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Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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certaines façons de
penser et de raisonner sur l’Au-Delà ?
    Nous avons dit que, jusqu’au début de ce siècle, on croyait
que tout ce qui était avant les Romains appartenait aux Gaulois, c’est-à-dire
aux Celtes. C’est en ce sens que la tradition populaire faisait des dolmens et
des menhirs des monuments druidiques. Or, à la fin du XVIII e  siècle, on voit surgir de bien étranges
thèses sur l’origine du druidisme.
    Il faut dire que cette époque a manifesté pour les druides
et tout ce qui concerne les Celtes un intérêt qui frise la passion subite et
irréfléchie. L’écossais Mac Pherson « découvrait » la plus ancienne
poésie erse (= gaélique) grâce à laquelle il composa ses chants ossianiques, best-seller qui influença toute la génération
romantique, quand bien même la forgery (le mot
anglais s’impose) ne pouvait faire de doute. Le gallois Iolo Morganwg
« révélait » une tradition bardique oubliée depuis des siècles,
reconstituait un rituel druidique, à vrai dire plus intellectuel et culturel
que cultuel, et fondait véritablement le néo-druidisme. Forgery encore, mais qui eut une influence considérable.
Les Bretons La Tour d’Auvergne (le premier grenadier de l’Empire) et Le Brigant
considéraient la langue celtique comme la langue-mère de toute l’humanité et
affirmaient sans rire que le breton avait dû être parlé par Adam et Ève au
Paradis Terrestre. Le plus beau, c’est que leurs lecteurs ne riaient pas non
plus. La porte était ouverte, par laquelle Hersart de la Villemarqué allait
retrouver « miraculeusement » des chants druidiques dans le folklore
armoricain de son époque. Dans ce contexte qui mettait en valeur l’apport de
l’Occident dans la civilisation, face à un Orient qu’on avait toujours cru la
source absolue de toute aventure humaine, il était normal qu’on s’intéressât au
druidisme et qu’on lui donnât une origine occidentale.
    C’est ce que fit Fabre d’Olivet. Cet étonnant personnage,
héritier des Encyclopédistes, à la fois philosophe, mythographe – et mythomane
–, historien et moraliste, prétendit avoir découvert des documents (qu’il ne
montra jamais, pas plus que Mac Pherson, Morgannwc et la Villemarqué) qui
prouvaient que le druidisme était issu de la religion la plus ancienne de
l’Occident [43] . Il
alla même plus loin, racontant froidement les démêlés – quelque quatre mille
ans avant notre ère – d’un jeune druide du nom de Ram avec des sectes hérétiques,
notamment de sauvages « druidesses » assoiffées de sang. Ce Ram,
d’après Fabre d’Olivet, préféra s’exiler plutôt que de combattre ses frères et
sœurs : suivi de quelques fidèles, il émigra vers l’Orient et se retrouva
bientôt en Inde où il s’établit et où il prêcha sa religion, laquelle perdure
encore. On aura compris : Ram n’est autre que le Rama indien, et
l’hindouisme est ce qui nous reste d’un druidisme pur et dur. Pourquoi n’y
avait-on pas pensé plus tôt ?
    Fabre d’Olivet ne cite jamais ses sources. Il en aurait été
d’ailleurs bien incapable. Se retranchant derrière des traditions secrètes
auxquelles il aurait eu accès, il joue sur le mystère, comme tout bon
hermétiste qui se respecte, puisqu’il y a des secrets qu’on ne peut dévoiler
qu’avec prudence. Au fond, Fabre d’Olivet connaissait parfaitement le code de
déontologie du journaliste professionnel digne de ce nom. Il serait bon de
relire ce qu’écrivait en 1879 Fustel de Coulanges à propos de Iolo Morganwg
dont Le Mystère des Bardes venait d’être
traduit en français, dans une traduction d’ailleurs très approximative.
« Qu’un homme paraisse et nous dise : voici une suite de sentences ;
c’est moi qui vous les présente le premier, mais elles ne sont pas de moi,
elles sont vieilles de vingt siècles et elles constituent une antique doctrine
religieuse ; il est vrai que je ne puis vous montrer dans l’histoire
personne qui ait professé cette religion depuis quinze siècles, ni dans les
livres aucune ligne qui contienne le moindre indice de cette doctrine ;
mais il n’importe ; elle est très ancienne et je la tiens des druides par
une tradition non interrompue. Si l’on nous dit cela, sommes-nous tenus d’y
croire ? » [44] .
Fustel de Coulanges a toujours péché par excès de rationalisme, mais il est des
cas où rationalisme est simplement synonyme de « bon sens ».
    Cela n’aurait pas

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