Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le faucon du siam

Le faucon du siam

Titel: Le faucon du siam Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
Vom Netzwerk:
faire demi-tour et de
regagner directement leur port d'attache. Que dire alors de l'envoi au Pra
Klang de son « rapport » dont on le menaçait? Le gouverneur avait affirmé que
ce message partirait par courrier spécial. Mais le moyen de transport le plus
rapide pour gagner Ayuthia, c'était par mer : même si le gouverneur possédait
plusieurs petits bateaux, il n'y en avait qu'un, pour autant que Phaulkon en
fût informé, qui fût assez résistant pour entreprendre le long voyage côtier
jusqu'à la capitale, et c'était le vaisseau à bord duquel il se trouvait. Voilà
qui pourrait expliquer pourquoi le mandarin avait exigé le retour immédiat du
bateau. Sunida lui avait révélé que Son Excellence n'avait aucune raison
d'entreprendre de tels voyages en dehors de sa visite deux fois l'an pour
présenter son rapport sur l'état de sa province et boire avec le roi l'eau
d'allégeance.
    Et si son « rapport » ainsi qu'une nouvelle lettre au
Barcalon étaient partis à dos d'éléphant ? Ce counier ne parviendrait sans
doute qu'après lui à Ayuthia, mais ce n'était guère réconfortant. Dès l'instant
où le Barcalon apprendrait qu'il affirmait sans vergogne être un espion royal,
on ne manquerait pas de l'exécuter pour haute trahison. Quelle insolence sans
précédent !
    Dans ses moments de profond désespoir, Phaulkon
s'obligeait à songer au premier rapport élogieux — que le gouverneur ne pouvait
plus rattraper — envoyé au Pra Klang avant la découverte du canon : ce document
dans lequel il avait décrit les exploits de Phaulkon lors du tournoi de boxe,
la découverte de l'éléphant blanc et comment il l'avait décoré de l'ordre de
l'Eléphant blanc. Le gouverneur voudrait-il vraiment risquer le ridicule en
commençant par l'honorer pour le vilipender ensuite? Ce serait faire montre
d'un piètre jugement, sans parler du fait qu'il perdrait
    sérieusement la face. Peut-être, songea Phaulkon avec
amertume, les deux rapports, l'un chantant ses louanges et l'autre le
condamnant, parviendraient-ils simultanément au Barcalon.
    Et même si l'on commuait sa peine, maintenant que les
canons avaient disparu, quelle chance avait-il d'emplir les cales du vaisseau
de Sam White ? D'après ses calculs, il lui restait soixante-neuf jours avant le
rendez-vous, bien qu'il fût impossible de faire une estimation exacte. Le
navire de Sam pouvait avoir quelques jours d'avance ou de retard, selon les marées.
Le seul homme capable maintenant de fournir à temps la cargaison était celui
précisément qui allait fort probablement ordonner l'exécution de Phaulkon : le
Barcalon. Phaulkon devrait bluffer et se montrer aussi malin que l'homme le
plus rusé du royaume. Pourtant, malgré tout, l'espoir renaissait en lui, comme
apparemment chaque fois qu'il était au plus bas. Mais oui, il allait déjouer
les plans de cet homme, il allait libérer ses collègues retenus à Ligor,
charger le navire de Sam White et faire venir Sunida. Il réaliserait son
ambition de devenir une force dans son pays d'adoption, un intermédiaire entre
l'Orient et l'Occident, un potentat étranger dans un monde oriental. Il frappa
furieusement du poing sur le bastingage puis se retourna pour observer
l'équipage : il s'apercevait soudain qu'il n'était pas seul et qu'il n'avait
cessé de parler tout haut et de jurer bruyamment. Mais personne ne faisait
attention à lui. Tous les hommes avaient les yeux braqués devant eux. Il suivit
leur regard.
    Le bateau venait de franchir une courbe du fleuve et vers
l'avant, au loin, comme un majestueux pays de contes de fées, se dressaient les
clochers d'Avuthia, trois cents épis d'or étincelant au soleil. Tout ce que
dans sa vie Phaulkon avait pu voir en guise de beauté n'était rien auprès de
cette soudaine et splendide vision. Ayuthia, cité du paradis! Comme le nom lui
allait bien, se dit-il.
    L'île capitale était une métropole aussi grande que
Londres et plus vaste même que Paris. Les murs de
    brique qui l'entouraient entièrement traçaient dix
kilomètres de circonférence : des remparts massifs où s'ouvraient de loin en
loin des portes fortifiées, là où les canaux de la cité venaient se jeter dans
le fleuve. Tout autour de la ville s'écoulait le Menam, le même gigantesque
fleuve qui, oubliant ses humbles origines dans les jungles montagneuses du
lointain Nord, traversait majestueusement la grande plaine centrale et
encerclait la capitale d'Ayuthia avant de rejoindre en serpentant le

Weitere Kostenlose Bücher