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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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d’aller à la rencontre de son ami qui connaissait trop bien les mœurs des Indiens pour ne pas trouver tout de suite la meilleure piste. Mais l’idée lui vint que peut-être le gamin, sachant que Tim était allé chercher son canoë, pouvait être resté au port et s’y tenir caché en attendant la nuit grâce à laquelle il pourrait voler un canot de pêcheur et ainsi quitter l’île en évitant les abords du camp.
    Repassant par la maison juste le temps de dire à Martha qu’il allait fouiller le port et de lui demander d’y envoyer Tim dès qu’il reparaîtrait, Gilles se mit à arpenter le long quai de bois, passant en revue la flottille de canoës rangés sagement contre les pieux de l’estacade.
    L’endroit était désert à l’exception de trois ou quatre débardeurs qui ronflaient au soleil, appuyés contre une pile de bois de charpente. Seul, un canot détaché de l’un des navires français barrant la rade approchait à force de rames sur l’eau calme. Craignant que ce ne fût La Fayette, Gilles protégeant ses yeux de sa main contre la réverbération, prit le temps d’examiner ceux qui se tenaient debout à l’arrière. Mais, reconnaissant la silhouette courte de M. de la Pérouse, son tricorne en auréole et auprès de lui, la forme plus élancée de M. Destouches commandant le Neptune , il reprit ses recherches sans plus s’en inquiéter.
    Il arrivait à la hauteur de l’auberge de Flint, où Rochambeau avait passé sa première nuit, quand une véritable clameur en jaillit. Une de ces clameurs qui ne trompent pas il y avait là toute une collection de soldats occupés sans doute à tout autre chose qu’à leur service. Sachant la sévérité avec laquelle Rochambeau et Ternay surveillaient le comportement de leurs hommes, Gilles pensa qu’il serait peut-être bon d’entrer pour jeter un coup d’œil et tenter de calmer l’agitation avant que MM. de la Pérouse et Destouches n’en recueillent les échos en mettant pied à terre.
    Il poussa la porte, vit qu’il était temps d’intervenir et que, par la même occasion, il avait trouvé ce qu’il cherchait. En effet, le jeune Indien était là, attaché contre l’un des piliers de bois qui soutenaient le toit de l’auberge et qu’il embrassait, toujours aussi impassible d’ailleurs mais lorsque Gilles pénétra dans l’auberge, il vit dans le regard que l’enfant tournait vers lui, une angoisse qui lui rendait son âge. Ce gosse avait peur, comme tous les gosses du monde aux prises avec un tas de brutes.
    En effet, installés à une table à quelques pas de lui, une trentaine d’hommes de la légion de Lauzun se bousculaient à qui mieux mieux pour déposer des pièces de monnaie sur cette table où l’on jouait au pharaon.
    — Allons, messieurs, qui en veut ? glapit une voix que Gilles reconnut avec un tressaillement de colère. Il faut monter vos mises un peu plus haut ! Ce jeune et vigoureux sauvage que j’ai eu le bonheur de capturer atteindrait certainement un meilleur prix qu’un négrillon au prochain marché aux esclaves de Boston ou de Providence.
    — S’il vaut si cher, grogna quelqu’un, pourquoi est-ce que tu ne le gardes pas pour toi ? Vends-le toi-même !
    — Parce que, quand on sort d’où je viens on a plus besoin d’argent que d’un esclave, ricana Morvan de Saint-Mélaine. Et toi tu ne poserais pas de question aussi stupide si tu avais encore de quoi miser ! Allons, messieurs, du nerf !… Vous profitez là d’une occasion exceptionnelle.
    Debout au seuil de la taverne, Gilles s’accorda un instant pour examiner son ennemi. Depuis leur rencontre sur le port de Brest, la veille du départ, il n’avait pas revu le frère de Judith. Mais, en parcourant les rôles de l’armée qu’il avait à sa disposition en tant que secrétaire du Général, il avait pu se convaincre de ce qu’aucun Saint-Mélaine n’y était inscrit et il en avait conclu que Morvan s’était engagé sous un faux nom.
    La preuve lui en était venue toute seule, au cours de l’interminable traversée. Le 26 mai, en effet, M. de Lombard, commandant la Provence , qui portait les hommes de Lauzun avait signalé que l’un d’eux venait de passer en conseil de guerre et allait subir le supplice de la cale 5 pour avoir volé du rhum et tenté une fois ivre de mettre le feu au vaisseau. Il s’agissait d’un certain Samson dit La Rogne.
    Saisi d’un inexplicable pressentiment, Gilles avait suivi la punition

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