Le Druidisme
rêve, sans le dire, puisqu’ils
refusent la distinction aristotélicienne [334] entre
le réel et l’imaginaire. Il n’y a ni vraisemblable, ni invraisemblable, puisque
tout est possible. Qu’il soit naturel, qu’il soit provoqué par des techniques
appropriées, par des produits hallucinogènes ou par des breuvages enivrants, le
rêve est une donnée fondamentale du druidisme comme du chamanisme. Le rêve
rééquilibre le monde, il régénère l’individu, il lui donne les moyens de
dépasser sa condition humaine et de trouver les chemins, parfois obscurs, qui
conduisent au pont. Là, le rêve ne suffit peut-être plus, et il sera nécessaire
de posséder quelques formules efficaces pour mettre en fuite les démons qui
gardent le pont. Mais le rêve permet en tout cas de s’orienter vers le but à
atteindre. Et sur le plan strictement quotidien, le rêve, avec la possibilité
d’imaginer qu’il comporte, est la méthode la plus sûre pour découvrir quelque
chose de nouveau. Toute invention est le résultat d’un rêve. Toute invention
est la preuve que ce qui n’est pas réel peut, sous certaines conditions,
devenir réel. Tel est le but du chamanisme. Tel semble le but du druidisme. Il
y a trop de concordances pour que la parenté entre les deux systèmes soit
illusoire ou superficielle. Cette parenté est profonde, et ne pas le
reconnaître témoignerait d’un aveuglement certain.
8) LE NÉO-DRUIDISME
Il existe actuellement peut-être un million de personnes, dispersées
à travers le monde entier, principalement en Europe, en Amérique et en
Australie, qui prétendent être druides, ou affiliées à des ordres ou confréries
druidiques. Il faut le savoir, et il est nécessaire d’en parler.
Ces confréries sont très nombreuses, très variées et souvent
opposées les unes aux autres, tant par la doctrine, le rituel et les buts réels
que par l’origine sociale des participants. Rares sont celles qui sont purement
druidiques, les unes admettant une double appartenance, notamment au
catholicisme, à l’orthodoxie et aux différentes églises protestantes, les
autres relevant davantage des loges maçonniques que d’une tradition druidique
authentique. Le plus grave est que chacune de ces confréries prétend détenir
cette tradition. Mais, visiblement, elle n’est pas la même pour tout le monde.
Tout le monde admet qu’il n’y a pas de textes écrits
officiels révélant cette authentique tradition druidique. C’est d’ailleurs très
commode : chacun peut ainsi faire valoir qu’il est l’héritier d’une
tradition transmise oralement depuis des siècles et recueillie par lui. Le
malheur, c’est que nous ne sommes pas obligés de le croire : il serait
tout à fait superflu de demander aux druides qui prétendent descendre d’unefiliation orale la moindre preuve de cettefiliation, puisque, par définition, il n’y a aucune
preuve. On voit ainsi que les portes sont ouvertes sur l’infini. Le rêve étant
une des caractéristiques de la mentalité celtique, tout cela est donc dans une
tonalité celtique, c’est incontestable. Encore faudrait-il s’y reconnaître.
On peut classer ces confréries druidiques [335] en quatre catégories principales. La première est la lignée de John Toland
(1669-1722), Irlandais catholique, qui fonda son ordre le 22 septembre 1717. Il
s’agit d’un mouvement assez contestataire, connu actuellement sous
l’appellation de Druid Order , dont les
tendances paganisantes du fondateur ont été tempérées par des modifications
apportées par des Anglicans. On y chercherait en vain du druidisme pur, si tant
est que celui-ci existât encore. L’influence du célèbre poète William Blake,
qui fit partie de l’Ordre, paraît très importante sur cette branche druidique
nettement ésotérique, aux allures de société secrète. La deuxième lignée est
celle d’Henry Hurle, qui fonda, en 1781, l’ Anciens Order
of Druids . Henry Hurle a donné à cette confrérie une coloration
maçonnique assez visible (il était charpentier), ainsi que des préoccupations
humanitaires, en particulier pour ce qui concerne le mutualisme et la
prévoyance sociale. William Blake aurait fait partie, aussi, de ce groupe. Le
rituel semble en tout cas très inspiré par la maçonnerie écossaise.
La troisième lignée est celle de Iolo Morganwg, de son vrai
nom Edward Williams, ouvrier maçon né en 1747 dans le comté de Glamorgan, au
Pays de Galles. Cet autodidacte
Weitere Kostenlose Bücher