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Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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été si grave, et l’on aurait considéré
Fabre d’Olivet comme un de ces esprits originaux qui foisonnent dans
l’histoire, s’il n’avait pas eu une postérité douteuse. Après tout, son récit à
propos du druide Ram est un excellent scénario d’épopée ou de film à grand
budget, et cela aurait pu provoquer un chef-d’œuvre. Malheureusement, cette
affirmation que le « bon » druide occidental Ram est le Rama indien, fondateur de la religion aryenne orientale, a empoisonné depuis bon nombre de générations. Et surtout le faux
mythe de Ram a été repris par Édouard Schuré dans son livre Les grands Initiés , paru en 1889 [45] .
Cet ouvrage est une sorte de bible pour ceux qui se prétendent hermétistes ou
ésotéristes comme pour tous ceux qui cherchent honnêtement à s’informer sur des
questions laissées trop longtemps dans l’ombre. Précisément, c’est au nom de
l’honnêteté qu’il est nécessaire de dénoncer la dangereuse escroquerie de cet
auteur qui passe pour un « sage » et un « initié » (on ne
nous dit d’ailleurs pas à quoi) [46] .
    Édouard Schuré n’apporte rien de nouveau à l’histoire de
Ram : il se contente de suivre aveuglément le récit de Fabre d’Olivet,
croyant celui-ci sur parole et n’ayant pas la moindre velléité de vérification.
C’est déjà grave, surtout si l’on considère que le chapitre consacré à Rama,
dans Les Grands Initiés , est celui qui ouvre
la série, et qui se présente comme une sorte de postulat fondamental dont le
raisonnement aboutit à Jésus, dernier de la lignée. Mais il y a autre chose, et
c’est plus inquiétant. Schuré est imprégné de Gobineau, et son discours à
propos des difficultés rencontrées par le druide Ram n’est pas innocent :
il y fait montre en effet d’un racisme virulent [47] ,
d’un antisémitisme évident encore que sournois [48] , et
d’un enthousiasme délirant pour la race blanche nordique [49] . Il
est inutile d’insister sur l’utilisation qui a été faite de tels écrits entre
les deux guerres mondiales, notamment outre-Rhin, ou sur l’influence qu’ils
peuvent exercer à l’heure actuelle à l’intérieur de certains groupes
intellectuels ou spirituels qui n’osent pas dire leur nom.
    L’essentiel est de savoir que l’histoire de Ram est due à
l’imagination de Fabre d’Olivet. Rien, aucun texte ou aucune tradition, ne nous
permet d’affirmer que le druidisme est d’origine occidentale et qu’il a émigré
ensuite en Inde où il s’est transformé en hindouisme. S’il y a des
rapprochements à faire – et il y en a plus d’un – entre le druidisme et
l’hindouisme, ces rapprochements sont absolument normaux et s’expliquent par la
communauté de tradition d’origine entre les Celtes et les Indiens de la plaine
indo-gangétique. Mais dire que l’hindouisme vient d’Occident, ou que le
druidisme vient d’Orient, cela constitue non seulement une contre-vérité, mais
une absurdité.
    Il fallait débroussailler ce terrain laissé trop longtemps
en friche pour y voir un peu plus clair. Faute de documents anciens, faute de
références précises, nous sommes dans l’obligation d’examiner l’origine du
druidisme dans son cadre naturel, celui où il a connu son plus ample
développement, c’est-à-dire l’Europe, et plus particulièrement l’Europe occidentale.
    Mais là encore se trouvent des pièges à éviter, dont la corrélation
établie par certains entre le pythagorisme et le druidisme. L’origine de cette
corrélation supposée est une mauvaise interprétation de certains textes de
l’antiquité classique. Ainsi, Ammien Marcellin, d’après Timagène, rapporte qu’à
côté des bardes et des devins, « les druides l’emportent par leur génie,
ainsi que l’autorité de Pythagore en a décidé » (Ammien Marcellin, XV, 9).
La phrase n’établit aucun rapport entre la science des druides et celle de
Pythagore, mais veut simplement dire que les druides avaient une science en
conformité avec la définition qu’en donnait Pythagore. Sur cette base inexacte,
d’autres auteurs plus tardifs, grecs et latins, ont brodé sur les correspondances
qui pouvaient exister entre les deux doctrines. Clément d’Alexandrie en arrive
à prétendre ( Stromata , I, XV) que Pythagore
lui-même était un « auditeur des Galates et des Brahmanes », ce qui
revient à dire qu’il était l’élève des druides [50] . Par
contre, d’autres

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