Le dernier vol du faucon
s'emparer du pays pour placer sur le trône un roi fantoche. Petraja exige la preuve que nous ne consentirons jamais à une telle situation. Il assure qu'il n'en veut qu'au seigneur Phaulkon et non à la France avec laquelle il souhaite au contraire développer des relations diplomatiques. Il pense que le Barcalon est derrière tous ces malentendus et espère qu'il n'a agi que pour son propre compte. »
Beauchamp fit une pause. «Franchement, je ne crois pas un mot de tout cela, reprit-il, le visage grave. Il est en effet avéré que le général Petraja a un contentieux personnel avec le seigneur Phaulkon.
- Il s'agit bien entendu d'une supercherie, Général! s'exclama Nellie en se tournant vers lui. Tout le monde sait que Petraja hait les farangs.
- Et le roi dans tout cela? interrogea Desfarges, ignorant sa remarque.
- On ne nous a pas autorisés à le voir mais de Bèze nous a dit que Sa Majesté était inconsciente et ignorait donc les récents événements. Il semblerait que le supérieur de Louvo ait fait croire à la population que le souverain, trop malade pour exercer le pouvoir, avait nommé Petraja régent. Cela expliquerait qu'il n'y ait pas d'entraves à sa présence dans le Palais.
- Mais je croyais que le roi avait donné l 'ordre de l'arrêter!
- Petraja s'est arrangé pour faire croire que cet ordre n'était le fruit que d'un délire du roi, expliqua Beauchamp.
- Comment ose-t-il garder mon fils en otage ! » tonna Desfarges qui semblait se désintéresser totalement du sort de Phaulkon. Il posa les yeux sur Fretteville. « Eh bien, Lieutenant, vous n'avez encore rien dit. Qu'en pensez-vous ?
- Je crois que le roi est mort, Général, et que Petraja contrôle tout. Autant que j 'aie pu en juger, les gardes du Palais semblent tous lui obéir.
- Général, intervint Nellie d'une voix douce, je sais de façon certaine que Petraja ne redoute que vous. Il garde votre fils en otage pour vous mettre à l'épreuve. Seule une démonstration de force... »
Le général se retourna vivement vers elle et lui coupa la parole : « Madame, il s'agit de questions mili-taires qui ne vous regardent pas. Quand je désirera i connaître votre opinion, je vous la demanderai. J2 n'ignore pas que le père de votre enfant est retenu prisonnier, mais un officier français a été enlevé. Nous devons établir nos priorités.» Il lui tourna le dos e s'adressa de nouveau aux autres. «Quelle est votre position, Major?»
Nellie avait souvent remarqué à quel point le général se fiait à l'avis de ses officiers et elle jugea préférable de se taire. S'opposer à lui n'aurait guère servi la cause de Phaulkon.
Desfarges se montrait exclusivement préoccupé par le sort de son fils, comme elle-même l'était en ce moment par celui de Mark. Qui allait veiller sur lui? Il lui fallait regagner Louvo dès que possible. Nellie eut une brève défaillance en songeant que les deux hommes qui comptaient le plus dans sa vie se trouvaient en grand danger. Elle allait attendre la fin de cette discussion pour savoir ce qui en sortirait puis elle partirait. Si Desfarges envoyait un messager à Louvo. elle pourrait demander à l'accompagner car elle n'avait guère envie de refaire un voyage de deux à trois jours sur un transport public.
«Je pense que Petraja bluffe, Général, reprit Beau-champ. Tout comme Mrs. Tucker, j'estime qu'une démonstration de force est nécessaire et que nous ne devons pas céder à la première pression exercée sur nous. Il faut lui faire comprendre que s'il désire réellement l'amitié de la France, il doit relâcher immédiatement - et sans condition - le jeune Desfarges et le seigneur Phaulkon. Sinon, nos canons ouvriront le feu et l'armée française marchera sur Louvo pour y exercer de terribles représailles. »
Nellie fut soulagée par cette déclaration mais garda ses pensées pour elle. Encore indécis, le général se racla la gorge.
«D'accord avec vous pour une démonstration de force, Major. Personne ne peut s'en prendre impunément à la France. Mais je ne crois pas que nous devrions inclure le seigneur Phaulkon dans nos négo-ciations. Petraja n'a-t-il pas souligné qu'il s'agissait d'un conflit personnel entre lui et le Barcalon et non d'une provocation intentionnelle contre la France? Je ne suis pas certain que nous ayons intérêt à continuer à soutenir la cause de Phaulkon. »
Le cœur de Nellie défaillit et elle se mordit la lèvre.
«Général, insista
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