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Le faucon du siam

Le faucon du siam

Titel: Le faucon du siam Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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faire un ami.
    À mesure qu'elle s'éloignait du palais, son boitillement
se fit de nouveau moins apparent : bientôt, elle franchit à grands pas la voûte
qui marquait l'entrée du quartier portugais, brûlant du désir de retrouver
Pedro Alvarez et sa façon brutale de faire l'amour. Elle savait qu'avec le
robuste officier portugais elle avait rencontré son égal dans les joutes
amoureuses.
    Elle avait le cœur battant en pensant à leur rencontre de
la veille. À peine avaient-ils échangé quelques civilités qu'il l'avait entraînée
dans sa chambre : elle, tout aussi décidée, lui avait fébrilement arraché sa
tunique pour enfouir ses lèvres dans la toison velue
    qui lui recouvrait la poitrine. Ces farangs étaient comme
des gorilles, se dit-elle. Et, Seigneur Bouddha, ils sentaient aussi comme eux,
malgré tous leurs efforts pour dissimuler leur odeur sous des parfums. Mais
plus forts étaient ces relents, plus cela semblait l'exciter. Devant le corps
musclé du Portugais elle s'était déchaînée jusqu'au moment où, incapable de le
supporter plus longtemps, elle s'était emparée de son énorme javelot d'amour
pour s'y empaler, prête à subir l'inévitable douleur. Car il était monté comme
un cheval et, à chaque fois, il lui faisait mal. Elle avait la sensation qu'on
lui déchirait le corps en deux jusqu'au moment où elle ne pouvait plus
distinguer ce qui était le plus exquis, du plaisir ou de la douleur.
    Avec son ensorcelant déhanchement, elle traversa les
étroites rues pavées du quartier portugais et passa devant ces étranges maisons
badigeonnées à la chaux qui n'avaient pas de pilotis. Elle voyait avec orgueil
tous les passants se retourner sur elle : les laquais de Goa à la peau sombre
et aux traits européens, de fiers soldats portugais dans leurs belles tuniques,
et même les sveltes métisses qui portaient en équilibre sur leur tête une
cruche en terre. Tous, semblait-il, jetaient un coup d'œil dans sa direction.
Était-ce sa seule beauté? Ou bien son bavard d'amant, malgré ses protestations,
setait-il vanté d'avoir fait la conquête de la concubine royale, quitte à subir
le même sort qu'elle si on les découvrait? Quoi qu'il en soit, malgré les
risques qu'elle courait, elle savourait les attentions des passants. Un moment,
elle envisagea de nouveau les terribles conséquences d'une découverte, puis
elle chassa ces pensées de son esprit. Les moments d'extase avec son brutal
amant étaient rares et inoubliables : qu'était donc la vie sans un homme pour
satisfaire ses désirs?
    Elle tourna ensuite à l'angle qui menait vers l'étroite
rangée de maisons où il habitait. Puis elle se figea sur place. Un moment, elle
resta là, pétrifiée. Ses veux lui jouaient-ils des tours? Elle cligna, mais
l'image persista. À la porte même de la maison de son capitaine, il y avait
deux hommes vêtus de l'uniforme rouge de
    la garde du palais. Ils avaient une conversation animée
avec le serviteur du Portugais. Ses jambes finirent par reprendre vie. Elle
revint sur ses pas en essayant de marcher de l'air le plus nonchalant possible.
Puis, prenant la première rue à droite, elle s'y engouffra en courant. Elle
courut, sans se soucier de la direction qu'elle prenait ni de sa douleur à la
jambe, jusqu'au moment où elle se trouva complètement perdue. Remarquant enfin
les regards curieux des passants et se rendant compte qu'elle suscitait
l'intérêt, elle reprit un pas normal. Elle s'engagea dans une large allée où
elle était sûre que personne encore ne l'avait vue.
    L'allée était bordée d'arbres et de grandes et spacieuses
maisons de brique, aux jardins entourés d'une haie de bambous. C'était
manifestement le quartier résidentiel des gens aisés. Contrairement à la
plupart des autres, une demeure était bâtie dans le style siamois, mais en bois
et avec un grand toit incurvé couvert de tuiles orange. Elle sentit qu'elle
aurait là une chance de trouver des occupants parlant siamois.
    Inquiète, elle gravit les marches de bois, tira le cordon
de sonnette et attendit, hors d'haleine, impatiente d'être à l'abri de ces
murs. Un serviteur vint ouvrir et Thepine demanda la dame de la maison. Elle
était encore essoufflée, la sueur perlait sur son visage et sur son cou. Le
domestique l'examina d'un œil méfiant. Il était très brun, avec des traits
indiens.
    « Est-ce que Madame vous attend ? demanda-t-il en siamois
avec un fort accent.
    — Dis-lui, je te prie, qu'il faut

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