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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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Ah ! la place est bien gardée, je t’en réponds !… Mais on ne pense pas à tout… Sous ce déguisement, j’entre à l’abbaye… Dans une heure, quand j’en sortirai, je saurai où sont cachés les millions… Et ils auront beau multiplier les précautions, couvrir la montagne d’espions, de soldats déguisés et d’assassins, c’est moi qui les aurai. Entends-tu, Saêtta ?… ils seront à moi, les millions. Ta curiosité est-elle satisfaite ? Puis-je passer enfin ?…
    – Va, va, mon fils, dit vivement Saêtta dont les yeux étincelaient. Attends que j’arrange cette écharpe… Tu aurais mieux fait de couper tes moustaches… Va… Et bonne chance !
    Débarrassé de l’importun, Jehan rattrapa Perrette en quelques enjambées. Et en marchant, il songeait à part lui :
    – Voilà ! si ce que je crois est vrai, la porte de l’abbaye sera gardée et nous ne pourrons pas sortir !… Saêtta va agir !… Malédiction ! échouer si près du but, après douze jours, mortellement longs, passés à prendre les précautions les plus minutieuses… Et cela parce que ma mauvaise étoile a jeté sur mon chemin au dernier moment, ce sacripant de Saêtta… Et si je me trompe, pourtant, si je l’ai soupçonné à tort ?… Oui, c’est possible, cela !… Mais je ne suis pas sûr de me tromper non plus. Donc, il me faut agir comme si j’avais deviné juste… Ceci bouleverse complètement mon plan primitif… Il le faut cependant.
    Et à voix basse, il donna de nouvelles indications à Perrette qui l’écoutait attentivement et approuvait doucement de la tête, de son air sérieux.
    Saêtta le regarda s’éloigner, un sourire étrange aux lèvres. Puis, piquant droit à travers la montagne, il s’en fut rejoindre le chemin de gauche qui, on se le rappelle, passait sur le côté de la chapelle et allait à la fontaine du But.
    Il y avait, au centre de l’enceinte palissadée, une ouverture par où les ouvriers enlevaient la terre et les gravois qu’ils allaient jeter plus loin. Le jour, pendant les travaux, on adaptait là une porte à claire-voie. Le soir, on bouchait complètement cette ouverture. Saêtta alla se poster devant cette porte et demeura là, ostensiblement. Ce qu’il avait prévu arriva. Un gentilhomme, à l’intérieur de la palissade, s’approcha de la porte et demanda sur un ton plutôt rude :
    – Que désirez-vous, mon brave ?
    Sans se démonter, Saêtta répondit tranquillement :
    – Je désire parler à M. l’officier de service… Communication de la plus haute importance.
    Le gentilhomme le regarda jusqu’au fond des yeux et, ouvrant la porte, il sortit en disant :
    – L’officier de service, c’est moi.
    – Je m’en doutais, sourit Saêtta.
    Et, emmenant l’officier à l’écart, il se mit à lui parler avec volubilité.

    *
    * *

    A peine Saêtta avait-il tourné le dos à la croix, grimpant lestement la montagne qu’un homme se dressa du fond du fossé où il était couché. C’était le moine Parfait Goulard. Il regarda un instant Saêtta qui grimpait là-haut et le chemin par où Jehan et Perrette avaient disparu. Il tourna le dos à la montagne et descendit vers la croix. Il titubait outrageusement et, tout à coup, il se mit à chanter à tue-tête.
    De l’autre côté du chemin, en face du fossé d’où venait de surgir l’ivrogne, presque au bord du chemin, à deux pas de l’endroit où Jehan s’était entretenu avec Saêtta, il y avait un gros chêne touffu. Presque contre ce chêne, se dressait une énorme roche. Au pied de cette roche, à l’ombre de l’arbre géant, un homme était étendu. Saêtta, en s’élançant, était passé à deux pas de lui sans le voir. Cet homme, c’était le chevalier de Pardaillan.
    Pardaillan se redressa lentement, comme l’avait fait Parfait Goulard. Il avait cette physionomie extraordinairement froide, quelque peu hérissée, indice d’une violente émotion. Il regarda le moine qui arrivait à la croix et il songea :
    – Quand je l’ai vu passer, ce moine paraissait ivre. Cela ne m’a pas surpris, car j’avais reconnu le personnage. Lorsqu’il s’est caché brusquement, lorsqu’il est sorti de son trou, ses mouvements et sa physionomie dénotaient un homme parfaitement maître de soi… Et maintenant, le voilà plus ivre que jamais ; il s’en va titubant et braillant comme un âne !… Qu’est-ce que cela veut dire ?…
    Il se retourna du côté de Montmartre et regarda

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