Le dernier templier
un son derrière elle. Pas des rats cette fois, ni son poursuivant. Non, ce qu’elle entendit ressemblait au grondement d’un train.
« Bon sang, je suis dans le métro ! »
Une faible lueur vacillante rebondissait contre les murs. Le train crissant approchait. Progressivement, les rails s’éclairaient sur le sol. Elle se mit à courir désespérément, sans jamais perdre de vue le rail sous tension pour ne pas s’électrocuter, en espérant que la rame ne la heurterait pas. Le train arrivait à toute allure. Son vacarme rythmé se répercutait contre les parois du tunnel.
Il l’avait presque rejointe quand le relief d’une étroite cavité dans le mur apparut dans les lumières des phares : elle s’y jeta. En se plaquant dans l’espace incurvé, elle vit le train passer à pleine vitesse à quelques centimètres à peine de son corps tremblant. Le coeur emballé, elle se protégea le visage de ses bras.
Malgré ses yeux fermés, elle percevait sur le fond de ses paupières les flashs de lumière stroboscopique du train qui défilait devant elle. L’air chaud et saturé de suie la giflait, couvrant les moindres parcelles de son corps et s’immisçant dans sa bouche et ses narines. Elle se plaqua encore davantage contre le mur. Le bruit assourdissant neutralisait ses autres sens. Les dernières lumières s’évanouirent.
Elle n’avait pas encore rouvert les yeux. Un crissement strident déchira l’air. Les freins du train mordaient les roues dans une gerbe d’étincelles. Les battements de son coeur retentissant à ses oreilles, Tess sentit un immense soulagement l’envahir.
« Une station. Je dois être près d’une station. »
Elle rassembla ses ultimes réserves d’énergie et parcourut les derniers mètres en titubant. Le train redémarrait déjà quand elle surgit dans la lumière vive et se hissa sur le quai. Les passagers disparaissaient dans les escaliers. Si quelqu’un la vit, personne ne réagit.
Pendant un moment, Tess resta là, seule, à quatre pattes au bord de la plate-forme, le coeur battant encore à se rompre, de peur et d’épuisement. Puis, trempée, empestant et toujours tremblante, elle se releva.
Exténuée, ne sentant plus ses jambes cotonneuses, elle suivit le flux des passagers pour remonter vers la civilisation.
38
Enveloppée dans une couverture, une grande tasse de café brûlant entre les mains, Tess était assise dans la voiture de Reilly, de l’autre côté de la chaussée, face à la station de la 103 e Rue. Elle frissonnait. Le froid avait pénétré ses vêtements trempés. De la taille aux pieds, elle était frigorifiée.
Reilly lui avait proposé de l’emmener directement à l’hôpital ou de la ramener chez elle, mais elle avait répondu qu’elle était indemne et n’avait pas besoin de rentrer chez elle. Elle avait la conviction de devoir d’abord l’informer de ses découvertes.
Tout en observant les allées et venues des équipes de police qui entraient dans la station, elle lui raconta ses démêlés avec Vance. Pour se faire comprendre — et être certaine de ne pas perdre elle-même le fil de sa réflexion —, elle reprit tout depuis le début : Clive lui avait suggéré d’aller consulter le professeur, elle avait déjà rencontré Vance des années auparavant, elle avait saisi sa chance au cimetière en espérant qu’il allait l’aider à trouver un lien avec ce qui s’était passé au Met...
Elle rapporta tout ce qu’il lui avait raconté à propos de sa femme morte en couches et de la responsabilité qu’il imputait au prêtre. Elle n’oublia pas de mentionner que l’universitaire avait affirmé vouloir « remettre le monde en ordre », ce qui parut intriguer l’agent fédéral.
Tess continua avec l’histoire du templier mourant et du moine dont les cheveux avaient brusquement blanchi. Puis elle revint en arrière pour expliquer comment Vance lui avait tiré dessus, comment elle s’était retrouvée dans la cave, avant que quelqu’un vienne les interrompre. Elle parla de l’échange de coups de feu qu’elle avait entendu avant de finir par le récit de sa fuite.
Tout en parlant, elle imaginait les équipes déployées dans les différentes galeries, cherchant Vance dans ce cauchemar souterrain. Il y avait de grandes chances pour qu’il ait filé depuis longtemps. Le souvenir des tunnels la fit frissonner. Ce n’était pas un endroit qu’elle avait envie de revisiter et elle espérait qu’on
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