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Le feu de satan

Le feu de satan

Titel: Le feu de satan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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silencieusement un toast avant de poursuivre son récit.
    — L’attaque finale eut lieu en mai : le vacarme des engins de guerre, le fracas des boulets contre les murailles qui s’écroulaient, le grondement des incendies, les explosions soudaines... et les tambours de guerre ! Vous rappelez-vous, mes frères, le roulement continuel des tambours mamelouks ?
    — Oh, que oui ! répondit Branquier. Parfois, la nuit, étendu sur ma couche, je les entends encore.
    Il regarda ses camarades d’un air confus.
    — Je me lève alors et épie, par la fenêtre, les ombres sous les arbres. Et je me demande si Satan et ses légions ne sont pas venus me narguer.
    Odo fit signe qu’il comprenait.
    — Je défendais le rempart ouest. L’ennemi y ouvrit une brèche et déversa de l’huile qui noircit le sol et souleva un rideau de fumée. Puis, pour combler les fossés, les mamelouks y poussèrent des colonnes de bêtes de somme affolées qui y tombèrent et qu’ils achevèrent. Un pont se forma ainsi, grâce auquel ils montèrent à l’attaque des remparts. Nous n’étions plus très nombreux. J’étais épuisé, aveuglé par la fumée, mes bras étaient lourds comme du plomb.
    Il observa une pause.
    — Derrière la fumée nous parvenaient les chants des derviches et les roulements des tambours qui s’approchaient. Le premier assaut eut lieu dans la pâle lueur du petit matin : une masse d’ombres comme si l’Enfer vomissait ses cohortes de démons. Nous les repoussâmes, mais ce furent ensuite des compagnies de mamelouks en armure. Les murailles tombèrent. Nous nous repliâmes. Nous dépassâmes un groupe de moines, des dominicains. Ils s’étaient rassemblés pour chanter le Salve Regina. Nous ne pouvions pas les sauver. Tout autour de nous, des hommes mouraient sur le seuil des maisons, sur les barricades, à l’entrée des ruelles ou dans les tours en flammes.
    — Mais vous les avez arrêtés, intervint Branquier. Pendant un moment, vous les avez arrêtés !
    — Oui. Une rue menait aux quais. Tous fuyaient. C’était la débandade et les bateaux se remplissaient à toute vitesse. Avec deux douzaines de templiers – des hommes triés sur le volet –, nous défendions la dernière barricade.
    Odo se redressa. Les yeux brillants d’excitation, il sembla rajeunir.
    — Nous nous sommes battus tout l’après-midi. En chantant le Paschale Laudes, l’hymne de Pâques, jusqu’à ce que les infidèles reculent et nous promettent de nous laisser la vie sauve. Nous leur rîmes au nez. Ils revinrent à l’attaque. Des boules de feu pleuvaient sur les barricades. Et puis, tout d’un coup... les ténèbres.
    Ses épaules s’affaissèrent.
    — Lorsque je repris connaissance, j’étais sur l’un des navires de transport qui fonçaient vers la haute mer. Je n’avais plus de main gauche. Saint-Jean-d’Acre était tombé. J’appris, par la suite, qu’un seul homme avait survécu, qu’il m’avait traîné sur les marches du quai et avait trouvé une embarcation.
    La voix d’Odo trembla.
    — Parfois je regrette de ne pas avoir péri aux côtés de mes frères.
    — Ne dites pas d’absurdités.
    William Symmes vint s’agenouiller près du vieillard, son visage balafré empreint d’une certaine douceur.
    — Si vous étiez mort, souffla-t-il gentiment, nous n’aurions jamais entendu ce récit et Framlingham n’aurait pas eu son archiviste préféré.
    — Ainsi, conclut Corbett, à part le grand maître, vous étiez tous à Saint-Jean-d’Acre ?
    — Nous sommes revenus avec le reste des troupes, précisa Legrave. Chacun de nous a un poste de commandeur à présent, moi à Beverley, Baddlesmere à Londres, Symmes à Templecombe dans le Dorset et Branquier à Chester.
    — Et lors de votre chapitre général, insista Corbett pour détendre l’atmosphère, a-t-on lancé d’autres projets ? Le Temple va-t-il essayer de regagner ce qui a été perdu ?
    — En temps voulu, répliqua Jacques de Molay. Mais où voulez-vous en venir avec vos questions, Sir Hugh ?
    Il claqua des doigts et un serviteur surgit de l’ombre pour remplir leurs gobelets.
    — Peut-être n’est-ce ni le moment ni l’occasion, dit Corbett en jetant un bref coup d’oeil vers Ranulf et Maltote qui, repus, contemplaient bouche bée ces personnages étranges qui avaient été témoins de scènes qu’ils ne pouvaient même pas concevoir.
    — Balivernes ! trancha Molay. Que désirez-vous savoir ?
    — Vous

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