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Le faucon du siam

Le faucon du siam

Titel: Le faucon du siam Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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la salle d'audience éclairaient
la scène. Phaulkon sentait tous ses nerfs tendus et il avait l'estomac crispé.
Il savait que de cet entretien dépendaient son destin, celui de ses compagnons
et l'ensemble des projets qu'il avait imaginés pour les années à venir.
    Le Barcalon se pencha pour tirer longuement sur le grand
narguilé de cuivre posé auprès de lui. L'eau glougloutait plaisamment dans la
pipe mauresque. Il exhala voluptueusement et contempla Phaulkon à travers un
nuage de fumée gris-bleu. C'était un personnage corpulent, apparemment de
petite taille, et ses courtes jambes dodues semblaient disparaître parmi les
coussins qui l'entouraient. Il portait le traditionnel panung crème de tissu
imprimé et une magnifique tunique de soie beige, somptueusement brodée d'oi
autour du col mandarin et aux parements des manches. Il était de pure race
siamoise : cheveu? noirs taillés en brosse et teint brun presque jaunâtre Son
nez aux narines évasées se creusait au centre e ses veux au regard vif
observaient Phaulkon à distance.
    « Je vois, monsieur Forcone, que vous connaissez bien nos
coutumes. Mais on me dit que les manières des Grecs ressemblent à celles des
autres farangs. Nous avons bien des sujets à discuter et je suis sûr que votre
corps n'est pas habitué à rester dans cette position pendant de longues
périodes. Vous feriez mieux de vous asseoir comme vous en avez l'habitude. »
    De nouveau, il désigna la chaise de bambou.
    Phaulkon ne broncha pas. « Puissant Seigneur, je reçois
vos ordres. Mais moi, un simple cheveu, je me sentirais mal à l'aise dans toute
autre position devant le Grand Pra Klang. »
    C'était la première phrase que Phaulkon énonçait, dans un
siamois impeccable : il lorgna subrepticement vers le Barcalon pour en mesurer
l'effet. Ce fut à peine si le potentat eut un haussement de sourcil en se
tournant pour expectorer le jus rouge de sa noix de bétel dans un crachoir de
cuivre disposé à son côté. À ses pieds, une ombre s'avança et un bras discret
se tendit pour ôter le crachoir et le remplacer par un propre.
    « Votre maîtrise de notre langue est absolument
remarquable, monsieur Forcone. Tout à fait comme me l'avait annoncé le
gouverneur. Pratiquement sans accent. Je dois vous en féliciter. Comme vous le
savez sans doute, notre langue est tonale : la plus légère inflexion peut
changer toute la signification d'un mot. Vos prêtres missionnaires n'ont
malheureusement pas pleinement compris cette subtilité et il leur arrive de
prononcer des phrases des plus comiques. Nos sujets se sont fort amusés d'un de
vos saints hommes qui confond toujours le mot signifiant buffle avec celui qui
désigne l'organe de la reproduction masculin. » Un éclat amusé s'alluma dans
les yeux du Barcalon et, quand Phaulkon se mit à rire, il en fit autant,
apparemment ravi de se trouver devant un farang capable d'apprécier ce genre de
nuances.
    « Mais, dites-moi, monsieur Forcone, comment en êtes-vous
venu à apprendre notre langue ? Après tout, vous n'êtes ici que depuis... » Il
marqua un temps : « Un an et onze jours, me semble-t-il ? »
    Phaulkon s'était laissé désarmer un instant par
l'amabilité du Barcalon ; il fut sévèrement rappelé à la conscience de son
pouvoir par la précision des faits que ce dernier énonçait.
    « J'ai surtout appris d'oreille, Puissant Seigneur, et en
m'aidant d'une grammaire établie par les Jésuites.
    — Ah, c'est vrai : les hommes de Dieu portugais sont ici
depuis longtemps. Ils ont été les premiers farangs à visiter nos rivages. Il
semble toutefois que la puissance de leur nation soit sur son déclin et que les
Hollandais les aient remplacés. » Il sourit. « Saviez-vous, monsieur Forcone,
que du temps de mon grand-père nous étions persuadés que les Hollandais étaient
des pirates des mers sans terre d'attache? Voyez-vous, les Portugais
craignaient de perdre leur influence auprès de nous : ils nous avaient
persuadés que les Hollandais étaient une tribu nomade. Notre première
délégation siamoise a mis le pied sur le sol européen il y a soixante-dix ans
seulement. Imaginez leur surprise, monsieur Forcone, en constatant que les
Hollandais avaient bel et bien une patrie, que la ville d'Amsterdam était aussi
grande qu'Ayuthia et que c'était également un centre artistique et
scientifique. » Il s'interrompit et ajouta, comme en passant : « Avec de
magnifiques peintures et des canons de la fonte la plus pure.

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