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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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fumée.
    — Est-ce que vous exorcisez à distance ? demanda Semacgus.
    — Nullement. Je tente d’assainir cette maison. Ensuite, nous procéderons sur la patiente.
    Il joignit les mains, et reprit :
    — Je t’adjure, démon, de sortir de ce lieu, de n’y jamais revenir, de ne plus faire peur à ceux qui y demeurent et de n’y lancer aucun maléfice. Que le Dieu tout-puissant, créateur de toute chose, sanctifie cette demeure avec toutes ses dépendances, que tout fantôme en disparaisse, toute méchanceté, toute astuce, toute ruse diabolique et tout esprit immonde.
    Il se remit à bénir la maison.
    — Par ce signe, nous lui faisons commandement de cesser à l’instant et pour toujours toutes ses vexations, que disparaissent ses prestiges et fantasmagories et qu’à jamais s’évanouisse la terreur de ce venimeux serpent. Par Celui qui viendra juger les vivants et les morts et, par le feu, purifiera le monde. Amen.
    Il semblait que, là-haut, des meubles volaient et heurtaient les murs de la maison. De grands coups sourds ébranlaient la maison.
    Le père Raccard se frottait les mains.
    — Il réagit, le bougre ! Voilà un bon préambule. Vous tous, rejoignez votre chacunière. Je vais officier là-haut en la seule présence de M. le commissaire et de M.… ?
    Il désignait Semacgus. Nicolas fit les présentations.
    — La faculté, reprit Raccard, ne sera pas de trop dans le chamaillis que va sans doute nous occasionner l’innommable. M. Le Floch m’avait signalé votre scepticisme. Soyez notre conscience raisonnable, maintenant que vous voilà convaincu de la réalité des phénomènes.
    — Vous pouvez compter sur moi, mon père, dit Semacgus avec fermeté.
    Nicolas se sentit rassuré de voir les deux hommes, l’un ami de longue date, et l’autre de connaissance plus récente, se rapprocher sans effort. Le docteur Semacgus reprit un meilleur visage et ajouta en riant :
    — Il vaut mieux chasser le loup en meute.
    — S’il ne s’agissait que d’un loup ! Mais le diable est un sinistre farceur, pétri de haine. Il se moque éperdument des pauvres humains et s’amuse à faire le patelin et l’imbécile pour mieux égarer ses victimes. Père du mensonge, son nom est légion et il veillera à tendre des pièges et à brouiller les pistes ! Mais je vous promets de lui tenir la dragée haute.
    Il ressembla ses instruments et confia le réchaud à Semacgus.
    Ils montèrent tous les trois et trouvèrent la cuisinière plaquée contre le mur du palier, qui regardait, hébétée, la Miette assise dans le vide au-dessus de sa couche, et dont les yeux rougeoyants et brillants les considéraient, un sourire méchant aux lèvres.
    — Oh ! la vilaine ! dit le père Raccard. Comptez sur moi pour lui faire passer cet air-là !
    Il s’approcha de la Miette dont le regard pétrifié le suivait, la tête tournant comme celle d’un mannequin de quintaine. Il lui posa la main sur la tête. Le corps oscillait telle une bulle de savon entre deux courants d’air. Elle se mit à geindre sourdement, comme une bête qui retiendrait sa rage.
    — Oui, oui, apprête-toi à reconnaître ton maître et à lui obéir, crois-moi.
    La Miette ouvrit la bouche et lui lança un long crachat. Sans marquer d’émotion, le prêtre s’essuya d’un revers de sa manche. Le petit corps supplicié laissait maintenant échapper une voix d’homme.
    — Frappart 84 , tu me fais rire ! Souviens-toi que tu n’as aucun pouvoir sur moi.
    Imperturbable, le père disposait une nouvelle fois le contenu de son portemanteau sur une petite table. Semacgus y posa le fourneau rempli de braises. L’odeur sacrée de l’encens emplit la pièce. Les grondements de la Miette montaient en crescendo jusqu’à des aigus assourdissants. Sa tête se courba en arrière, presque à la perpendiculaire du corps. Elle hurlait à la mort, comme pour lutter contre l’envahissement entêtant du parfum.
    — Cela n’est pas possible ! dit Semacgus. Regardez comme les muscles et les chairs se distendent.
    — Oh ! j’ai vu pire que cela, gronda Raccard. Des possédés qui s’allongeaient tellement qu’ils arrivaient à en gagner le quart de leur taille.
    — Est-ce là illusion ou faux-semblant ? Sommes-nous soumis à une influence qui nous fait prendre des vessies pour des lanternes ?
    — Que non ! Il s’agit de phénomènes inquiétants, spectaculaires, mais bien réels, devant lesquels nous devons conserver la tête

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