire en pleine course. Il lui souleva les pieds au moment où le véhicule lancé à toute vitesse cognait à nouveau le muret