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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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lieutenant général de police, en prenait la responsabilité, déchargeant Nicolas de toute faute et de tout remords. Il l’engagea fermement à arrêter le major Langlumé, dont le ferret retrouvé aiderait certainement à prouver la culpabilité, à tout le moins aux yeux des juges.
    C’est donc le cœur léger que Nicolas reprit le chemin de Paris, après que la grande écurie l’eut pourvu une nouvelle fois d’une monture — une jument isabelle robuste et fringante. Le parcours s’effectua sans encombre ; Nicolas ne sentait plus ni sa fatigue ni sa faim. À cinq heures, il franchissait la porte de la Conférence. À la demie, il abandonnait sa monture aux bons soins du vas-y-dire de service au Châtelet. Il laissa aussitôt à sa droite les maisons du Pont-au-Change et s’engagea sur le quai de Gesvres. Ce remblai au-dessus du fleuve, porté sous une voussure, rejoignait le pont Notre-Dame. C’était un cloaque affreux où quatre égouts versaient leur fange, où aboutissait le sang des tueries et dans lequel toutes les latrines répandaient leurs immondices. Nicolas dut se mettre un mouchoir sur le nez pour éviter de respirer ces exhalaisons perfides. Les chaleurs de la saison estivale commençaient et la rivière, délestée des crues de printemps, n’arrosait déjà plus les arches fétides de ce pont. Il prit pied dans le quartier de la Cité qui demeurait encore, au grand dam de M. de Sartine, « la réunion imprévue d’un grand nombre de maisons » … Aucune n’était alignée, et leur agencement multipliait les angles, les détours et l’étranglement des issues. Les voitures avaient peine à tourner dans les rues. Nicolas traversa la place étroite du parvis de Notre-Dame et souleva le marteau d’une porte renforcée de clous et de barres de fer qui donnait accès à l’archevêché, demeure médiévale accolée à sa tourelle, située sur le flanc sud de la cathédrale.
    Un valet en livrée lui ouvrit et l’interrogea sur les motifs de sa visite. Il eut comme un haut-le-cœur quand il apprit le vœu de Nicolas de rencontrer son maître sur-le-champ. Il s’apprêtait de toute évidence à l’éconduire quand un personnage fluet en habit court de clerc sortit de l’ombre du vestibule. C’était un des secrétaires du prélat, et Nicolas ne crut pas devoir lui celer ses qualités et au nom de qui il se hasardait à venir troubler la sérénité de l’occupant des lieux.
    — Avez-vous quelque marque ou preuve de votre mission ? demanda le secrétaire.
    — J’ai deux plis à l’intention de Sa Grandeur.
    L’autre tendit la main avec la feinte innocence de celui qui risque un coup sans trop y croire.
    — Monsieur, dit froidement Nicolas, ils ne seront remis qu’en main propre à leur destinataire. Mais je consens à vous laisser entrevoir le sceau de l’un d’eux.
    Il lui montra le pli du roi scellé des trois fleurs de lys des armes de France.
    — Monsieur, reprit le secrétaire, considérez qu’il est fort tard, que vous survenez à l’improviste sans être annoncé et que Monseigneur est très fatigué des cérémonies de la Pentecôte. Aussi, je vous incite à laisser vos lettres. Je les lui remettrai demain et nous verrons ce qu’il est bon d’aviser.
    — Monsieur, je suis au désespoir, mais je dois voir l’archevêque. C’est un ordre du roi.
    Le visage fluet s’empourpra. Nicolas lisait à livre ouvert les interrogations qui se succédaient dans l’esprit de son interlocuteur. Il est vrai que Mgr de Beaumont avait déjà été exilé trois fois et qu’il était licite, dans ces conditions, de tout appréhender…
    — Il ne s’agirait pas, monsieur, de…
    Nicolas ne le laissa pas achever.
    — Rassurez-vous, monsieur, je puis vous dire qu’il n’est question que d’une affaire qui ressort du magistère spirituel de votre maître et qu’il n’est en rien menacé, si c’est cela que vous supposez.
    — Dieu soit loué ! Soit, je vais voir si Monseigneur peut vous recevoir. Il était sur le point de souper en compagnie d’un visiteur.
    Le petit clerc se retira, laissant Nicolas face à un valet maussade et soupçonneux. L’attente ne fut pas longue et on l’invita sans un mot à gravir un grand escalier de bois sombre. Au premier étage, une vaste antichambre, aux murs ornés des portraits de cardinaux et d’archevêques qu’il supposait être ceux des prédécesseurs, tenait lieu de salle d’attente. Le secrétaire gratta à l’huis

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