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Le faucon du siam

Le faucon du siam

Titel: Le faucon du siam Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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le
saint homme. Mais à quoi peut vous servir un tel enseignement? D'ailleurs, nous
étudions ici les écritures saintes en langue pâlie, et non pas en langue
royale. » Une lueur amusée brilla dans les yeux de l'abbé. « Vous n'envisagez
tout de même pas d'avoir une conversation avec Sa Majesté le roi ? »
    Le cœur de Phaulkon se mit à battre plus fort. « Chaque
aspect de ce grand pays me passionne, Votre Sainteté, et je suis convaincu
qu'une brève étude de la langue royale devrait faire partie de mon
enseignement. »
    L'abbé plissa les yeux et jaugea le farang d'un air
interrogateur. « Vous n'êtes pas un de ces prêtres chrétiens déguisés?
demanda-t-il en plaisantant à moitié. À ce qu'on me dit, ils tiennent beaucoup
à montrer à Sa Majesté le Vrai Chemin. Peut-être en apprenant la langue
royale... » L'abbé souleva son éventail au-dessus de ses yeux et dévisagea
longuement Phaulkon. Tous les moines portaient un éventail attaché à un long
bâton pour les protéger de la vue des femmes.
    Phaulkon se mit à rire. « Non, Votre Sainteté. Ma vie n'a
guère été vertueuse. Je ne serais pas un bon prêtre.
    — Et pourtant, vous étudiez pour devenir un moine
bouddhiste. Exigeons-nous bien moins de nos novices ?
    — Loin de là, Votre Sainteté. Mais, dans votre
sagesse, vous permettez à des étrangère de pénétrer dans votre temple et d'y
séjourner pour s'améliorer. Je ne fais que profiter moi-même de cette sage et
libérale coutume. »
    L'abbé tâta d'un air songeur l'ourlet de sa robe safran,
la couleur qui ressemblait le plus à l'or, symbole d'un authentique respect
pour le Bouddha. « Et c'est pour cette raison que votre religion chrétienne ne
prendra jamais racine dans notre pays, observa-t-il gravement.
    — Comment cela, Votre Sainteté?
    — Vous êtes trop dogmatiques, et trop imbus de votre
importance. Et, ajouta-t-il en souriant, trop précis. Vous définissez votre
dieu, vous donnez des noms à son fils. Nous sommes incapables de définir
quelque chose d'aussi immense, d'aussi... impénétrable. C'est pourquoi Bouddha
n'est qu'un guide, un maître qui vous montre la voie qu'il faut suivre. Car il
y a beaucoup de chemins qui mènent à Dieu, mon fils. C'est arrogance humaine de
penser autrement.
    — Mais ce que vous enseignez, Votre Sainteté,
n'est-ce pas finalement le refus? La suppression de l'émotion et des
sentiments, une fuite loin de la Roue de la vie ?
    — Si, mais il faudra des millions de cycles pour
parvenir à un tel état, et seuls quelques rares élus y parviendront. » L'abbé
sourit. « Et pensez à toutes les émotions dont vous pouvez profiter
entre-temps. » Son regard un instant se voila. « Le nirvâna est l'ultime étape
de la sérénité pour l'homme.
    — Mais n'est-ce pas aussi de l'arrogance humaine de
croire que nous renaissons sans cesse? Sommes-nous si importants, Votre
Sainteté? interrogea Phaulkon.
    — Nous n'avons guère d'importance, mon fils, car la
vie est un cycle sans fin. Comme les phases de la lune ou les mouvements des
étoiles. Tout naît, meurt et renaît. Regardez les fleurs, les arbres et tout ce
qui vous entoure. Pourquoi serions-nous différents ? Non, l'arrogance humaine,
c'est de croire qu'une seule et brève existence peut déterminer toute
l'éternité! C'est ce que notre peuple trouvera impossible à admettre dans vos
doctrines. Car il n'est guère réconfortant de penser que l'on ne nous accorde
qu'une seule chance. Mais vous, mon fils, dit l'abbé en se levant soudain, avec
votre bavardage vous retardez ma progression vers la sérénité. » Il s'apprêtait
à partir. « Je vais néanmoins vous aider et nous parlerons souvent ensemble. Il
y a ici un vieux et vénérable moine qui était proche du précédent roi. Il a
vécu quelque temps au palais. Bien sûr, il connaît parfaitement la langue
royale. Je vais voir ce que je peux faire... »
    Un grand cri tira Phaulkon de sa rêverie. Ils venaient de
prendre un tournant du fleuve au beau milieu duquel se trouvait une île boisée.
Le bruit prit de l'ampleur. À mesure qu'ils avançaient, les foules massées sur
les berges se faisaient plus denses. Puis les gens se mirent à gesticuler dans
leur direction : à n'en pas douter, ils leur faisaient signe d'accoster. Quand
la cause de toute cette agitation devint appa-rente, le capitaine du navire de
Ligor tira aussitôt sur la barre du gouvernail et mit le cap vers le rivage.
    Cinq fins esquifs de course se

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